« Comment tu t'appelles, fiston ? »
J'écris un peu à chaud, là, car ce roman m'a bouleversée.
Je l'ai terminé hier, quasiment en apnée tellement j'ai l'impression d'avoir lu la deuxième moitié sans même faire une pause ni m'en rendre compte, complètement immergée dans ma lecture, tendue, dévastée par certains passages, bousculée par mes interrogations, inquiète quant au devenir des personnages.
Et pourtant, au début du roman, ce n'était pas gagné. Il me manquait quelque chose, j'avais l'impression d'un détachement excessif, voir même d'un néant d'affect et d'émotion plutôt choquant vu ce qui était raconté. Je me suis dit, bon, de deux choses l'une, soit je vais passer à côté de cette lecture car le style me tient à distance – soit c'est fait exprès.
Et puis soudain, bim, l'histoire prend un tournant réellement inattendu et tout commence à faire sens. le coup de coeur m'a quasi prise par surprise et presque assommée, tellement je ne m'y attendais pas. J'ai été happée par ma lecture, par l'écriture, par la petite histoire qui se mêle de plus en plus à la « grande », par la justesse et la profondeur de la plume de
Darragh McKeon.
Simon Hanlon, le narrateur, est épileptique. le roman commence alors que ses crises viennent de reprendre, après des décennies de dormance. Il avait quinze ans lorsque les premières sont apparues. Il habitait en Irlande du Nord. « le 8 novembre 1987, l'IRA fit exploser une bombe à Enniskillen. ma ville d'origine. Onze personnes furent tuées. Soixante-trois autres grièvement blessées. Ce fut le pire moment de la triste histoire des Troubles. Mon père et moi étions présents. Mes premières crises d'épilepsie se manifestèrent peu après ». La bombe explosa lors de la procession civile du Dimanche du souvenir, jour de commémoration des soldats britanniques morts – Enniskillen se situant tout au bout sud-est du Lough Erne, non loin de la frontière avec la République d'Irlande.
Je ne vais pas vous en dire plus. Je vous laisse la découverte et la surprise. Juste que
le dimanche du souvenir n'est pas « encore un » livre sur les Troubles. Il possède une vraie originalité, que ce soit la finesse et la maîtrise remarquables de sa construction ou la richesse des thèmes abordés : l'épilepsie, l'impact du deuil et de la culpabilité sur l'esprit humain, le quotidien pendant les Troubles et le processus de radicalisation, ses réflexions approfondies sur la conscience, la mémoire, l'imagination et les souvenirs. L'écriture de
Darragh McKeon est d'une précision redoutable, du début à la fin.
"Il est des choses que les gens dissimulent derrière les mots, il y a des mots cachés à l'intérieur des choses, comprimés, prêts à fleurir à tout moment."
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