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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce qu'on lit ici est une enquête sur un phénomène particulier au Japon : les "évaporations". Je ne connaissais pas ce phénomène avant de tomber sur le titre d'un roman qui le prenait comme sujet. Mais j'ai préféré lire un documentaire plutôt que de la fiction.
Chaque année, des milliers de japonais décident de "disparaître", de quitter parents/femme/mari/enfants et surtout travail, du jour au lendemain, dans l'anonymat total. Les auteurs partent à la recherche de ses disparus, et en rencontrent quelques uns, ou des proches, des "professionnels". J'ai eu du mal avec ses témoignages, du mal à comprendre qu'on puisse quitter sa famille sans explication, sans nouvelles. Partir en laissant son fils derrière soi parce qu'on aime pas son mari ? partir en laissant sa famille criblée de dettes ? Je trouvais ça lâche. Comme un suicide, mais presque pire : avec le suicide au moins la famille sait ce qu'est devenu le disparu. Et beaucoup de témoignages manquent de sentiments, d'émotions.
Mais les auteurs de cette véritable enquête ne se limitent pas à ces témoignages. Ils décrivent la pression présente dans les sociétés, le poids des convenances, les mariages sans amour, arrangés, l'obligation de réussite, la honte de l'échec... Les épisodes sur Toyota et le "camp de l'enfer" sont effrayantes. Je comprends mieux, je relativise mon impression de lâcheté. Cette société nippone a l'air tellement lourde !
Et que dire de la passivité des autorités ? là aussi les auteurs enquêtent (ou tentent).
Bref, un texte et des photos passionnantes et captivantes !
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Les évaporés du Japon est un reportage sur un phénomène social propre au Japon : "l'évaporation" ou disparition totale d'environ 100 000 japonais par an. Léna Mauger, à l'écriture, et Stéphane Remael, photographe, ont retrouvé la trace de certaines de ces personnes disparues volontairement.
Mais ils sont également allés au-delà : en décrivant les conditions de travail et de vie des employés de Toyota, en se penchant sur un stage imposé à des cadres en baisse de régime afin de les remettre dans le droit chemin, etc., ils ont tenté d'expliquer ce processus.

Car l'Etat nippon n'a mis en place aucune structure pour parer ce phénomène : ni centre d'aide, ni études, rien. le sujet reste d'ailleurs hautement tabou, aussi bien en ce qui concerne les familles des disparus que pour ces derniers. Majoritairement, il s'agit d'hommes, souvent à la suite d'un licenciement. Mais pas uniquement : des familles entièrement se sont évaporées, notamment au cours des années de crises financières depuis la décennie de 1990.
Des entreprises de "déménagement " sont d'ailleurs spécialisées dans la disparition en pleine nuit de ces individus. On découvre également que des particuliers sont à l'origine d'associations visant à aider les familles à retrouver leurs proches. Car la police ne mène pas d'enquête pour retrouver une personne majeure et qui semble avoir disparu volontairement. La grande majorité de ces enquêtes n'aboutissent pas et les familles resteront sans nouvelles. A moins que l'évaporé ne reprenne contact, parfois des décennies plus tard...

Ces personnes, après leur disparition, vivent pour la plupart sous une fausse identité, sans couverture sociale, de petits boulots, souvent journaliers. Et c'est là que réside une des clés pour comprendre le fait que rien n'ait encore été fait pour limiter le phénomène : ces disparus servent l'économie du pays. On les retrouvera notamment sur les sites radioactifs suite à l'accident nucléaire de Fukushima, engagés afin de nettoyer les lieux... D'autre part, les pressions sociales subies au cours des études, dans la vie professionnelle ou même intime et qui sont les fondements de la société japonaise et de son économie expliquent le choix fait par ces personnes. Avouer leur existence reviendrait donc à reconnaître les limites de la société japonaise et ses effets néfastes sur ses membres.

On l'aura compris, il s'agit là d'un reportage extrêmement puissant, intelligent, très bien écrit et sublimé par les photographies présentes tout au long du livre. Il s'en dégage un fort sentiment de mélancolie. Incontournable pour qui s'intéresse au Japon ou aux phénomènes de société.
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Chaque année, des milliers de japonais quittent leur travail, leur famille, leur domicile sans laisser ni explications, ni traces pour devenir des évaporés, dépourvus d'identité.
Léna Mauger et Stéphane Remael ont enquêté sur ce phénomène auprès de ceux qui ont choisi de disparaître, de leurs familles, de ceux qui les recherchent et de ceux qui tentent de les aider. Il en ressort cet indispensable documentaire illustré de photographies impressionnantes. Que ce soit pour fuir un échec professionnel ou personnel, des créanciers de plus en plus pressants, un examen raté ou la crise économique, ces intouchables sont avant tout le résultat d'une société qui forge des idéaux inatteignables, impose le retrait de soi face au groupe et joue avec le sentiment de honte. le droit à différence semble inconcevable. Devenus des fantômes, les évaporés sont alors condamnés au mensonge à vie, aux travaux les plus mal payés et dangereux et surtout à la solitude. Glaçant et effrayant.
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Ce livre est terrible. Il traite d'un thème inconnu dans nos contrées occidentales : les disparitions volontaires suite à un accident de parcours.

