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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un coup de coeur que cette enquête minutieuse de l'auteur concernant le grand sacrifié de la tribu Rimbaud : le grand frère du poète !
Mais quelle violence insensée contenue dans cette famille, et dans cette figure maternelle, ne supportant pas les hommes ; les combattant ; ses frères, comme son mari militaire, comme ses fils… Cet aîné a eu l'extrême mauvaise idée de se révolter contre Vitalie, en continuant de voir en cachette, son père, de se battre pour la femme qu'il aimait, et qu'il voulait épouser !

Ce « soit-disant raté » aura eu le courage de se révolter contre cette mère abusive et terrorisante ! Frédéric paiera sa « résistance » bien cher !! Et nous, lecteurs, nous nous attachons d'autant plus à cet homme ; nous aimerions tant que le destin change, se renverse à son avantage, enfin… !

L'auteur , un jour, en entendant Pierre Michon parler de ce frère du poète, ignoré de tous, rayé de la terre, sur lequel il souhaitait écrire (et finalement , n'y ayant pas réussi)…lui est venue l'envie de s'atteler à ce projet difficile. Cela lui a donné l'élan et l'envie pour entamer ce projet et cette enquête… Nous lui en sommes reconnaissants, car David le Bailly nous offre un récit poignant, doublement , car en sus de la narration sur l'existence massacrée , tuée et tue de Frédéric (qui portait par malchance, le prénom paternel !), il nous fait partager la progression de ses démarches auprès de possibles porteurs de mémoires (dans les descendants), ainsi que les résonances induites dans son propre parcours de fils auprès d'une mère, peu amène et aussi « despotique », autoritaire que la marâtre des frères Rimbaud.

J'apprends avec plaisir qu'un auteur que j'estime beaucoup n'aura pas « crié avec les loups » et contribué à ces mensonges ; il s'agit d'André Suarès…Ce pourquoi, je transcris l'extrait suivant qui en dit long sur la fabrication de la légende construite artificiellement autour du grand « Arthur Rimbaud »…qui en dit long aussi sur tous les comportements « pas très catholiques » des héritiers spirituels ( et financiers !!) des écrivains et artistes , après leur mort…!

« En exergue

Pourquoi n'y a--t-il jamais un mot du frère Frédéric qui, à un an près, est du même âge que Rimbaud ? Ce frère passe pour avoir été un coureur de femmes, un homme qui aime la vie, un mauvais sujet comme on dit entre bigotes. de lui, je ne sais rien du tout. Peut-être était-il seulement une tête légère, un irrégulier, un outlaw de province, après tout, une ébauche ridicule de son frère. Mais il a vécu. Il est sans doute mort. Puisque l'on parle de la sainte mère et des saintes soeurs, il faut parler du frère mauvais sujet: il a beaucoup d'intérêt pour nous s'il n'en a pas pour la famille. --André Suarès »

De ce texte, le cadet, Arthur, ne ressort pas grandi, bien au contraire !

« Ou peut-être ont-ils peur de ce qu'il peut raconter, de ce qu'il sait, et il en sait beaucoup, bien plus qu'eux. A Arthur, il a été uni comme personne ne le fut par la suite, uni comme on l'est à un jumeau. Elevés ensemble, partageant la même chambre, les mêmes jeux, les mêmes punitions, les mêmes révoltes contre la mère. Arthur, sûr de lui, secret, méfiant; Frédéric, affable, franc, dévoué. Longtemps, le second fut le seul public du premier (...) « (p. 21)

Une lecture « secouante » ,fort instructive à tous points de vue…J'ai fortement apprécié le style et la très forte empathie de David le Bailly pour son personnage, Frédéric…à qui il aura donné , grâce à ce livre, pour une fois, une place de choix,et « la parole »…enfin !!

