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Citations sur Combat de nègre et de chiens (12)

j'ai toujours pensé que, si on regarde longtemps et soigneusement les gens quand ils parlent, on comprend tout.
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Je crois que c'est seulement après beaucoup de vies d'homme, ridicules et bornées, brutales et braillardes comme sont les vies des hommes, que peut naître une femme. Et seulement, oui seulement après beaucoup de vies de femmes, beaucoup d'aventures inutiles, beaucoup de rêves irréalisés, beaucoup de petites morts, alors seulement, alors peut naître un nègre, dans le sang duquel coulent plus de vies et plus de morts, plus de brutalités et d'échecs, plus de larmes que dans aucun autre sang.
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HORN (regardant les dés). – C’est moi qui prends. (Silence ; les appels de la garde.)
CAL (bas). – Il grince des dents.
HORN. – Quoi ?
CAL. – Là, derrière l’arbre, le nègre, dis-lui de partir, Horn. (Silence. Aboiements au loin ; Cal sursaute) Toubab ! Je l’entends. Il traîne près de l’égout ; qu’il y tombe, je ne bougerai pas. (Ils misent.) Saloperie ; il traîne et quand je l’appelle, il ne répond pas, il fait celui qui réfléchit. C’est lui ? Oui. Réfléchis, vieux cabot ; je n’irai pas te repêcher. Il a dû sentir l’odeur d’une bête inconnue ; qu’il se débrouille ; il ne devrait pas tomber ; et s’il tombe, je bouge pas. (Ils regardent les dés. Cal ramasse ; bas : ) Le gars, Horn, je peux te le dire, ce n’était même pas un vrai ouvrier ; un simple journalier ; personne ne le connaît, personne n’en parlera. Alors il veut partir ; moi je dis : non, tu ne partiras pas. Quitter le chantier une heure avant ; c’est important, une heure ; si on laisse prendre une heure, il y a l’exemple que cela fait. Comme je te le dis, je dis donc : non. Alors il me crache aux pieds et il part. Il m’a craché aux pieds et à deux centimètres d’était sur la chaussure. (Ils misent.) Donc j’appelle les autres gars, je leur dis : vous le voyez, le gars ? (Imitant l’accent nègre : ) – Oui, patron on le voit – il traverse le chantier sans attendre l’arrêt ? – oui patron oui patron sans attendre l’arrêt – sans casque, les gars, est-ce qu’il a un casque ? – non patron on voit bien il ne porte pas son casque. Moi je dis : souvenez-vous en : il est bien parti sans que je l’autorise – oui patron oh oui patron sans que tu l’autorises. Alors il est tombé ; le camion arrivait et je demande encore : mais qui conduit le camion ? mais à quelle vitesse il fonce ? il n’a pas vu le nègre ? Et alors, hop ! (Cal ramasse.)
HORN. – Tout le monde t’a vu tirer. Imbécile, tu ne supportes même pas ta foutue colère.
CAL. – C’est comme je te le dis : ce n’est pas moi, c’est une chute.
HORN. – Un coup de feu. Et tout le monde t’a vu monter dans le camion.
CAL. – Le coup de feu c’est l’orage ; et le camion, c’est la pluie qui aveuglait tout.
HORN. – Je n’ai peut-être pas été à l’école, mais toutes les conneries que tu diras, je les connais d’avance. Tu verras ce qu’elles valent ; pour moi, salut, tu es un imbécile et ce n’est pas mon affaire. Je mets cent francs.
CAL. – Je suis.
HORN (tapant sur la table). – Pourquoi tu y as touché, bon Dieu ? Celui qui touche à un cadavre tombé à terre est responsable du crime, c’est comme cela dans ce foutu pays. Si personne n’y avait touché, il n’y aurait pas eu de responsable, c’était un crime sans responsable, un crime femelle, un accident. L’affaire était simple. Mais les femmes sont venues pour chercher le corps et elles n’ont rien trouvé, rien. Imbécile. Elles n’ont rien trouvé. (Il tape sur la table.) Débrouille-toi. (Il fait tourner les dés.)
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Alboury :
"On dit que nos cheveux sont entortillés et noirs parce que l'ancêtre des nègres, abandonné par Dieu puis par tous les hommes, se retrouva seul avec le diable, abandonné lui aussi de tous, qui alors lui crassa la tête en signe d'amitié, et c'est comme cela que nos cheveux ont brûlé."
