Chaque société, dans un processus que la psychanalyse appelle le contre-transfert, impose une distorsion à la connaissance des cultures dans lesquelles nous n'avons pas été socialisés et c'est cette distorsion qui est source de malentendus. Ces dernières [sic] viennent des présupposés et des projections qui tendent à enfermer les individus, voire une culture tout entière, dans une construction homogène et uniforme.
"Prologue"
Alors que la société japonaise est presque unanimement réputée comme étant l'une des plus conformistes du monde, le personnage de "l'extravagant" contribue à mettre en question un stéréotype tenace. Il montre qu'il y a place pour la non-conformité. Et cette non-conformité valorisant l'accomplissement individuel, la subjectivité et la vie privée au détriment de la socialité, loin d'être rejetée par tous comme une calamité, peut au contraire être considérée comme exemplaire.
Il n'y a de "trop" et de "pas assez" que par rapport à des jugements de valeur dont nous avons du mal à nous départir et dont nous affublons les autres.
Ce qui compte le plus dans la culture japonaise est le mode et la manière et non la fin, le but à atteindre ; le processus et la présentation et non le contenu. (P.24)
La fascination pour la mort pouvant aller jusqu'au suicide est une tradition solidement ancrée dans la culture japonaise. Si le sacrifice collectif pour la patrie n'est plus guère d’actualité, le (suicide) est encore bien présent dans l'imaginaire contemporain. Il parcourt le roman et le cinéma et, mis en scène de manière spectaculaire, il fait toujours les délices des spectateurs de kabuki.
Japon. Aucun pays au monde ne me paraît l'objet d'une projection aussi massive d'imaginaire. Aucun pays ne suscite à ce point des fantasmes et des images clivées qui oscillent entre le paradis et l'enfer. Le paradis : la fascination pour une japonité mystique et mystérieuse qui serait l'autre absolu de《l'Occident》. L'enfer : la construction cette fois d'un Japon-repoussoir, le cauchemar de villes fourmilières dans lesquelles les êtres humains seraient devenus des robots.
"Prologue"