Il est magnifiquement écrit, d'une sensibilité extrême à ce qui l'entoure, Léna Mauger a les mots justes pour décrire ceux qui l'entourent.
Son propos est illustré par les photographies épurées de Stéphane Remael, qui ayant rédigé le prologue et l'épilogue, dévoile lui aussi une plume subtile et pleine d'émotions.

Le sujet qu'ils ont choisit de traiter est tellement tabou au Japon qu'ils vont travailler comme des enquêteurs pour nous le faire découvrir en profondeur.
On y côtoie la misère, la nostalgie, le regret, la peine, la honte et parfois même la folie. Ces tranches de vies m'ont pris aux tripes tant la douleur humaine est palpable dans leur récit. Ce que ces hommes et ces femmes se font subir (ainsi qu'à leurs proches) est d'une terrible brutalité.
Et si c'est au passé qu'ils évoquent leur vie d'avant, c'est au présent qu'ils parlent de l'amour qu'ils portent à ceux qu'ils ont laissé derrière eux.

Vulnérables aux échecs, élevés dans la nécessité de réussite sociale, les Japonais qui "échouent" préfèrent s'effacer de la surface des cartes pour ainsi -pensent ils- "épargner" ceux auxquels ils tiennent . Pour eux, rembourser une dette est une question de dignité, ne pas y parvenir couvre de honte. Ainsi "évaporés", sont ils pour autant libérés? Pas tant que cela, car les voilà désormais voués à l'oubli, à la solitude et à la précarité la plus totale.

Un livre poignant, à lire pour découvrir jusqu'où les Japonais peuvent aller par Amour...
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Coup de coeur estival pour cette enquête menée par Léna Mauger et Stéphane Remael au Japon.

Ils sont partis en quête de rencontrer ces femmes et ces hommes et de connaître ce qui les avait contraints à prendre une telle décision : disparaître volontairement, en catimini, sans signe précurseur, sans bruit... S'évaporer...

Vouloir comprendre ne me semble pas être ce qui prime car nous ne sommes pas japonais et tous les ressorts à l'initiative de cette fuite ne font pas partie de notre façon de raisonner. Juste être là pour écouter ces témoignages qu'ils nous relayent.

Être le témoin d'une fuite volontaire nourrie par une souffrance, un échec.

Au fil des rencontres qu'ils font et qu'ils photographient parfois, se dévoile le détonateur qui ne leur laisse pas d'autre échappatoire que partir pour ne jamais revenir.

Les deux auteurs de ce livre traitent d'autres sujets qui découlent de ces décisions ou qui sont en lien avec ces fuites.

Sublimes photos
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J'ai eu connaissance de ce reportage il y a quelques jours seulement. Comment est-ce possible, me direz-vous ? Il date de 2014. Eh bien, pour ma défense, je dirais que je m'intéresse depuis peu à la culture japonaise ; j'étais complètement passée à côté de cet ouvrage. Je répare très vite cet impair.

Une lecture fascinante. Vraiment ! Des photos magnifiques. Les « évaporés », comme on les nomme, représentent une part non négligeable de la population nippone. Suite à un échec professionnel ou personnel : un licenciement, des dettes impossibles à rembourser, un adultère, un examen échoué…des personnes se sentent déshonorées. Incapables de faire face à un profond sentiment d'humiliation dicté par une société répressive dans laquelle l'échec est impardonnable, elles décident de fuir. Certains quittent tout sans laisser de traces. D'autres, les » yonige » décident de faire appel à ces » déménageurs du soir » afin de commencer une autre vie ailleurs. On les retrouve dans les « onsen », ces bains de vapeur, ou travaillant dans des « ryokan », ces auberges traditionnelles. Si une partie décide de se faire oublier en regagnant un paysage rural, une autre se fond dans l'anonymat de la ville. Des quartiers en abritent un certain nombre. le phénomène perd alors quelque peu de son mystère et devient plus compréhensible, plus concret, plus proche.

