(...) tous autant que nous sommes, nous consacrons nos vies à tenter de nous hameçonner les uns les autres. Nous ferrons et nous sommes ferrés. Parfois, nous luttons, et parfois nous acceptons volontiers d'être ferrés, de plonger ces crochets dans nos chairs, et d'autres fois nous essayons de jouer au plus fin avec ceux qui nous ont ferrés en les ferrant à notre tour (...)
(Ramanujam prépare son rasam qu'il mange quotidiennement)
Les lentilles du rasam sont dans une deuxième jatte. Il les trie, afin d'en supprimer les petits graviers, comme sa mère le lui a enseigné et il en renverse quelques-unes sur la table.... 7 lentilles. De combien de façon peut-on diviser 7 lentilles ? Eh bien il les essaie toutes - On peut les diviser en 7 groupes de 1 chacun, ou en un groupe de 6 et un de 1, ou un de 5 et un de 2, ou un de 4 et un de 3, ou un de 4 et un de 2 et un de 1, ou trois de 2 chacun et un de 1, ou .... Quinze en tout. Oui, on peut diviser sept lentilles de quinze façons.
Alors, de combien de manières peut-on diviser huit lentilles ?
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Vingt-deux façons.
Et avec neuf ?
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Il continue. Il ne mange pas. Il est minuit passé depuis longtemps, mais il a trouvé le nombre de fois que l'on peut diviser vingt lentilles et à ce stade, il y a des lentilles partout.
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Ce rasam ne sera jamais cuisiné.
627 façons.
(Le lendemain il se rend chez Hardy et)il entreprend de lui expliquer qu'en préparant ses ingrédients pour son plat, il s'est mis à compter les lentilles, et que cela la conduit à réfléchir aux partitions.
Calculer (p)n - le nombre de partitions d'un nombre - se révèle assez facile quand n est un 5 ou un 7 ; le problème, c'est qu'en grimpant dans la série des chiffres p(n) augmente à un rythme étourdissant.
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Le nombre de partitions de 176 ?
476 715 857 290
A mon arrivée, je ne comprenais pas vos lits. Je dormais sur les couvertures et je m'enfouissais dans une épaisseur de pull-overs et de manteaux pour combattre le froid. Ensuite, Chatterjee m'a expliqué... on doit se mettre au lit comme une lettre dans son enveloppe.
J'ai observé les cygnes. Leur beauté lustrée, l'attention et le soin qu'ils portaient à leur duvet blanc, cette fausse impression d'intrépidité et de brutalité. Ils flottaient à la dérive, leur apparent oubli de notre présence en ces lieux n'étant, je le savais, qu'une illusion, l'illusion perpétuelle qu'inspiraient aux créatures dotées d'yeux sur le devant de la tête celles qui les avaient sur le côté. Notre erreur, comme toujours, était de supposer que le point de vue de l'autre était le nôtre, d'interpréter une surveillance hostile comme de l'inattention.
Au-dessus de l'âtre, une tête de chevreuil contemple la scène de haut, avec cette expression teintée de mépris et d'ennui dont les taxidermistes semblent s'être faits les spécialistes.
C'est une grande et douloureuse ironie que même les accusations les plus injustes et les plus ridicules laissent malgré tout une douleur cuisante... Quelle douleur? Celle de la culpabilité? Non, pas exactement. Celle du doute.
L'idée qu'un esprit puisse s'attarder sur cette terre revêt pour moi une certaine logique intuitive, dont pâtira toujours la vision que nous a imposée le christianisme d'un paradis vague et ennuyeux, et d'un enfer horrible et fascinant.
Ensuite, ils se taisent, plongés dans un silence où persiste le limon d'un compromis gêné quand, faute de ce que l'on désire, on se contente de ce que l'on a.