Un supplément de compliment pour la couverture fort réussie, très largement représentative, symbolique de cette histoire tragique , ainsi que pour les choix toujours passionnants de cette maison d'édition (qui porte bien son nom), « L'Iconoclaste » !!
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"L'autre Rimbaud" de David le Bailly est arrivé entre mes mains lors d'un comité de lecture à la bibliothèque de ma ville, grâce à Anne, bibliothécaire, qui le présentait.
Ce livre avait tout pour me plaire car, d'abord, j'aime Arthur Rimbaud depuis le collège, et, ensuite, je suis ardennaise comme lui.
Mais si je savais qu'il avait deux soeurs, Vitalie, la plus gentille qui meurt jeune et Isabelle, j'ignorais qu'il avait un frère. Et pour cause...
L'auteur, avec les maigres renseignements qu'il a pu récolter grâce à un travail de fourmi dont il faut le féliciter, a essayé de rendre justice à Frédéric.
Ce frère mal-aimé, le « sans-voix », « dénigré », « déchu » car devenu un conducteur d'omnibus à Attigny, donc un domestique, considéré comme « traître » à sa famille puisqu'il a choisi de se marier contre l'avis de sa mère, « renié », « dépossédé » puisqu'il ne touchera jamais un sou de ce que rapporteront les oeuvres d'Arthur, et enfin « effacé » puisqu'il a disparu de leur photo de communion.
Incroyable ! La férocité de sa mère à son égard est sans borne. Sa soeur Isabelle ne vaut pas mieux. Et Arthur l'ignore et le méprise.
Pourtant leur jeunesse avait été joyeuse, avec un belle complicité, une cohésion face à une mère inflexible.
Tout avait changé avec le départ d'Arthur. le poète était mort, le négociant était né. Ce n'était plus le même homme. Pour obtenir ce qu'il veut de la mère, il abonde dans son sens quand elle dévalorise Frédéric.
La mère est devenue une mégère, incapable d'amour sauf pour Arthur, une avare toujours sur le dos de ses fermiers, une paranoïaque se méfiant de tous ses voisins, une bigote d'un méchanceté sans limite.
Aux filles de Frédéric, Emilie et Nelly, qui souhaitaient la rencontrer, elle a fait dire : « Je les verrai aux pieds de Dieu, si elles en sont dignes ! ». C'est la charité chrétienne selon madame mère.
Frédéric meurt en 1911.
Triste, très triste cette histoire, mais nécessaire.
Je remercie l'auteur de s'être penché avec art sur cette «vie ratée ».

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Le mythe construit par Isabelle, la soeur d'Arthur Rimbaud, est depuis longtemps tombé.
La bigoterie et autres fadaises n'ont pas résisté.
Il demeurait néanmoins une inconnue : qui était ce frère Frédéric dont même le visage fut banni de la première photo connue du poète.

Banni de la représentation, banni de la famille pour un mariage socialement intolérable, banni de l'héritage familial, banni des droits d'auteur.

Juste le droit de se taire, d'accepter d'être dupe et d'être à jamais, grâce aux mots répétés (y compris par de grands auteurs), jamais vérifiés, l'idiot et l'incapable de la famille.
Déchéance sociale, domesticité, l'homme n'est intéressant pour personne.

C'était sans compter la rencontre que fit David le Bailly et l'éveil de son intérêt pour cet ectoplasme que tous ignoraient.
Lectures, recherches, entretiens, imprégnations, … et « L'Autre Rimbaud » apparut.

Arthur est omniprésent lors de la lecture. La relation entre les frères se dévoile.
Le rôle choquant de la mère et de son prolongement dans sa fille Isabelle sont décrits dans toute leur intransigeance et cruauté, en grandes catholiques qu'elles sont.
Isabelle, mariée par dépit à Paterne Berrichon à qui l'on doit une description de la naissance d'Arthur on ne peut plus abracadabrantesque.
Esprits d'une grande humanité et d'une belle empathie qui regrettent le manque de lecture à cause des procès de l'époque (Affaire Dreyfus) en lisant « La Libre Parole », le journal antisémite d'Edouard Drumont!
Bien des phrases et des actes font dresser les cheveux sur la tête.

