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"Écoutez ! Ma parole est vérité ! Voici l'histoire d'Eylir Ap'Callaghan !"

Laurent Kloetzer l'une des plus belles plumes de la SFFF francophone frappe encore :
- un immense empire atlante qui entre dans la modernité
- une Europe encore divisée en peuples et en tribus barbares
- une Méditerranée et un Moyen-Orient partagés entre petits royaumes et grandes Cités-États

Les 100 premières pages nous content l'ascension et la chute d'un Alexandre le Grand celtique (Allander = Alexander) et la suite du roman est un magnifique chassé-croisé entre Eylir à la poursuite de la gloire de son frère aîné et Kyle à la poursuite du héros dont il conte les aventures.

Dans tous les chapitres, quels que soient lieux traversés par les personnages, on est plongé dans une ambiance incroyable où soufflent toutes les formes des vents de l'aventure ! Après 730 pages je me suis dit : C'est déjà fini ? Mais j'en veux encore et encore moi !"

Mais il y a quand quelques trucs chiffonnants, qui pourraient rebuter une partie de ses lecteurs :
- la thématique des 3 rois (blanc = paix, rouge = guerre, noir = mort) n'est pas explicitée jusqu'à son terme
- les chapitres quezako : les passages où Eylir et Kyle voyagent jusqu'aux frontières de la folie (qu'ils franchissent plus ou loin allègrement d'ailleurs) sont assez confus et nébuleux pour moi (oui je sais c'est fait exprès, mais à lire c'est bizarre quand même)
- le destin d'Eylir, roi de la loose particulièrement scoumouneux
("tomber 7 fois, se relever 8" : avec Eylir, je ne sais pas si on doit parler d'abnégation, de fatalisme ou de stupidité)
- l'auteur se perd encore quelques fois pour sa fascination parfois malsaine pour les jeunes filles en fleurs
- le basculement dans le fantastique nous offre de magnifiques moments mais aussi une fin à la limite du WTF

Et puis j'ai adoré les hommages aux grands auteurs :
- le Picte Mak Morn et l'Harmoréen, aventurier la longue chevelure noire et à la musculature puissante qui se déplace tel une panthère
- le titre et le contenu du chapitre "l'arbre du malheur" qui rappelle fortement une scène d'un film en 1981

Toutefois le roman est si dense et si intense, qu'une fois passé l'amère fin on ne peut (veut ?) pas replonger dedans. Qualité d'écriture et esprit d'aventure ne sont pas incompatibles : merci à LK de le prouver une nouvelle fois.
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« Le royaume blessé » est un roman que j'étais certaine d'apprécier tant on ne m'en avait parlé qu'en bien. Et bien pas de chance... L'intrigue tout d'abord ne m'a pas vraiment emballée et c'est bien laborieusement que je l'ai suivi jusqu'au bout. La faute probablement au mode de narration adopté par l'auteur, à savoir la collecte de témoignages concernant la vie de cet Eylir Ap' Callaghan pour lequel j'ai peiné à comprendre la fascination du narrateur. Les personnages pour leur part ne m'ont jamais passionnés : le narrateur et sa quête m'ont laissée indifférente, Eyllir est plus qu'exaspérant, quant aux femmes ce sont elles qui souffrent le plus d'un manque de personnalité dérangeant (Lysiane Rolan en tête malheureusement).

Je n'avais lu que des critiques dithyrambiques à propos de ce roman, aussi il est fort probable que c'est moi qui ai complètement loupé le coche ou qui n'étais pas dans de bonnes dispositions mais malgré tous mes efforts jamais l'histoire ne m'a transportée ou enthousiasmée. Tout n'est pas perdu toutefois puisque j'ai par la suite retenté un autre roman de L. Kloetzer, « Petites morts », que j'ai cette fois beaucoup apprécié. Si je n'ai pas accroché au « Royaume blessé » je ne serais donc pas contre poursuivre ma découverte de cet auteur atypique dont je me garderais bien de dénier le talent malgré cette malencontreuse expérience de lecture.
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Initialement publié il y a tout juste dix ans dans la collection Lunes d'Encre puis réédité en poche en 2009, "Le royaume blessé" a mis longtemps à attirer mon attention. Mais quelle excellente surprise ce fut ! À vrai dire, mon dernier coup de coeur comparable en fantasy date de ma découverte de Jean-Philippe Jaworski, il y a... oh, déjà sept ans. Mais là où ce dernier a su toucher un lectorat très vaste, "Le royaume blessé" semble au contraire n'avoir connu qu'un succès d'estime, cantonné au noyau dur des amateurs du genre. Dans sa capacité à raconter une histoire passionnante comme dans l'excellence du style, Laurent Kloetzer n'a pourtant pas grand-chose à envier à l'auteur de "Gagner la guerre", et mériterait tout autant, à mon sens, de recevoir les lauriers du public.

