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Critique de brigittelascombe


Une écriture limpide qui s'étire et flamboie comme une lente litanie, celle de la marche, dans le désert des années 1909-1910, de Nour (arrière petit neveu de l'Homme Bleu appelé de Dieu, faiseur de miracles qui enseignait "la Voie") et des siens. Une marche des tribus dans "la vallée de la Saguet" de puits en puits fermés par les Chrétiens qui leur font la guerre.Une marche vers le nord sous le sceau de l'amertume, l'épuisement,la faim au ventre,la soif sur les lèvres et la rage au coeur. Mais l'espoir malgré l'exil, la certitude que le Cheikh Ma el Aïnine viendra à bout d'enjeux qui les dépassent (ceux des affairistes qui convoitent les émeraudes et les nitrates du Sahara). Une marche vers la mort.
Un récit du passé alternant avec le présent (entre enfance et jeunesse) de Lalla, orpheline recueillie dans un bidonville aux abords du désert, dont la mère appartenait à la tribu de Ma el Aïnine et était "chérifa" (de la lignée de l' Homme Bleu").
Malgré sa "cabane de tôle et de zinc", Lalla est heureuse car elle a la liberté, la vie dans les dunes, la nature, l'amitié de Naman le pêcheur conteur et l'amour du berger noir sourd muet le Hartani. Un amour lumineux, mais une douce folie trop difficile à suivre.
Départ vers Marseille où les rêves décrits par Nanan se teintent de désespoir dans les rues où les gitans mendient et l'hôtel sordide où elle est exploitée.
Le talent de le Clézio (écrivain reconnu couronné par le prix Nobel de littérature en 2008 et dont Désert a reçu le grand prix Paul Morand de l'Académie française en 1980) est de nous conter de manière poétique et pourtant percutante (car sa litanie aux nombreuses répétitions semble une prière et ses tournures imagées sont étincelantes) l'histoire d'un génocide, celui des Nomades chassés de leurs terres, fusillés par les soldats sénégalais, l'histoire de ses conséquences désastreuses, mais également l'histoire (à travers la quête des origines) de la fierté des tribus, de la transmission de leurs croyances qui les illuminent malgré TOUT.
Lalla au "beau visage couleur de cuivre" porte en elle cette lumière qui "l'unit à la beauté du désert", qui l'irradie et qu'elle partage en tant que femme de ménage analphabète, simple femme donnant son pain à un gitan exploité ou cover girl lumineuse peu intéressée par l'argent.
Un livre émouvant qui parle de la folie des hommes corrompus par "la religion de l'argent".
Un chef d'oeuvre de finesse et de sensibilité!
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