Le bien-fondé du livre est de « replacer » les choses et de redonner un peu d'humanité et de vie à Frédéric Rimbaud, celui qui eut tort aux yeux de sa famille et par conséquent tort aux yeux des admirateurs du poète dont il fut dit qu'il serait « un génie du bien ou un génie du mal ».

Famille où la cheffe du clan domina et créa ainsi des êtres perclus de doutes et/ou de certitudes malvenues, de souffrances, de domination déplacée, un cas pour la psychanalyse.

L'auteur construit le roman à partir de ses recherches et de la lecture de la correspondance familiale.
Chaque chapitre est suivi, en italique, de considérations bien réelles qui permettent de nuancer les parties romanesques.

Un livre édifiant qui raconte, dans un style simple et clair, une vie qui a droit, comme toute vie, à ne pas se résumer à une vengeance entretenue par la famille.
Le portrait falsifié reprend forme et les visages recomposés existent au-delà de la gloire littéraire du seul Arthur.

Un grand merci à Babelio et aux Éditions L'Iconoclaste pour cette lecture passionnante.



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Je remercie Babelio et les éditions l'Iconoclaste de m'avoir adressé cet ouvrage.
 Avant de parler du livre de David le Bailly « L'autre Rimbaud », il me semble opportun de donner mon sentiment au sujet d'une pétition qui vient d'être lancée demandant l'entrée conjointe d'Athur Rimbaud et de Paul Verlaine au Panthéon.
 Les pétitionnaires n'énoncent rien moins que quatre raisons que je résume ci-dessous :
1 — Littéraire : pour l'influence que ces deux poètes de génie ont eue sur notre histoire littéraire.
2 — Politique : C'est à Verlaine que l'on doit le vers célèbre annonçant le débarquement en 1944 :
« Les sanglots longs des violons de l'automne
Bercent mon coeur d'une langueur monotone »
et c'est à Rimbaud qu'a été emprunté « Changer la vie », le slogan de la gauche des années 1970.
3 — Morale : car les tombes des deux poètes sont laissées à l'abandon sous la poussière.
4 — Judiciaire : en 1873, Paul Verlaine a été condamné à deux ans de prison pour avoir tiré deux coups de revolver sur Rimbaud. Ce dernier, dont la blessure était légère a ensuite retiré sa plainte. Verlaine est pourtant resté 555 jours en prison. Les auteurs de la pétition arguent aussi du fait que la police de Paris aurait favorisé l'aggravation de la peine en dénonçant « ce drôle de ménage ».
 En conclusion les pétitionnaires considèrent que l'entrée au Panthéon de Rimbaud et Verlaine serait un geste d'une portée symbolique considérable. Suivent les signatures de plusieurs anciens ministres de la culture ainsi que celle de la ministre actuelle Roselyne Bachelot.
 On peut admettre qu'il s'agit là de deux poètes majeurs qui méritent une certaine reconnaissance du monde littéraire, mais de là à en faire des héros de la patrie au motif que l'un aurait été condamné trop sévèrement pour une tentative de meurtre et que tous deux reposent dans des tombes mal entretenues, c'est un peu beaucoup. Un autre motif est évoqué en tête de la pétition et semble être un des éléments principaux motivant la demande :
« Ils sont aussi deux symboles de la diversité. Ils durent endurer “l'homophobie” implacable de leur époque. Ils sont les Oscar Wilde français. »
 L'homosexualité des deux poètes serait-elle un atout supplémentaire pour leur Panthéonisation ? Ce mélange entre le mérite littéraire et la volonté de défendre la diversité ne me semble pas pertinent. Nos deux poètes maudits ne sont pas forcément des modèles d'humanité, l'un était un alcoolique invétéré, violent (il battait sa femme), il n'a pas hésité à tirer deux balles de revolver sur son ami au terme d'une querelle d'amoureux, il a aussi tenté d'étrangler sa propre mère. Verlaine était en totale rupture avec la morale convenue de son temps. On pourrait aussi reproché à Rimbaud d'avoir souhaité s'enrichir en Afrique en profitant de l'ambiance esclavagiste, sans s'en émouvoir, et d'avoir aussi mené à but lucratif une entreprise de trafic d'armes. Car si le poète doit être un « voyant » (1) comme le déclare lui-même Rimbaud, cela ne l'empêche pas pour autant de « fermer les yeux » quand cela l'arrange. Nul n'est parfait, et le génie poétique n'est finalement pas incompatible avec la délinquance (François Villon est le premier des poètes maudits).
