L'Autre Rimbaud

Quel est l'intérêt de ce livre et des recherches menées par l'auteur ? Il a voulu sortir du néant Frédéric, ce frère d'Arthur Rimbaud, poète bien connu, et a fait de nombreuses recherches.
Frédéric a été carrément gommé, déclaré par sa mère idiot et parfaitement nul. Sur la couverture du livre où apparaît la photo d'Arthur lors de sa communion, son frère Frédéric a été effacé. Dans leur enfance Frédéric, l'aîné, et Arthur étaient très proches, et pleins de connivence. Arthur était brillant au collège, ce qui n'était pas le cas de Frédéric, loin de là. La mère d'Arthur, riche, mariée à un militaire de carrière a été abandonnée par son mari et a dû élever seule ses 4 enfants. Cette position de femme seule, devant gérer ses nombreux biens et l'éducation de ses enfants, pourrait expliquer - peut-être - son intransigeance, sa dureté mais certainement pas sa méchanceté vis-à-vis de Frédéric. Et tout au long de sa vie Frédéric a subi cette méchanceté. La mère n'en avait que pour Arthur à qui elle passait tout. Et pourtant Arthur n'est pas ce personnage dont nous a laissé la postérité. Son image a été embellie par sa dernière soeur Isabelle et son mari.
Pas désagréable et facile à lire ce livre n'apporte pas grand-chose dans notre vie, je trouve.

✨ de la fusion à la fission, de la fratrie à l'effacement, et - ponctuant cette terrible trajectoire - le dénigrement, le reniement et la dépossession.

✨ le journaliste David le Bailly, avec une écriture efficace, mène l'enquête sur Frédéric Rimbaud, le frère inconnu d'Arthur, et nous plonge dans le système clanique et dysfonctionnel de la famille toute entière, et plus particulièrement de ses femmes - autoritaires et manipulatrices.

✨ Alternant habilement la biographie romancée et l'histoire de ses recherches, l'auteur nous donne à voir :
➿ un fantôme, Frédéric, dont le crime originel a été de rendre hommage à son père, puis de vouloir s'affranchir du clan
➿les petits arrangements mesquins d'une famille bourgeoise, et la vie des petites gens
➿ un point de bascule, la mort de la jeune Vitalie, qui éteint la flamboyance d'Arthur et fait passer la famille « du verbe au silence ».
✨ A travers le destin de Frédéric Rimbaud, mais aussi à travers ses propres questions, David le Bailly nous interroge sur les non-dits et les mensonges familiaux, sur leurs conséquences, sur ce qui gêne et que nous voulons cacher, taire, effacer.

✨ Au fil des pages et des anecdotes, je me suis attachée au fantôme de Frédéric Rimbaud - ne serait-ce que parce qu'il rend aussi à Arthur sa part d'humanité, au-delà du mythe.

Arthur Rimbaud enflamme toujours autant le monde littéraire, et même lorsqu'il n'est pas à proprement parlé l'objet même du livre, il n'en reste pas moins le fantôme envahissant caché derrière les lignes !
L'auteur des vies minuscules a un jour écrit sur le jeune Arthur, de son propre aveu, il aurait aimé écrire sur son frère Frédéric « moins fortuné intellectuellement » mais il ne le fit pas !
Le conducteur d'omnibus n'eut pas son heure de gloire chez Michon et heureusement pour nous, lecteurs friands de vies minuscules que David le Bailly eut l'idée de le sortir de l'oubli pour nous conter l'histoire de celui qui fut même radié de la photo de famille bien connue.
Parler de Frédéric c'est remonter le fil de la famille Rimbaud, c'est affronter le fantôme de la mère : Vitalie, dure, inflexible, injuste, méchante par-delà la mort.
Mais c'est aussi composer avec la soeur, Isabelle et son époux le sculpteur, journaliste, artiste sans gloire qui trouva un exutoire dans l'oeuvre d'Arthur R. et surtout dans l'administration de ces quelques biens et feuilles ! Un Arthur qu'il ne connut même pas mais assez parlé de ce Rimbaud !!
Car si tout et son contraire a été dit sur le jeune prodige, ange déchu, beauté du diable, roué et vil.
A travers l'histoire de Frédéric, le poète transpire encore : ses tiraillements, ses revirements, ses traitrises et ses reniements. On y entrevoit cependant leur enfance complice, leur jeunesse foutraque alliée contre cette mère si distante, et si la ressemblance physique était proche, la sensibilité était autre. Frédéric le terrien, l'homme sacrifié dans l'ombre de ce frère si envahissant, à qui rien ne fut accordé pas même le droit de se marier dignement, ni d'élever ses enfants comme il l'aurait souhaité.

Un livre-enquête stupéfiant sur le Rimbaud sacrifié, sur une vie minuscule.
Le livre de la rentrée littéraire qui ravira certainement les férues de poésie rimbaldienne !

« Ils font mine d'être heureux de le revoir mais il n'est pas dupe. Il sait que pour eux, il est le raté, le déclassé, celui qui s'est compromis par un mauvais mariage. Déjà à l'époque, il était le cancre, le benêt. le premier à être puni, à prendre pour les autres. »

Peut-être la photo en couverture vous dit-elle quelque chose. Il s'agit de l'un des clichés les plus célèbres du poète, alors communiant. Cependant, sûrement ignorez-vous un détail. A l'origine se trouvait à ses côtés son frère, Frédéric Rimbaud, ensuite effacé par ses proches. Dans ce roman, David le Bailly revient sur la famille dysfonctionnelle d'Arthur Rimbaud, en particulier sur ce frère tu par l'histoire et mis au ban par sa mère, sa soeur et même son frère. Après une longue période de documentation, il dresse un portrait tout en délicatesse de cet homme esseulé et de sa relation avec son frère.

Si enfants, Frédéric et Arthur étaient inséparables, le temps a eu raison de leur relation. Chacun prend un chemin très différent à l'âge adulte. L'un, se rend à Paris pour devenir poète et connaître une vie de débauche et l'autre, reste auprès d'une mère marâtre qu'il ne parvient jamais à satisfaire. Lorsqu'Arthur se rend en Abyssinie et reprend sa place de fils prodigue, Frédéric devient alors définitivement le « mauvais Rimbaud » et se voit refuser de se marier.

Ce livre, entre fiction et réalité, alterne les chapitres biographiques et journalistiques. Ces derniers nous éclairent sur les modalités de l'enquête que David le Bailly a menée des mois durant. Il explique l'origine de ce livre et d'où vient l'envie de l'écrire. On y trouve aussi des réflexions plus universelles sur les relations familiales, la réussite, la défaite et le droit de s'affranchir des conventions. Ce roman apparaît comme la renaissance de Frédéric Rimbaud, enfin dans la lumière après des décennies d'oubli.

Enfin, le titre « L'Autre Rimbaud » prend un autre sens. Il ne désigne pas seulement Frédéric Rimbaud, mais aussi Arthur Rimbaud, le marchand, le négociant, celui que la légende a moins mis en exergue. Disparu « le voyant », le vagabond mondialement connu : ce livre donne à voir ce qu'a été la deuxième partie de la vie du poète, devenu avare et cynique, bien loin des fantaisies et des excès de sa jeunesse.

sujet prometteur que je vais découvrir