Ce bon gros pavé de près de 800 pages au format poche fut donc pour moi une lecture tout à fait exaltante, et pourtant ce n'était pas gagné d'avance. On a là un univers d'heroic-fantasy qui peut paraître sans imagination, où l'on reconnaît dans chaque élément un calque de notre propre monde, de notre propre réalité historique, légèrement travestis. Les premiers chapitres se passent ainsi à relater au lecteur les conquêtes d'Alexandre le Grand en ne changeant quasiment rien d'autre que les noms... C'est le genre de "facilité" qui, en général, est pour moi rédhibitoire. Pourtant ici, miracle ! tout s'agence à la perfection, chaque page est un plaisir, et c'est sans doute l'un des plus grands mérites de l'auteur que d'avoir su ainsi obtenir un résultat excellent avec des ingrédients somme toute assez banals.

Car Laurent Kloetzer n'a évidemment pas eu pour ambition de "révolutionner le genre", pour reprendre un poncif de la critique littéraire. On est ici dans une fantasy "à l'ancienne" assumée comme telle, inspirée par Howard et Leiber. Conséquence logique, il ne faudra pas s'offusquer de voir les héros piller et tuer sans états d'âme, et les femmes être réduites au rôle d'objets sexuels : dans l'univers âpre et barbare du "Royaume blessé", les personnages ont autre chose à faire qu'incarner les belles vertus humanistes de notre siècle.

Le choix le plus fort de l'auteur, celui qui structure tout le roman et qui, sans doute, conditionne sa réussite, est d'avoir confié la responsabilité de la narration à un homme dont on ne sait pas grand-chose, et dont la quête consiste à recueillir une foule de témoignages sur le héros du roman : Eylir ap'Callaghan, dont la vie, les exploits et les échecs seront ainsi révélés au fil de l'enquête minutieuse menée par le narrateur... avec tout ce que cela implique de biais, d'approximations, voire de mensonges. Associé à la plume fort évocatrice de l'auteur, cet aspect volontairement nébuleux comme l'est tout récit légendaire — quel mythe ne connaît pas plusieurs versions, parfois contradictoires ? — concourt à donner au roman une ambiance tout à fait particulière ; si l'on peut parler de souffle épique, ce ne sera pas tant dans le sens d'une accumulation de grandes scènes d'action et de combats, que dans le sentiment d'avoir écouté un barde chanter les aventures d'authentiques héros des temps anciens...

Au final, voilà une formidable lecture qui donne envie d'enfourcher un destrier et de brandir une épée en hurlant "Callaghan ! Callaghan !"... ou bien, plus prosaïquement, d'aller découvrir sans tarder les autres oeuvres de l'auteur : "La voie du cygne", situé dans le même univers mais dont l'atmosphère semble tout à fait différente de celle du "Royaume blessé", me fait déjà de l'oeil...
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L'Empire Atlan règne en maître sur l'Occident, tel le géant repu qu'il est devenu. A l'Est une mosaïque de peuples barbares se dispute le Haut Royaume Kelte. Ce dernier, rarement uni, a toutefois connu quelques héros fédérateurs, comme Allander Ap'Callaghan qui, à l'image d'Alexandre le Grand, est parvenu à conquérir l'intégralité du monde oriental connu, jusqu'au bord du monde. Mais il meurt lui-aussi, et son Empire se délite pour revenir bien vite à sa situation d'origine. Ne reste alors que les souvenirs, les déceptions et les espoirs dans les esprits de ceux qui ont connu le héros. Parmi eux, il y a Eylir Ap'Callaghan, son demi-frère, dont la destinée est aussi épique que mystérieuse.

