Je connaissais la langue pendue du romancier, je découvre la concision du poète. Toujours acide, fourchue, mais tirant généreusement vers la beauté inutile, l'auteur nous dévoile une corde sensible, tendue en peu de mots, efficace comme ses dialogues enflammés. On l'entend parler en lisant à voix basse. le sujet (par obligation ?) est très bien traité, loin des clichés. Il redonne la poésie à la poésie, l'essence à son pays, l'authenticité à sa profonde sincérité, bref c'est un bien bel ouvrage.
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— J'ai quelque chose de très important à te dire, mon frère...
Il a regardé autour de lui pour s'assurer que les clients de l'établissement ne nous écoutaient pas :
— Pourquoi tu n'écris jamais sur le Congo, hein ? Pourquoi tu ne cites jamais le nom du dictateur qui nous gouverne là-bas, hein ? Je te préviens que si tu ne le fais pas, moi-même je vais le faire, et tant pis pour toi car si je deviens très connu ça veut dire que toi c'est fini, tu ne seras plus connu, les gens vont t'oublier, est-ce que tu me comprends, hein ?
Reprenant son souffle, il a poursuivi :
— J'en ai marre parce que vous autres, avec les Léonora Miano et les Fatou Diome, vous ne parlez jamais de vos pays ! C'est quoi cette histoire ? Est-ce que c'est les blancs qui vous donnent les sujets et vous disent de ne pas parler de vos pays, hein ? C'est pour ça que moi je ne lis plus tous ces écrivains africains, c'est pas normal !
La forêt est là, impériale, guettant l'horizon. Oui, c'est dans cet amas de végétation que se terrent nos esprits, et tout animal qui s'y trouve est une réincarnation d'un être disparu mais qui erre encore dans les artères de la ville. Lorsque le vent souffle, les cimes des arbres bougent frénétiquement : on dit alors que les esprits se peignent les cheveux pour nous apparaître très séduisants.
Demain j'aurai vingt ans : je serai un adepte de la Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes (SAPE). Pour l'heure, j'apprends les bases élémentaires, celles qui me donneront la force de me battre avec deux armes essentielles : mon corps et ce que je mets pour le couvrir.
Solitaire, le gorille avance à quatre pattes sur les feuilles mortes, scrutant la végétation comme s'il appréhendait de marcher sur des espèces infinitésimales. Il refuse l'idée que l'Homme descend du singe, sinon pourquoi, lui le gorille, est-il demeuré au stade animal ?
L'enfant au dos de sa mère a traversé des plaines, des montagnes, des collines. Il semble plus épuisé que sa maman dont la fierté de le porter se lit sur le visage. La loi de la nature est respectée : notre enfance se prolonge dans celle du petit être que nous chérissons.
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Si je vous dit le Crédit a voyagé : à quel écrivain, qui connaissait bien l'Afrique, pensez-vous ? le voyage… au bout de la nuit… Mort… à crédit…
« Verre cassé », d'Alain Mabanckou, c'est à lire en poche chez Points Seuil.