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Critique de tamara29


Je remercie Babelio et les éditions du Point pour le roman « Les sacrifiés » de Sylvie le Bihan.
En Andalousie, 1925, Juan Ortega, jeune gitan de 15 ans, devient le cuisinier attitré d'Ignacio Sánchez Meijías, célèbre torero, et également féru de poésie. le jeune homme fait alors la rencontre de la maitresse de ce dernier, Encarnacion Lopez Julvez, dite La Argentina, une danseuse de Flamenco. Il en tombe instantanément amoureux. Grâce à eux, il va découvrir l'effervescence artistique de cette époque-là, les soirées avec certains intellectuels et écrivains de la Génération de 27, comme Dali, Picasso, Buñuel et surtout Federico Garcia Lorca, l'ami du couple.

A travers les yeux de Juanito, c'est non seulement l'univers culturel mais l'histoire de l'Espagne à une période charnière qui nous est racontée : l'insouciance des années folles qui va être peu à peu balayée par l'arrivée de Franco et la montée du fascisme, la terrible guerre civile qui fera rage de 1936 à 1939, suivie par la non moins terrible seconde guerre mondiale.
Indéniablement, l'auteure s'est bien documentée pour évoquer cette longue période. On croise les artistes les plus célèbres, elle nous fait partager la culture hispanique (danse, tauromachie, littérature, peinture et cuisine) mais aussi évoque les faits sociétaux comme les clivages entre certaines communautés (certaines conservatrices, très croyantes…). Elle glisse certains noms des acteurs les plus importants de la seconde guerre mondiale (Jean Moulin notamment). Durant cette lecture, j'ai appris beaucoup d'anecdotes ou faits historiques concernant la guerre civile espagnole ou encore sur les soldats de la Nueve.

Malgré tout, je n'ai pas réussi à me plonger dans ce roman avec enthousiasme. Cela tient au personnage principal Juan que j'ai trouvé insipide et à force agaçant. A n'être juste que l'ombre perpétuelle des personnages qu'il suit. D'abord d'Ignacio (alors qu'il n'aime pas la tauromachie) ; ensuite et surtout d'Encarnación. A se consumer d'amour pour elle, sans pouvoir le lui révéler. On a l'impression qu'il passe des années à ne faire que ça : attendre. Regarder les autres vivre (il observe les soirées artistiques sans vraiment y participer). Regarder les autres combattre durant la guerre alors que lui n'espère qu'un battement de cils de la belle danseuse. Attendre et vivre par procuration.
Même alors que ses compatriotes luttent contre le franquisme, que des étrangers viennent s'ajouter au rang républicain, il reste très longtemps à côté, en s'enfuyant notamment à Paris à la mort de Lorca. Il aura l'occasion d'ouvrir un restaurant sur Paris, rue Saint-Augustin, et je serais étonnée d'apprendre par la suite que la cuisine n'est pas une passion pour lui.
En plus d'être un amoureux qui ne pense qu'à la femme aimée, qu'à cet amour impossible qui à force est lassant, ce personnage a manqué réellement de densité et d'intérêt à mes yeux.
C'est ce qui explique que j'ai eu une bonne partie du roman des difficultés à suivre cette histoire avec lui. J'éprouvais plus de bienveillance pour ce vieil homme qu'il était devenu dans les années 2000 et qu'on retrouvait de temps à autre, lors de flashbacks.

Par ailleurs, au premier tiers du roman, je n'ai pas ressenti l'atmosphère artistique de l'époque (mais peut-être cette impression a-t-elle été biaisé par mon irritation vis-à-vis de Juan). Que ce soient les voyages à New York, Paris, avec le torero, les références aux artistes espagnols, j'ai trouvé que cela manquait de souffle, de vie. Comme si je voyais le travail de l'auteure avec sa liste de noms et de faits qu'il fallait évoquer ; cochés au fur et à mesure de leur insertion dans le roman mais qu'ils manquaient d'une sensation 3D, d'émotion vibrante.

Un éveil d'intérêt a eu lieu par la présence de personnages plus captivants comme Federico Garcia Lorca, et notamment les quelques jours avant sa mort poignante, exécutée par la milice franquiste, ou encore lors des évènements relatifs à la seconde guerre mondiale.

Raconter cette période marquante pour les espagnols et l'Europe toute entière, à travers le trio de personnages réels et célèbres, Ignacio, Encarnacion et Federico était une idée assez intéressante. D'autant que je ne connaissais pas du tout les deux premiers et que le style de Sylvie le Bihan est assez plaisant.
Malheureusement il m'a manqué un petit quelque chose pour que je tombe réellement sous le charme de sa plume et de cette histoire.
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