Le royaume blessé de Laurent KLOETZER lui est consacré. On pourrait donc penser que le roman est une banale fantasy guerrière comme on a l'occasion d'en lire régulièrement. Ce n'est pas du tout le cas dans la mesure où le récit est bien plus subtil que cela grâce à un mode narratif original, celui du chroniqueur. En outre celui-ci n'a jamais rencontré Eylir Ap'Callaghan et a juste entendu parler de son histoire au détour d'une taverne. Véritablement subjugué par ce récit aux allures de conte, il va remonter la piste du héros en rencontrant tour à tour ceux qui l'ont connu, et en transcrivant leurs propos. Ainsi, l'histoire d'Eylir est-elle racontée d'une multitude de points de vue, la synthèse étant réalisée par une tierce personne qui, à quelques années de distance, vit elle-même sa propre vie. C'est alors l'occasion de découvrir des personnages hauts en couleurs dans un univers dual, médiéval pour le Haut Royaume Kelte, de type Pré-Renaissance pour l'Empire Atlan.

C'est par ailleurs servi par une très belle plume, KLOETZER sachant parfaitement adapter son style à la personnalité de ses multiples personnages. Ce faisant il va et vient sans cesse entre l'histoire avérée, la fresque épique et la légende, donnant à son récit un souffle aussi époustouflant qu'émouvant. Car l'auteur aime manifestement ses personnages, et sait nous les faire aimer avec lui, y compris le barbare Eylir Ap'Callaghan dont la quête de gloire, qui semble vouée à l'échec tout au long du récit, se transforme au fil de ses aventures en une quête intérieure bien plus profonde.

Le roman se veut aussi un hommage aux maîtres du genre que sont TOLKIEN, LEIBER et HOWARD. Non seulement Laurent KLOETZER baptise trois de ses personnages secondaires du second prénom de ces auteurs, mais on retrouve aussi dans le personnage d'Eylir les caractéristiques de certains des héros mythiques à qui ils ont donné vie, en faisant ainsi une synthèse complexe et crédible. Ce sont celles du roi sans couronne Aragorn qui parcourt l'Empire tel un rôdeur ; ce sont également celles de Fafhrd pour sa brutalité, son esprit d'aventure et son humanité ; ce sont enfin celles de Conan avec sa destinée contrastée de roi et de guerrier de fortune.

Enfin KLOETZER structure parfaitement son intrigue et captive de bout en bout le lecteur avide de connaître les destinées de ses personnages. Parmi les principales, celle d'Eylir Ap'Callaghan est certes attendue mais néanmoins touchante de par sa dimension tragique, celle du chroniqueur, plus mystérieuse, frappe pour sa complexité dans sa relation au héros. D'ailleurs, c'est dans le dernier tiers du roman, quand les deux personnages se rejoignent, que le roman se fait un peu plus confus et la lecture plus difficile.

Ni ce bémol, ni le manque d'originalité de l'argument principal du roman ne peuvent remettre en cause les immenses qualités stylistiques de l'oeuvre de Laurent KLOETZER. En rendant hommage aux grands classiques de la fantasy, il expurge le genre de tous ses éléments non indispensables (pas de bestiaire traditionnel, pas de héros surhumain…) pour n'en retirer que la quintessence. C'est pourquoi il faut désormais compter le royaume blessé parmi le meilleur de la fantasy, et pas seulement d'un point de vue franco-français.
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Callaghan! Callaghan!

Ce fut une lecture tout en dent de scie. Un envol tout en couleur, plein de conquête, de guerre et d'exploit aux confins des mondes connus, une enquête qui s'enlise et se perd en digression de toute sorte pour cloturer sur un final tout en point d'interrogation.

L'idée d'une narration à 2 niveaux est de bon ton mais à un certain moment, je me suis quand même demandé mais quand est-ce que cela va démarrer! Et quand cela démarre, cela part un peu dans tous les sens, un peu comme si l'auteur ne savait pas ou il voulait aller bien que je pense qu'il savait ou il voulait aller mais pas nécessairement avec qui... Et donc multitudes d'histoire dans l'histoire avec à chaque fois son décor et ses personnages secondaires.

Et finalement, par un tour de passe-passe que je n'ai pas encore éllucidé, l'étau se resserre et l'histoire prend un tournant assez inattendu, intéressant certes mais trop fragile dans ces bases que pour vraiment tenir la route.

