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Critique de nanek


nanek
03 novembre 2020
1977 au Congo-Brazzaville. Plus précisément les 19,20 et 21 Mars.
On retrouve Michel déjà rencontré dans « Demain j'aurais vingt ans », sortant de son certificat d'étude. Il semble tête en l'air mais observe son monde, le questionne, l'écoute à travers les actualités internationales que diffuse la radio Grundig, comparant et critiquant du haut de son jeune âge le pendant propagandiste martelé par les ondes de l'état.
Il habite toujours Pointe-Noire avec maman Pauline et Papa Roger.
Maman Pauline est une redoutable mais respectée commerçante de banane mais soumise aux lacunes d'un état naissant, omnipotent mais en même temps dépassé par le manque de formation de sa population pour faire tourner les reliques industrielles comme le chemin de fer par exemple.
Élevant la scolarité en point d'orgue de son éducation « poli », il se nourri également des voisins qui distillent les codes sociaux et entraide tel Mâ Moudoubi la marchande du quartier et ressent les affres post coloniaux des nantis qu'il appelle « les capitalistes noirs », petit nombre s'enrichissant au détriment du reste de la population.
Le récit alterne entre candide géopolitique, descriptions du régime communiste, la décolonisation récemment débutée et le portrait du chef suprême de la révolution congolaise Marien Ngouabi.
Donc en ce 17 Mars 1977, la Grundig annonce l'assassinat du chef de la révolution et c'est l'occasion pour Michel de voir débarquer de la capitale Brazzaville, trois oncles venant colporter la peur et le malheur sur la famille parce qu'un frère par alliance de Mama Pauline s'est trouvé accusé et condamné pour contestation du pouvoir.
S'en suit un dilemme pour respecter le mort et les rites funéraires sans risquer de mettre en danger la famille élargie forcément coupable de traitrise aux yeux du régime despotique cherchant des bouc-émissaires à un coup d'état déguisé.
Alain Mabanckou romance sa jeunesse et dépeint les enjeux de la décolonisation dans un contexte de guerre froide. Il dénonce le rôle joué par les médias non-indépendants d'un état vacillant et fragile.
Il nous expose un condensé d'Histoire de son pays à hauteur d'enfant, la violence qui se déchaine à la mort du camarade président.
Plane sur ce récit un fatalisme de rigueur devant l'Histoire se répétant et nous permet d'ouvrir la porte de ses familles congolaises sur qui se répercute un événement politique dans une construction postcoloniale chaotique faite d'instabilité ethnique.
Plus intimement, c'est aussi l'apprentissage du mensonge salvateur pour un enfant, régissant désormais sa vie et l'observation violente des mécanismes du deuil par le personnage de Mama Pauline.
Difficile de savoir s'il y a des éléments autobiographiques dans ce roman mais certainement une part de vérité sur la nostalgie de la jeunesse de l'auteur toujours persona non grata dans son pays, dirigé autocratiquement par Sassou-Nguesso depuis ces événements de 1977.
Quel dommage pour ce peuple d'être privé d'une voix qui porte l'étendard de la liberté à mon humble avis.
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