 La sincérité de la passion rimbaldienne des pétitionnaires n'est pas à remettre en cause et leur démarche a le mérite de donner un nouveau coup de projecteur sur ces deux immenses poètes dont j'apprécie l'oeuvre (avec une préférence pour Verlaine), mais j'espère, au cas où la pétition n'aboutirait pas, que pour le moins, ils constitueront une cagnotte pour l'entretien des tombes. Un petit geste d'attention à la mémoire des poètes qui eux-mêmes auraient sans doute refusé la Panthéonisation. Doit-on rappeler que Rimbaud, ancien communard, anticlérical, pourfendeur de la bourgeoisie bien-pensante, antimilitariste, épris de liberté jusqu'à prôner l'anarchiste, à remis en question tous les codes académiques ? Je doute qu'il se sentirait à l'aise dans ce temple du conformisme. Et comme le dit très justement l'écrivain et blogueur Laurent Sagalovitsch : « L'homosexualité a toute sa place au Panthéon. Et s'il fallait en choisir un qui la représente, qui d'autre que Marcel Proust dont le judaïsme de naissance appuierait encore un peu plus la diversité de l'institution ? N'incarne-t-il pas à lui tout seul la grandeur immarcescible du génie français ? Et à n'en pas douter, lui, le chroniqueur sublime des mondanités parisiennes, envierait pareil hommage. »
Revenons maintenant au livre de David le Bailly.
 Le nom d'Arthur Rimbaud évoque le visage angélique d'un adolescent au génie poétique précoce et trop tôt disparu. Pour beaucoup il évoque aussi le souvenir de poèmes sublimes, riches d'innovations comme « Le dormeur du val », « Le bateau ivre » ou « Les voyelles ». On s'imagine un jeune homme romantique fragile et sensible, séduit par la notoriété naissante de Paul Verlaine dont il deviendra le compagnon de vie et d'errance pendant trois courtes années tous deux à la recherche d'un idéal poétique. Dans mon imaginaire Rimbaud était de la même veine qu'un François Villon, lequel était assimilé à un poète mauvais garçon, délinquant, aux idées vagabondes peu organisées, exprimant avec débordement une poésie instinctive. La précocité de Rimbaud, la brièveté de sa vie et son non-conformisme en faisait une étoile filante aux origines aussi incertaines que sa destination. En réalité les poèmes de Rimbaud, en particulier « Le bateau ivre », montrent une érudition au service d'un lyrisme et d'une pensée structurée. Son vocabulaire extrêmement riche emprunte au lyrisme des poètes grecs, il est non-croyant, mais la bible l'inspire, il rehausse de néologismes et de latinismes une palette sémantique étendue acquise par d'immenses lectures.
 Mais derrière ces impressions ou ces clichés rebattus n'y a-t-il pas une autre réalité ? de quel milieu est issu Arthur Rimbaud ? Quelles relations entretenait-il avec sa famille ? J'ai longtemps cru que Rimbaud était mort très jeune, disons de tuberculose à 25 ans comme beaucoup de génies précoces, dans le respect d'une tradition tenace. La réalité est encore plus tragique. Je n'avais jamais été au-delà de la lecture de quelques-uns de ses poèmes, sans me documenter sur le détail de sa vie qui ne fut pas si courte que cela puisqu'il est mort à 37 ans d'un cancer généralisé après avoir subi l'amputation d'une jambe. le livre de David le Bailly m'a éclairé sur certains aspects méconnus de la personnalité de « L'homme aux semelles de vent », mais aussi sur ses origines et son entourage en particulier sur sa mère et son frère.
 D'un point de vue littéraire il est vrai que l'on peut dire que Rimbaud est mort à 20 ans, c'est à peu près l'âge où il a subitement décidé de renoncer à écrire, sans que l'on sache réellement pourquoi. Comme s'il avait épuisé toutes les ressources que pouvait lui procurer la littérature pour choisir une autre voie, la liberté totale, l'aventure, les voyages, le renoncement à toute vie conventionnelle.
 Un jour, le journaliste et écrivain David le Bailly, entend parler à la radio de Frédéric Rimbaud, le frère du poète. Sa curiosité est mise en éveil par le mystère qui semble planer autour de sa vie. David le Bailly décéle intuitivement qu'il y a derrière ce frère un secret de famille bien gardé. Frédéric aurait été écarté de la mémoire familiale afin de ne pas ternir l'image du grand poète. Qu'en est-il exactement se demande David le Bailly, il décide de mener sa propre enquête.
 Frédéric et Arthur ont reçu la même éducation jusqu'au bac auxquels ils ont tous les deux renoncé trop pressés de prendre leur vie en main. Arthur est brillant, il rafle tous les prix et prend conscience dès l'âge de 15 ans de son génie poétique. Frédéric reste un élève moyen, mais rêve d'une carrière d'officier comme son père. Ce dernier a malheureusement déserté le milieu familial effrayé par le caractère acariâtre et possessif de sa femme Vitalie avec laquelle il ne parvient pas à s'entendre.