Je ressens plus ce livre comme un recueil de nouvelles et d'essai ficelé et empaquetté sous la tutelle d'un conteur un peu trop dandy à mon gout.

Bref, il y a à boire et à manger dans ce roman mais cela n'en fait surement pas un repas digeste et cohéreent.
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Une épopée ambitieuse sur les traces d'un équivalent imaginaire d'Alexandre le Grand, ou de son frère. Cela commence très bien, j'ai été pris très vite dans le récit, mais cela finit par s'essouffler et cela finit par devenir longuet. Dommage, car si le rythme et l'intérêt avaient été maintenus jusqu'au bout, cela aurait pu être un excellent roman historico-fantastique. Il y a tout de même un travail intéressant sur la notion de récit historique et sur le rôle du chroniqueur historique.
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Ce livre marque le grand retour de Laurent Kloetzer, après cinq ans d'absence, lui qui avait beaucoup marqué les esprits avec ses deux premiers romans, Mémoire vagabonde et La voie du cygne, et à un moindre niveau avec son recueil de nouvelles SF, Réminiscences 2012. Projet ambitieux, le Royaume blessé l'est assurément : livrer un roman de fantasy hommage aux maîtres du genre, Tolkien, Leiber et Howard (qui interviennent tous par le biais de personnages secondaires portant leur second prénom ou nom, soit Reuel, Reuter et Ervin), auteurs que Kloetzer apprécie visiblement beaucoup. Imposant aussi par sa taille, puisque ce livre dépasse les sept cents pages. Il n'en fallait pas moins pour narrer la destinée épique d'un personnage hors du commun, Eylir Ap'Callaghan, un chef Kelte, celui qui accéda au statut de Roi des Rois, et s'est opposé à Atlantis, avant de chuter pour devenir mendiant et bandit de fortune.
L'originalité de la narration tient au fait que tout est rapporté par un personnage sans nom, qui commence son enquête en rencontrant un barde ayant connu les Ap'Callaghan. Dès lors, son périple suivra celui d'Eylir, puisqu'il reconstitue peu à peu la trajectoire de celui-ci et rencontre tous ceux qui l'ont connu. Ce qui ne devait être à la base qu'une simple enquête se transforme en course-poursuite, au cours de laquelle ce « détective » trouve une vraie justification à son existence, voire une identité. Et qui sait, un jour peut-être, son chemin croisera-t-il celui de l'homme qu'à plusieurs reprises il avait cru mort... Cette narration en creux est intéressante, parce qu'elle permet d'alterner passages à la première personne de ceux qui ont croisé Eylir — tour à tour dithyrambiques, indifférents ou aigris — et le compte-rendu plus circonstancié de l'enquêteur tenu à la rigueur puisqu'il travaille pour une commanditaire, mais qui s'enflamme néanmoins parfois aux exploits d'Ap'Callaghan. Ce côté kaléidoscopique, s'il est intéressant, est néanmoins parfois un peu déstabilisant ; il faut alors s'accrocher pour rester concentré sur cette destinée haute en couleurs.
L'histoire d'Eylir est en elle-même assez banale pour un roman de fantasy : on pense notamment à Conan pour le destin contrasté roi / soldat de fortune. Mais l'auteur le dit assez fort : il s'agit d'un vibrant hommage aux lectures ayant bercé sa vie, aussi reste-t-il dans les canons du genre définis par ces auteurs. C'est un petit motif de déception : La voie du cygne, en son temps, avait montré que Kloetzer est capable de traiter les clichés du genre en leur insufflant une seconde vie salutaire. Ici, si la vitalité est intacte, on sent l'auteur trop respectueux des grands anciens pour vraiment livrer une oeuvre personnelle. Reste néanmoins un grand roman, ciselé avec beaucoup de grâce — par ce très beau styliste qu'est Laurent Kloetzer — et qui vous fera connaître un nouveau personnage inoubliable comme la fantasy en a le secret : Eylir Ap'Callaghan.
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Le royaume blessé est un roman de Laurent Kloetzer, et c'est d'ailleurs son premier livre que je lis.
Alors c'est un livre plutôt sympathique, on passe un bon moment, mais rien de plus. On est face à un fantasy très classique, d'ailleurs le livre est vendu comme rendant hommage au grand de la fantasy: Robert E. Howard, J.R.R. Tolkien.... Et à ce niveau la le livre respecte ses promesse. On assiste a de grandes bataille, de grandes chevauchée, de grand voyage à travers toute la carte, à de grand royaume. le personnage principale: Eylir Ap'Callaghan, est un personnage très puissant, limite considérer comme un surhomme, il échappe plusieurs fois à la mort, il touche plusieurs fois le fond, mais arrive toujours à remonter etc... le livre est construit au début par des texte recueillit par Kyle chroniqueur d'Eylir, qui m'ont toujours semblé extrêmement détailler pour des histoires raconter oralement, et puis pour la fin nous suivons Kyle qui est à part entière dans l'histoire d'Eylir.
En bref c'est livre sympathique, qui malgré quelque défaut qui pourrait rebuter le lecteur, nous fait passer un bon moment. A conseiller pour ceux qui veulent lire de la grande fantasy épique, avec barbare, et grande guerre !
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je n'ai aucune sympathie pour Laurent Kloetzer, pas le moindre a priori favorable. Il avait décrit son univers dans Casus Belli ? La belle affaire : n'importe qui pouvait écrire dans ce magazine, j'en suis la preuve vivante. Il a déjà été publié chez Mnémos ? Ça ne m'étonne pas, ils ne publient que de la fantasy de supermarché dans cette boite. Il a un blog ? Ne me faites pas rire, les blogs sont la quintessence de la vacuité de cette génération de rôlistes qui se prennent au mieux pour des lecteurs éclairés et au pire pour des plumitifs.

