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Critique de Cigale17


Deux situations inhabituelles bouleversent le quotidien de la narratrice en perpétuelle recherche d'emploi : un nouveau locataire, Verdier, a emménagé au sixième étage dans l'appartement vide depuis longtemps ; une lettre est arrivée dont le cachet indique qu'elle a été postée dans la Loire. Remontent alors des souvenirs d'enfance et surtout d'adolescence. Quand ses parents s'absentaient (souvent), Gisèle la gardait : la soixantaine, ancienne ouvreuse, folle de cinéma et plus encore de Gary Cooper. Elle fait découvrir à Emma un monde nouveau et une ambiance joyeuse qui lui étaient étrangers pendant deux étés à la campagne. La deuxième année, en 1962, Fred et Paul, des copains de lycée d'Emma, les rejoindront…
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Gisèle traite Emma comme une interlocutrice valable, l'incite à s'exprimer, lui fait découvrir le cinéma en noir et blanc, et plus largement l'art sous différente formes. Ainsi, Emma commence à s'affirmer devant son père et à lui tenir tête sur certains sujets brûlants. Il y a toujours, en arrière-plan, les questions que les trois adolescents se posent sur les comportements de leurs aînés, de leurs parents ou de leur famille pendant la Deuxième Guerre mondiale : on aimerait savoir, mais on le craint aussi. À ces interrogations se mêlent l'indignation que provoquent la Guerre d'Algérie et le comportement de certaines connaissances ou relations, des très proches, même (le père de l'un, le frère de l'autre) ou un inconnu brièvement rencontré (le pianiste tortionnaire), tous impardonnables… Tout le récit est ponctué de faits d'actualité : le massacre d'octobre 1961, la mort de Marilyn, The Misfits…
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Michèle Lesbre rapproche explicitement la relation d'Emma avec Fred et Paul à celle de Catherine avec Jules et Jim, film auquel elle fait plusieurs fois allusion. le Boléro de Ravel, éponyme du roman, est fréquemment évoqué, ponctuant des moments bien différents, de la joie au drame, du plaisir à l'horreur. le roman, tout en non-dits, évoque les difficultés à se remettre d'un drame, qui déstabilise au point de devenir un deuil perpétuel : le récit comporte de nombreuses omissions qu'un mot comblera plus loin… ou pas. En ressort la surprenante fragilité mêlée d'opiniâtreté de la narratrice adulte, le refus d'une vie banale, forcément décevante, qu'elle exècre, mais qu'elle ne sait pas comment modifier, et la difficulté à accepter la réalité. Bizarrement, je n'étais pas enthousiaste quand j'ai fermé le livre, mais j'y repense souvent depuis et je lui trouve beaucoup de qualités. Je m'en serais voulu d'être passée à côté de cette autrice, inconnue pour moi jusque-là. Belle découverte que je conseille sans réserve.
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