Les deux femmes se penchèrent à la fenêtre. Elles virent au loin se profiler les premières maisons. Cela ressemblait à un amas indescriptible de hautes bâtisses, serrées les unes contre les autres, comme si une main de géant les avait disposées dans un savant désordre. Un brume grisâtre recouvrait la ville. Les fumées des innombrables cheminées se mélangeaient rapidement aux nuages d'un ciel bas, créant une sensation de flou.
La dernière fête du château de Saint-Val n'était plus qu'un lointain souvenir. Depuis deux ans, les chose changeaient dans les campagnes. Les dernières récoltes furent fort médiocres et le prix du blé fut multiplié par quatre ou cinq dans certaines régions. Le spectre de la famine montrait sa triste figure, avec son cortège de familles jetées sur les routes, d'indigents forcés de risquer les galères pour se nourrir, las de chercher en vain un peu d'embauche à la journée.
La voiture, au pas, traversa la cohue avec difficulté en direction du centre du bourg. Entourée d'un espace clos et arboré, la salle du Jeu de paume, un peu à l'écart des autres constructions, étalait son architecture massive qui jurait avec les maisons environnantes. Devant l'entrée, gardée par un cordon de soldats, se massait une foule compacte. Chaque heure, un député, choisi comme porte-parole, sortait informer les journalistes du déroulement des débats qui se tenaient sans discontinuer depuis la veille au soir. Leur carnet à la main, ils retranscrivaient d'une écriture rapide et nerveuse. Des coursiers à cheval partaient à cheval partaient informer Paris dans un va-et-vient incessant.