On va donc laisser de côté le copinage bisounours qui fait de chaque auteur français de fantasy un nouveau prodige (comme cette propagande imbécile qui fait passer Jean-Philippe Jaworski pour un auteur) et dire la vérité vraie. Quelqu'un doit dire que le roi est nu.

C'est quoi, le royaume blessé ? Déjà, c'est pas loin de 800 pages. Ça ne s'avale pas comme de la petite bière, c'est une traversée au long cours. Dans une espèce d'Europe distordue et légendaire, un peuple alterne les grandes heures et les moments moins glorieux. Ce sont les Keltes. On pourrait les croire en fin de race tant la civilisation des Atlans, le peuple qui a le dessus dans la valse de l'Histoire, est bien plus moderne. Mais ce sont finalement la gloire des Atlans qui est en train de partir en lambeaux alors que leur empire vole lentement en éclats sous l'action de l'érosion du pouvoir. Alors les Keltes ont une certaine marge de manoeuvre. D'où des soubresauts tumultueux, des guerres de clans, des tentatives désespérées pour réanimer la flamme d'une fierté entière. Dans cette espèce de renouveau kelte, des hommes de légende se forgent une immortalité constituée de faits d'armes racontés dans les auberges et d'un trône souillé du sang de l'ennemi et des alliés.

Or un jeune homme simple, fruit de la culture atlan, se met en tête de raconter la vie d'un de ces Keltes dont l'existence dépasse l'entendement. Au fil de ses pérégrinations, il rencontre des contemporains de cet homme, des amis, des parents, qui lui racontent des tranches de vie, des moments charnières de sa destinée. de plus en plus obsédé par cette histoire qu'il a l'impression de pouvoir toucher du bout des doigts, notre homme va finir par s'aventurer en terre kelte pour en apprendre plus. Et en marchant dans les pas de cet homme qui l'obnubile, il va prendre la mesure de ce peuple tout en vivant ses propres tribulations.

Je reproche souvent à la fantasy de manquer de contenu. Ce sont souvent des personnages sans nuances qui vivent des quêtes censément initiatiques dans des univers aussi complexes que celui de Placid et Muzo. C'est souvent le festival du cliché tant dans la narration que dans le propos. Comme il y a la malbouffe, il existe une sorte de malfantasy composée de cycles (inter)minables, de recettes éculées et d'effets de mode. Et bien c'est peu dire que Laurent Kloetzer est à l'opposé de cet écueil.

