Citations sur Les Acteurs de bonne foi ou Les effets surprenants de.. (8)
ÉRASTE : Voulez-vous qu'une comédie décide de mon sort, et que ma vie dépende de deux ou trois dialogues ?
Scène X.
ÉRASTE. Mais, dis-moi, cette comédie dont tu nous régales, est-elle divertissante ? Tu as de l'esprit ; mais en as-tu assez pour en faire quelque chose de passable ?
MERLIN. Du passable, Monsieur ? Non, il n'est pas de mon ressort ; les génies comme le mien ne connaissent pas le médiocre ; tout ce qu'ils font est charmant ou détestable ; j'excelle ou je tombe, il n'y a jamais de milieu.
Scène I
LISETTE. À quoi sert tout ce que vous faites là, Madame ? Quand on achèverait cette scène-ci, vous n'avez pas l'autre ; car c'est moi qui dois la jouer, et je n'en ferai rien.
MADAME ARGANTE. Oh ! Vous la jouerez ; je vous assure.
LISETTE. Ah ! Nous verrons si on me fera jouer la comédie malgré moi.
MADAME AMELIN, riant. Mon neveu et sa maîtresse seront-ils, de leur côté, de bons acteurs, à votre avis ? Car ils ne sauront pas que je me divertis, non plus que le reste des acteurs.
ARAMINTE. Cela sera plaisant, mais il n'y a que mon rôle qui m'embarrasse : à quoi puis-je vous être bonne ?
MADAME AMELIN. Vous avez trois fois plus de bien qu'Angélique : vous êtes veuve, et encore jeune. Vous m'avez fait confidence de votre inclination pour mon neveu, tout est dit. Vous n'avez qu'à vous conformer à ce que je vais faire : voici mon neveu, et c'est ici la première scène, êtes-vous prête ?
MERLIN. Tais-toi donc, tout ceci est de la scène, tu le sais bien.
BLAISE. C'est que je vais gager que ça est vrai.
MERLIN. Non, te dis-je ; il faut ou quitter notre projet ou le suivre ; la récompense que Madame Amelin nous a promise vaut bien la peine que nous la gagnions ; je suis fâché d'avoir imaginé ce plan-là, mais je n'ai pas le temps d'en imaginer un autre ; poursuivons.
COLETTE. Je le trouve bien joli, moi.
LISETTE. Je ne dis mot, mais je n'en pense pas moins. Quoi qu'il en soit, allons notre chemin, pour ne pas risquer notre argent.
ÉRASTE. Adieu ; fais-nous rire, on ne t'en demande pas davantage.
MERLIN. Nous jouerons à l'impromptu, Monsieur, à l'impromptu.
ÉRASTE. Que veux-tu dire : à l'impromptu ?
MERLIN. Oui. Je n'ai fourni que ce que nous autres beaux esprits appelons le canevas ; la simple nature fournira les dialogues, et cette nature-là sera bouffonne.
ÉRASTE. La plaisante espèce de comédie ! Elle pourra pourtant nous amuser.
Ce que j'aime de ta comédie, c'est que nous nous la donnerons à nous-mêmes ; car je pense que nous allons tenir de jolis propos.