 Dans l'enfance, les deux frères sont inséparables et complices. Mais Arthur s'émancipe très vite et part à Paris rejoindre un cercle de poètes qui l'ont complimenté sur ces oeuvres. Dès lors Frédéric resté à la ferme familiale pour aider sa mère va devenir le souffre-douleur sur lequel sa mère cherchera à se venger de son mari qui selon elle lui aurait gâché la vie. À l'inverse Arthur sera célébré, adulé, admiré malgré ses frasques. C'est le point de départ d'une injustice qui va générer des péripéties dramatiques dignes d'un roman de Zola. L'auteur nous livre un texte à la frontière entre le roman et l'enquête journalistique. Moi qui n'aime pas trop les biographies romancées j'ai trouvé là un bon compromis où les séquences fictionnelles ne sont là que pour assurer une certaine continuité du récit sans trahir la vérité historique. le récit est entrecoupé de confidences de l'auteur qui nous dévoile des détails sur la manière dont il a mené son enquête. Cela donne un livre passionnant que j'ai dévoré en quelques heures avec l'envie d'en savoir encore plus sur tous les acteurs de cette incroyable histoire. On est littéralement happé, immergé dans ce monde paysan des Ardennes de cette fin du XIXe siècle.
 La mère de Rimbaud qui impose sa volonté avec une rare pugnacité est un personnage étonnant à la rancoeur tenace. Son intransigeance et son manque d'empathie sont à l'origine du malheur qui a frappé tous les membres de sa famille.
 C'est l'histoire de la relation entre deux frères, c'est aussi l'histoire d'un secret de famille, une histoire d'injustice et de vies amputées par l'égoïsme et la cupidité d'un clan. Cette enquête centrée sur Frédéric, « L'autre Rimbaud », apporte aussi, en creux, un éclairage étonnant sur la personnalité de son frère Arthur qui après avoir cessé d'écrire à 20 ans est devenu affairiste, négociant, désabusé. On mesure la perte de ses illusions en lisant ses propos tenus dans une lettre adressée aux siens en 1886 : « Enfin, l'homme compte passer les trois quarts de sa vie à souffrir pour se reposer le quatrième quart, et, le plus souvent, il crève sans plus savoir où il en est de son plan. »
(1) Dans une lettre du 15 mai 1871 à Paul Demeny, Rimbaud révèle ce qui, selon lui, caractérise le poète : « Je dis qu'il faut être voyant, se faire voyant. le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens ».
Bibliographie :
« L'autre Rimbaud », David le Bailly, l'iconoclaste (2020), 371 pages.
« Rimbaudoeuvres complètes », classiques modernes, La Pochotèque (199), 1039 pages.
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J'ai passé un excellent moment à lire L'Autre Rimbaud. L'Autre... celui qui n'avait pas l'intelligence de son frère; celui qui n'avait pas l'amour de sa mère; celui qui a voulu vivre sa vie comme il l'entendait et sortir du carcan familial.
L'Autre : Frédéric Rimbaud, frère aîné du poète, fils déchu, totalement évincé de la succession des oeuvres de son frère Arthur, qui n'a même pas eu sa place dans le caveau familial. Pour dire!
David le Bailly est donc parti sur les traces de ce frère, cet homme qui semble être le "raté" de la famille. Dans une enquête minutieuse qu'il nous dévoile et que nous suivons avec autant d'intérêt que la vie de cette famille hors du commun, nous comprenons la difficulté de sa tâche car Frédéric semble oublié de tous, même de ses descendants. Même les biographes du poète l'ont mis de côté.
La mère: Vitalie Rimbaud, née Cuif, véritable marâtre sous la plume de David le Bailly. Acariâtre, cupide, calculatrice, manipulatrice. MAIS... mais mais mais... comment ne pas oublier que cette femme a été abandonnée par son mari, la laissant seule avec 4 enfants, en plein 19ème siècle? Qu'elle doit affronter le décès prématuré d'une de ses filles? Que parmi ses garçons il y a tout de même Arthur Rimbaud, génie bien difficile à canaliser?
Alors ceci ne pardonne pas cela, toutefois c'est un aspect à prendre en compte avant de faire le procès de cette femme qui a certainement dû se forger une carapace à une époque où vivre seule avec ses enfants n'était pas forcément accepté par la société.
Que dire sur Frédéric? Un bon gars qui a toujours voulu bien faire, être heureux et rendre heureux, mais n'y a jamais vraiment réussi. Un personnage pour qui j'ai ressenti de l'affection contrairement à sa soeur Isabelle. Il apparaît bien plus sympathique que son frère Arthur dont nous suivons en filigrane la carrière car oui, il ne faut pas l'oublier, ce n'est pas Arthur qui est au centre des préoccupations de l'auteur, mais bien Frédéric. Et ça lui fait honneur, à cet homme rejeté par tous ses proches.
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On pensait avoir tout lu et tout connaître sur Rimbaud..
Et bien non grâce a David le bailly nous découvrons une face cachée une part d ombre sur cette célèbre photographie.
L histoire du frère de ... persécuté par sa famille toute sa famille.
La plume est belle et éclairante sur le poète et son microcosme.
Un mélange d enquête de roman et d interventions personnelles de l auteur .
Plaisir de lecture 9/10
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Un remarquable travail de recherche et de documentation pour une biographie reconstituée très intéressante et magnifiquement écrite.