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Il y a très longtemps, je dis à mon frère : je sens que j'ai froid ; il me dit : c'est qu'il y a un petit nuage entre le soleil et toi ; je luis dis : est-ce possible que ce petit nuage me fasse geler alors que tout autour de moi, les gens transpirent et le soleil les brûle ? Mon frère me dit : moi aussi, je gèle. (p. 32)
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La seule chose que j'ai apprise de vous, malgré vous, c'est qu'il n'y a pas assez de place dans votre tête et dans vos poches pour vos mensonges ; on finit par les voir. (p. 83)
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p. 105 : Quand reverrai-je une femme au fond de ce trou ? Je perds ma vie, au fond de ce trou ; je perds ce qui, ailleurs, seraient les meilleures années. A être seul, toujours seul, on finit par ne plus savoir son âge ; alors de te voir, je me suis souvenu du mien. Il va falloir que je l'oublie de nouveau. Et qu'est-ce que je suis, ici, qu'est-ce que je continue à être ? rien. Tout cela pour l'argent, bébé ; l'argent nous prend tout, même le souvenir de notre âge. Regarde cela. (Il montre ses mains.) Est-ce qu'on dirait encore des mains d'homme jeune ? Est-ce que tu as déjà vu des mains d'ingénieur, en France ? Mais, sans argent, à quoi ça nous servirait, d'être jeune, hein ? Finalement, je me demande, pourquoi, oui, pourquoi je vis.
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I
Derrière les bougainvillées, au crépuscule.
HORN. – J’avais bien vu, de loin, quelqu’un, derrière l’arbre.
ALBOURY. – Je suis Alboury, monsieur ; je viens chercher le corps ; sa mère était partie sur le chantier poser des branches sur le corps, monsieur, et rien, elle n’a rien trouvé ; et sa mère tournera toute la nuit dans le village, à pousser des cris, si on lui donne pas le corps. Une terrible nuit, monsieur, personne ne pourra dormir à cause des cris de la vieille ; c’est pour cela que je suis là.
HORN. – C’est la police, monsieur, ou le village qui vous envoie ?
ALBOURY. – Je suis Alboury, venu chercher le corps de mon frère, monsieur.
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Combat de nègre et de chiens ne parle pas, en tout cas, de l’Afrique et des Noirs – je ne suis pas un auteur africain -, elle ne raconte ni le néocolonialisme ni la question raciale. Elle n’émet certainement aucun avis.
Elle parle simplement d’un lieu du monde. On rencontre parfois des lieux qui sont des sortes de métaphores, de la vie ou d’un aspect de la vie, ou de quelque chose qui me paraît grave et évident, comme chez Conrad par exemple les rivières qui remontent dans la jungle… J’avais été pendant un mois en Afrique sur un chantier de travaux publics, voir des amis. Imaginez, en pleine brousse, une petite cité de cinq, six maisons, entourée de barbelés, avec des miradors ; et, à l’intérieur, une dizaine de Blancs qui vivent, plus ou moins terrorisés par l’extérieur, avec des gardiens noirs, armés, tout autour. C’était peu de temps après la guerre du Biafra, et des bandes de pillards sillonnaient la région. Les gardes, la nuit, pour ne pas s’endormir, s’appelaient avec des bruits très bizarres qu’ils faisaient avec la gorge… Et ça tournait tout le temps. C’est ça qui m’avait décidé à écrire cette pièce, le cri des gardes. Et à l’intérieur de ce cercle se déroulaient des drames petits-bourgeois comme il aurait pu s’en dérouler dans le seizième arrondissement : le chef de chantier qui couchait avec la femme du contremaître, des choses comme ça…
Ma pièce parle peut-être un peu de la France et des Blancs : une chose vue de loin, déplacée, devient parfois plus déchiffrable. Elle parle surtout de trois êtres humains isolés dans un lieu du monde qui leur est étranger, entourés de gardiens énigmatiques. J’ai cru – et je crois encore – que raconter le cri de ces gardes entendu au fond de l’Afrique, le territoire d’inquiétude et de solitude qu’il délimite, c’était un sujet qui avait son importance.
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je trouve que l'on devient con, à jouer
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