Dans l'article : La jeune peinture canadienne
Le seul fait qui rende relativement simple l'étude d'un art dans un Pays jeune, quel que soit ce pays, c'est justement que l'histoire en est brève. Quant au reste, l'imagination a toute liberté pour errer à son gré, depuis l'interprétation du présent jusqu'aux prophéties concernant l'avenir, tout cela sans être guidé par des jalons plus nets que les tendances internationales et les caractéristiques de la nation qu'on étudie. Les routes qui viennent du passé sont courtes, s'il m'est permis d'employer cette image, et le royaume qui se déroule en avant de soi est à peu près illimité. Voilà quelle est donc notre situation lorsque nous examinons l'art canadien d'aujourd'hui.
A l'autre bout de notre continent aussi, à Québec, les recherches de M. Marius Barbeau, ethnologue du gouvernement canadien, comme aussi d'autres personnes qui s'intéressent à ces questions, ajoutent actuellement une page capitale à l'histoire des débuts de notre art national. Ces chercheurs ont déterminé certaines œuvres et fixé l'identité d'un certain nombre d'artistes français, émigrés chez nous sous l'ancien régime, qui ont continué chez nous à pratiquer la tradition française de la sculpture religieuse; plusieurs de ces artistes ont même peint, à l'occasion, des toiles dans la province de Québec et ils y ont produit des œuvres d'une haute perfection technique, œuvres extraordinairement pleines de vie et que l'on peut maintenant étudier et apprécier comme appartenant à une école coloniale française nettement définie, qui est une branche de la sculpture française des dix-septième et dix-huitième siècles.
Pour en revenir à une période plus proche de nous, disons que les premiers portraitistes canadiens sur lesquels nous ayons des renseignements précis, qu'ils fussent anglais, français ou allemands, ne nous avaient apporté rien de plus en leurs personnes que la tradition européenne de leur temps (c'était surtout le début du XIXe siècle) et, quoique la sincérité et une certaine habileté technique ne fussent pas complètement absentes de leurs œuvres, on ne pouvait pas s'attendre à ce que des artistes fameux,ou même les plus remarquables d'entre leurs élèves
L'art canadien eut donc d'humbles débuts et ce n'est guère que depuis cinquante ans qu'il a réellement pris naissance et qu'il est devenu une force importante.