Les amateurs de littérature victorienne partagent leur attirance à la fois pour le réalisme et la description de la vie quotidienne dans l'Angleterre du 19eS , et d'autre part pour son héritage gothique et romantique, qui explore les passions humaines.
Ainsi parmi les thèmes les plus récurrents : l'apogée de la Révolution Industrielle et le développement anarchique des zones urbaines qui s'organisent en ghettos. La ville devient menaçante et dangereuse tant la promiscuité y règne. Certains quartiers sont peuplés d'ouvriers très pauvres, agglutines les uns contre les autres sans possibilité d'hygiène.
Le roman neo -victorien d'Élisabeth McNeal reproduit le décor et les thèmes de la littérature victorienne, en s'inspirant des romans qui l'ont précédé comme ceux de
Michel Faber mais aussi en plantant cette ambiance particulière très cinématographique. La ville de Londres est à la fois celle des artistes et de l'Exposition universelle, mais aussi celle de Jack l'éventreur et des prostituées.
Même si l'auteure est très loin d'avoir le talent de
Michel Faber, Michael Cox ou
Sarah Waters, le roman présente une héroïne intéressante, inspirée de Lizzie Siddal qui fut la muse des peintres pré-raphaelites. Iris rêve de devenir peintre et d'être exposée alors qu'elle travaille avec sa soeur dans une fabrique de poupées. le salut viendra d'un jeune peintre beau et romantique, puisque, même au 21eS, le salut ne peut venir que d'un homme.
Malgré tout, après son combat contre le taxidermiste qui voulait faire d'elle une poupée grandeur nature, la jeune femme prend confiance en elle et décide de prendre son destin en main. Elle exprime ainsi la révolte du modèle :
" Quatre cent livres ! Telle est donc sa valeur marchande ? Iris regarde la toile, puis les portraits d'autres femmes qui l'entourent : leurs visages aussi seront conservés pendant des centaines d'années, exposés aux regards critiques ou appreciateurs de tout un chacun, et toutes ont un prix. La Royale Academy n'est rien de plus qu'une boutique fastueuse abritant des dizaines de femmes peintes, le regard triste et l'air mélancolique. Toutes à vendre. "
La prise de conscience féministe n'a rien de progressiste en 2023. L'hommage aux femmes peintres, par l'intermédiaire de Lizzie Siddal qui fut modèle des pré-raphaelites, épouse de Gabriel Rossetti, peintre et poétesse aurait gagné à être moins romanesque. Mais l'auteure a choisi de multiplier ses chances de succès en librairie en saupoudrant le tout d'une belle dose d'invraisemblance. Seul le compte-rendu critique du tableau en dernière page vient sauver ce portrait de femme.