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Critique de JeanLouisBOIS


Considéré comme le "Maupassant anglais", William Somerset Maugham est un formidable conteur d'histoires. Ses nouvelles sont typiques de l'écrivain britannique de la première moitié du 20ème siècle avec :
- leur humour anglais, c'est-à-dire à la fois pince-sans-rire et féroce,
- leur atmosphère où les classes sociales sont très marquées et leurs relations très codifiées,
- leur narrateur qui se place à la hauteur des classes dominantes avec son pragmatisme, une absence d'idéologie et une sorte d'amoralité discrète qui lui permet de mettre les lecteurs dans sa poche,
- leur univers qui va des grands manoirs de la campagne anglaise et des riches immeubles londoniens aux belles demeures coloniales de l'Empire britannique (Chine, Singapour, Malaisie, ...) caractérisés par ses planteurs, ses missionnaires, ses indigènes, ses navigateurs, ses fonctionnaires et ses administrateurs,
- leur mode de vie où l'on retrouve le plus souvent la dictature de l'apparence (robes, casque colonial, tenues de tennis ou de golf....), les conventions sociales et la bienséance typique de l'ère victorienne mais aussi l'ennui (nombreux whisky-soda) et beaucoup d'hypocrisie.
De plus, chez Maugham, on trouve une très grande qualité des comparaisons qui donne un aspect poétique à son texte mais toujours dans le fil du déroulement de l'action.
Mais finalement, qu'est-ce qui peut nous faire apprécier ces histoires avec leur misogynie souriante mais constante, leurs préjugés surannés et dépassés, leur colonialisme triomphant?
Je pense que c'est fondamentalement ce que Balzac appelait dans l'un de ses romans "l'envers de l'histoire contemporaine". Dans la plupart des nouvelles, une bonne société se présente à nos yeux parée de toutes ses qualités physiques et morales, mais l'auteur prend un malin plaisir à nous décrire par le menu l'envers du décor. Ce qui est fascinant avec Somerset Maugham, c'est qu'il ne porte jamais un regard extérieur sur ses personnages et leur psychologie, au contraire il partage la plupart de leurs valeurs et de leurs convictions, mais conserve toujours son quant-à-soi, un décalage léger mais suffisant pour qu'on ait l'impression qu'il est à la fois à leur hauteur mais pas totalement immergé dans leur histoire.
Ces nouvelles font penser à une sorte d'ébauche d'une "comédie humaine" des classes supérieures britanniques au temps de l'Empire encore florissant.
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