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Critique de michfred


Mario Luzi a été influencé par Montale et Ungaretti. Il est un grand admirateur de Mallarmé -encore un!

De là à le "classer" dans le mouvement de l'hermétisme, il n'y aurait qu'un pas ..mais si sa poésie, comme un papillon capricieux, ne se laisse pas capturer aisément, on peut l'apprivoiser et on sent tout de suite que cet immense poète a des choses à nous dire.

Alors on tend l'oreille, on s'accroche un peu - il y a de quoi être bouleversé:

"Je t'invoque pour la nuit
qui vient et pour le sommeil;
toi qui souffres , toi seule peux me secourir
dans ce passage aveugle du temps
vers les temps, dans cet âpre voyage
de celui que je suis vers celui que je serai,
vivant une vie dans la vie,
dormant un sommeil dans le sommeil.
Toi, adorée, qui souffres comme moi,
toi dont cela me donne le vertige de penser
que le temps, ce froid
parmi les astres et sur les tempes, et autre chose encore, contient
la naissance, la maladie, la mort,
la présence dans mon ciel et la perte. "

Comment mieux dire la fragile parenthèse de la vie et de l'amour dans la vaste indifférence du temps, ce "froid parmi les astres et sur les tempes"?
Qui n'a pas éprouvé, quand il aime, le déchirement d'avoir en son ciel à la fois la présence et la perte de l'être aimé?

La poésie de Luzi est à la fois philosophique et charnelle, elle parle à l'esprit, elle rend plus intelligent et en même temps, elle bouleverse le coeur jusqu'aux larmes, comme quand il évoque le paysage de la vie, paisible et solaire , obstinément vivant malgré la mort qui guette:

"Là où l'ombre progresse et où cessent les routes
parmi les fleurs, me rappeler les mots
et les cris de l'homme est peut-être un leurre.
Mais toujours sous le ciel coutumier
je retrouve mes traces, mon soleil
et les arbres loin du temps
figés derrière les virages. Et toujours,
encore que me soit connu le doux secret,
sur la poussière paisible, au milieu des parterres,
je m'attarde, attendant que saille
du soleil un visage inexprimable."

Pas pressé de connaître "le doux secret", s' attarder obstinément " sous le ciel coutumier", "sur la poussière paisible"..

Quelle plus belle image avoir de notre musardise indolente et provisoire sur terre?

Pas fini d'en faire mon miel, de Mario Luzi...

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