Le royaume blessé m'est resté longtemps dans les mains. Ça respirait bon la lente construction d'un mythe. Pas le truc où un jeune paysan découvre en 6 chapitres qu'il est le fils du roi et qu'il doit mener son armée pour reprendre la couronne injustement spoliée par l'infâme oncle du héros. Non, je parle de mythe dans ce que ça comporte de symbolique, d'idolâtrie et d'allégorie. À mesure que le héros collecte les fragments de la vie de son héros, on mesure le parcours d'un homme extraordinaire qui, à l'image de son peuple, alterne grandeur et décadence. Chaque anecdote façonne un peu plus la glaise de ce portrait et affine ses traits. Ici, une blessure due à une jeunesse désinvolte. Là, une ride pour un amour trop souvent perdu. le récit à deux niveaux fait s'opposer la vie hors du commun d'un Kelte qui veut marquer son temps et celle, plus simple, d'un témoin qui vit par procuration.

C'est long parce que le roman ne se contente pas de raconter que les bons moments. On s'attarde au contraire sur des choses en apparence futiles mais qui participent elles aussi à la mue de cet homme en gloire. Bien évidemment, les rencontres fortuites du narrateur qui a la chance de se trouver au bon endroit au bon moment pour rencontrer les bonnes personnes peuvent sembler artificielles. Elles font partie du jeu.

Mon seul regret tient à la nature de cet univers qui est un écho déformé de notre passé. Les Atlans romains, les Keltes celtes, ce héros qui ne s'appelle pas Alexandre, c'est efficace, mais ça ne rend pas justice au talent de l'auteur. Il pourrait tisser un univers réellement différent et cohérent sans s'appuyer sur ce faux-semblant, à mon sens.

Pendant 800 pages, j'ai marché dans les chaussures de cet être mémorable qu'est Eylir Ap'Callaghan. J'ai senti le poids de ses regrets, l'usure de son épée, la colère qui cogne dans ses tempes. Dans les passages les plus puissants, il m'a semblé entendre la voix de Lisa Gerrard chanter Summoning of the Muse en superposition à la plume de l'auteur. Je ne peux pas dire ça de beaucoup d'auteurs qui prétendent écrire de la légende.

Bref, ce n'est pas sorcier de comprendre que la petite gloriole de Laurent Kloetzer est totalement infondée. Ce n'est rien qu'un de ces trentenaires qui a trop de temps libre. J'espère pour lui qu'il a un emploi alimentaire car il n'est pas prêt d'avoir sans place dans un catalogue France-Loisir. Alors ne comptez pas sur moi pour chanter ses louanges avec les autres. C'est favoritisme et renvoi d'ascenseur dans ce milieu.
Lien : http://hu-mu.blogspot.com/20..
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Vendu comme un livre de Fantasy au souffle picaresque rendant hommage aux auteurs du genre, on pourrait se méfier, non ? Mais pourtant c'est vrai. Il faut se laisser prendre à la plume de Kloetzer, c'est un voyage qui se révèle magnifique. Certes, au début, toute personne connaissant un peu Alexandre le Grand peut redouter une simple transposition du personnage. Puis, curieusement, cette histoire vient à se répéter sur le descendant de cet Eylir Ap'Callaghan. On se dit, ce n'est pas possible, l'auteur ne va pas… et hop, on se laisse prendre au piège. Si Kloetzer s'inspire du personnage de Macédoine, il le place dans une culture celte, dont il place l'oralité au coeur de la société. On ne s'étonnera donc pas que tout le récit nous est conté par un jeune homme, responsable selon lui de la mort même du héros qu'il va suivre… Et quel héros ! Grandiose, humain, fragile et fort à la fois, bref, un vrai personnage. La dimension « fantasy » n'est pas oubliée, avec le peuple des Pictes, les rencontres et voyages improbables du dernier des Callaghan. La fin est tout simplement superbe, quand le Roi blessé tente de sauver « son royaume ». Je n'en dis pas plus mais l'idée est géniale et justifie tout ce qui a été dit, superbe je vous dis. Et les hommages aux grands auteurs (Leiber, Howard, Tolkien…) : eh bien, ils sont clairement affichés. Cela surprend parfois, mais le style de Kloetzer nous mène sans problème là où veut l'auteur. Il veut rendre hommage et ne s'en cache pas. Derrière le royaume blessé, il y a bien plus qu'une histoire de Fantasy épique. Il y a un auteur.
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