Dans ce lieu, tout semblait simple et mat, le drame n’avait pas prise, non plus que l’imagination. J’avais toujours détesté ces environs où on ne restait qu’afin que rien n’arrive, manière à mon avis rebutante de se donner l’impression de vivre en paix.
...c’était très prétentieux, de n’avoir plus rien à apprendre de mes professeurs. Je n’avais aucune envie de faire la maîtrise ni même de terminer mon baccalauréat. Peut-être entretenais-je toujours le désir d’écrire, même si je n’avais rien à dire.
Mon séjour dans cette institution, de courte durée, me permit de me rendre compte que quiconque poserait son cul à la place du mien sur les bancs de l’école d’ingénierie pourrait comme moi apprendre à résoudre des équations différentielles et des problèmes de résistance des matériaux, j’avais l’impression de sombrer dans le plus vil conformisme, dans l’inanité d’un savoir purement pratique et ne permettant aucune réflexion globale. Je me trompais sans doute. Ce n’était pas contre les sciences en général que j’en avais, plutôt contre les sciences appliquées, contre ce à quoi on réduit trop souvent la connaissance. C’est la seule intuition géniale que j’eus de ma vie.
Je l’aimais, disons les choses telles qu’elles sont, ou plutôt, je l’aimai un temps, peu de temps. Alexandre est un charmeur et j’ai accepté de l’épouser sur un coup de tête, c’était idiot. À ma décharge, il m’a abusée, il possède une manière toute personnelle de manipuler les gens, et ce que j’avais pris chez lui pour de la légèreté, de l’humour, s’apparente en fait trop souvent à de la hauteur ou du mépris.
Je m’appelle Luz. Dans ma tête, je ne sus orthographier correctement son nom, qu’elle prononçait comme si elle avait du feutre sur la langue.
Pour me donner une contenance, je lui expliquai que personne ici ne buvait de vin, sauf moi, à l’occasion. En ce cas nous boirons ensemble, proposa-t-elle, but in the meantime, let me have another glass of that terrible whisky. J’ignore pourquoi elle me parla en anglais. Cela me donna l’impression d’être de retour à la grande époque (sans l’avoir vécue).