Jusqu'à cette lecture, je ne connaissais rien de l'histoire familiale d'Arthur Rimbaud, celui qui a capté la lumière et les honneurs.
L'histoire est plus complexe et moins élégante que celle que sa mère et sa soeur ont façonnée au fil des années.
Le récit reconstitué par David le Bailly rend hommage à son frère Frédéric, mal aimé, mal traité, déchu de ses droits et raconte la férocité d'une mère qui n'hésitera pas transformer la réalité pour créer le mythe Arthur Rimbaud au détriment de son fils ainé - frère d'Arthur- qu'elle juge sévèrement : un imbécile, un bon à rien qui fait honte à la famille.
Qu'a t-il fait ce fils ainé pour être ainsi traité ? trop ressembler à son père qui a fui la mère execrable ?, son manque d'ambition alors que sa mère est propriétaire de nombreuses terres dans le village depuis plusieurs générations ?
Arthur Rimbaud ne sort pas grandi de ce récit : on découvre un homme qui a trahi son frère, et a pris soin d'être systématiquement d'accord avec sa mère pour obtenir de quoi vivre.
Une enquête fascinante !

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Et si l'on oubliait quelques instants le fascinant Arthur Rimbaud pour se tourner vers son frère aîné, Frédéric, dissimulé par le halo de lumière émanant de son cadet ?