Sans un mot pour leur famille qu'ils abandonnent dans une grande peine, pendant des mois, des années ou pour toujours, ils vivent en marge de la société dans un isolement et un dénuement des plus effrayants. du moins, est ce ainsi que les choses me sont apparues pour tous les témoignages présentés, excepté un : le dernier. En effet, celui-ci contrairement aux précédents, ne présente pas les » évaporés » comme des victimes, lâches, qui ont fui face à la difficulté mais comme des personnes courageuses, avides de liberté qui ne se laissent pas enchaîner et dicter leur conduite par des règles trop strictes imposées par une société qui exerce une pression sans relâche sur ses habitants.

Des associations ont été créées afin d'apporter de l'aide aux familles des disparus. le gouvernement semble submergé. Si certains parents se lancent aux yeux de tous à la recherche d'un membre perdu, ils sont rares. Beaucoup le font dans la plus grande discrétion car il est honteux de compter un évaporé parmi les siens.

Si ce phénomène n'est pas typiquement japonais, il est aisé de reconnaître qu'il est bien plus présent au Pays du Soleil Levant que partout ailleurs.

Le sujet est aussi passionnant qu'effrayant. Je conseillerai ce reportage à tous les curieux et pas seulement à ceux qui le sont de la société japonaise. Chaque ouvrage de fiction, ou non, que je lis concernant cette société est assez déroutant. L'influence du collectif sur l'individuel est considérable. Les conventions priment sur le bien-être et l'épanouissement. Il parait invraisemblable d'en arriver à une situation aussi extrême. Et pourtant, lorsque la machine est lancée, difficile de la retenir.


Lien : https://labibliothequedeceli..
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Evaporés ou évaporateurs, de nombreux récits sont présents dans ce livre. Toutes sortes d'échecs poussent des japonais ou des familles entières à disparaître, jusqu'à 100 000 par an ! Que ce soit à causes de dettes diverses, d'échecs à un examen, dans le travail ou une rupture trop difficile, n'importe qui peut passer le pas et disparaître, certains préfèrent le suicide, d'autres la fuite. de belles photographies ponctuent les récits, et quels récits ! Incroyable à lire de nos jours où la technologie permet de retrouver presque n'importe qui grâce à ses traces numériques, et pourtant ils y arrivent encore très bien. La structure du Japon le permet un peu plus que chez nous visiblement pourtant on déplore aussi des évaporés chez nous.
J'ai adoré la façon dont ce thème original est traité, les auteurs laissent la parole a ceux qui ont fuit ou aidé à fuir, les témoignages sont éclectiques et c'est passionnant à lire.
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: Enquête et témoignage tres troublant sur un phénomène qui touche le Japon : les disparitions volontaires . Ainsi que l'annonce la citation de Murakami en exergue de ce livre "derrière les choses ou les personnes que nous croyons connaître se cache toujours une part identique d'inconnu" Sur les traces des 2 journalistes nous rencontrons plusieurs "évaporés" : Kazufimi vit dans les quartiers nord de Tokyo, après des études dans une école prestigieuse. Devient courtier dans une grande société financière. Après un mauvais placement , il est submergé par la honte et sans réfléchir, prend le train et se volatilise.il prend alors n'importe quel contrat pour survivre et devient maçon ,manoeuvre,plongeur,serveur... "je n'ai pas songé à une nouvelle vie, je me suis enfui c'est tout-S'enfuir n'est pas glorieux ni argent ni statut social. L'essentiel est de rester vivant" pour arriver à survivre Kazufumi,va monter sa propre société de débarras en tous genres et aider à la nuit tombée les futurs évaporés a emmener leurs affaires.. On rencontre également Hashi évaporés depuis 27 ans qui raconte que au bout de vingt ans d'errance ,et avoir exercé le boulot de journalier sur un chantier puis travaille au noir dans un pressing, il a éprouvé un jour le besoin de reprendre contact avec sa famille . Il a alors rencontre son beau- frère qui lui a appris le remariage de sa femme ainsi que le décès de ses parents ( cela faisait tout de même vingt ans qu'il avait disparu!) "Qu'est-ce que j'espérais? Depuis je meurs lentement .Les bonheurs perdus ca ne se rattrape jamais" Cet essai fort touchant et troublant, se lit très facilement mais n'en est pas moins fort documente et par ailleurs l'insertion de photos entre les descriptions d'évapores sont un réel bonus!
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Un roman magnifique composé de photos qui viennent apporter un plus à cette enquête ! A lire absolument ! C est une enquête terrifiante ! Digne d'un polar !
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