C'est le pari plus que réussi que s'est lancé David le Bailly dans son roman-enquête L'Autre Rimbaud. de traces de Frédéric, il n'en reste presque plus, ni dans l'Histoire de la littérature, ni dans les biographies du poète, ni même dans le récit familial des descendants.
Pourtant, enfants, Frédéric et Arthur étaient inséparables, traînant ensemble leur ennui à Charleville-Mézières, partageant leurs amis et leurs ressentiments contre leur mère. L'un est devenu un poète, un aventurier, un trafiquant d'armes, une lumière brillant inlassablement dans l'Histoire de la littérature. L'autre est devenu un époux, un père, un conducteur de calèche et un homme banni par une famille toute entière.

Comment l'aîné du poète a-t-il pu à ce point disparaître du récit de la vie d'Arthur au profit de la figure omniprésente de la mère Rimb', comme l'appelait le poète, et d'Isabelle, la cadette bigote ?
C'est tout d'abord sa silhouette sur une photographie du poète enfant que l'on efface. C'est son nom que l'on oublie parmi les invités à l'enterrement du poète. Puis, c'est lui-même et ses descendants que l'on spolie des droits sur l'oeuvre d'Arthur. Et même après sa mort, la conspiration familiale pour ostraciser Frédéric se poursuit.

Alternant l'enquête présente et le récit de la vie de l'aîné Rimbaud, David le Bailly entraîne le lecteur dans une histoire méconnue et passionnante. On croyait en savoir beaucoup sur le poète, on découvre une part d'ombre sur laquelle le journaliste lève le voile. Au détour des mésaventures de Frédéric, c'est l'histoire de toutes les familles sillonnées de secrets, y compris la sienne, que le journaliste dissèque d'une plume belle et vivante.

L'Autre Rimbaud se lit d'une traite. C'est beau, sensible, intelligent, passionnant, un coup de coeur.

Merci Babelio et les Editions L'Iconoclaste.
Lien : http://lecottageauxlivres.ha..
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Le Rimbaud de David le Bailly, c'est l'autre, justement, celui qui n'a pas su (ou voulu) répondre aux attentes de son milieu social, milieu familial, devrais-je dire ! Rien de bien nouveau, me semble t-il, dans une époque où, dans une certaine caste sociale il était de bon ton d'avoir un statut qui prête à considération !De plus, quand on est le frère d'un poète très tôt considéré comme talentueux, seul enfant ayant droit à l'attention maternelle, si tant est qu'elle en fut capable, la Folcoche de la famille Rimbaud...
Roman ou enquête, ou besoin de rétablir une juste réalité ? Quelle que soit cette étude, elle donne un nouvel éclairage à un poète qui a accompagné les lointaines années de mon adolescence, j'en remercie- et félicite- l'auteur.
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Qui ne connaît pas Arthur Rimbaud le poète, son dormeur du val, une saison en enfer, le bateau ivre, ou ses frasques avec Paul Verlaine.
On peut trouver tout ce qu'on veut sur Arthur et son oeuvre.
En revanche, qui a déjà entendu parler de son frère Frédéric ? Personne !
Et c'est bien ce que nous propose l'auteur, de le réhabiliter, lui ce frère maudit qu'on a purement et simplement effacé de la photo aux côtés d'Arthur. Lui, qui toute sa vie s'est vu affublé d'idiot, de petit, de misérable, ne valant rien ou franchement pas grand chose à côté d'Arthur. Avec le soutien de sa fille Isabelle, Il aura fallu toute la force, la méchanceté, l'âpreté et la pingrerie de Madame sa mère envers ce pauvre Frédéric pour être évincé.
Il a essayé de se battre de toute ses forces pourtant. Il s'est battu pour épouser Blanche en allant devant les tribunaux à 3 reprises, il l'a pourtant aimé ce frère génial qui l'a pourtant renié également. J'ai vraiment aimé les parties plus actuelles dans lesquelles l'auteur explique son travail de recherche, ses rencontres avec les descendants de Frédéric Rimbaud. Bravo pour le travail ! Et Encore une fois bravo aux éditions iconoclaste !
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