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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Tout comme Sabine59 j'ai des instructions très précises. Je partagerai mon sentiment sur ce livre le 15 Août.

15 Août 2018

Je ne connaissais pas Roger Gilbert-Lecomte jusqu'à ce que les éditions Flammarion par le biais d'une opération Masse critique Privilégiée m'aient adressé ce livre de qualité de Matthieu Mégevand. Je les remercie chaleureusement.

L'auteur nous raconte la vie d'un poète, né à Reims le 18 mai 1907 et mort le 31 décembre 1943 à Paris. Une vie à part se profile dès son plus jeune âge. Il est doué, particulièrement doué, un brin provocateur, et très jeune il se singularise. Il se sépare du troupeau, si je puis dire. Son ascendant sur ses camarades, son humour, son goût du risque, « sa haine de l'ennui », son besoin de justice, d'absolu, le conduisent à se lier avec trois de ses camarades chez qui il décèle des affinités littéraires évidentes. Plus tard Il créera avec eux une revue : le grand jeu.

« Ce qu'il hait plus que tout : les petites certitudes et la petite vie ».
Ce en quoi il croit : La littérature et l'amitié à condition qu'elle soit accompagnée de littérature.

Matthieu Mégevand plante le décor :Reims» qui « n'est plus une ville mais un champ de ruines aux maisons éventrées ». La cathédrale «ensevelie sous ses propres gravats, soufflée, écorchée…… qui ressemble à une immense tombe »

Et au centre de ce tableau surgit Roger Gilbert Lecomte. Il « grandit dans un paysage d'outre-tombe et voit de ses yeux ce dont l'homme est capable. » Personne ou presque ne le comprend. Il se met au banc de sa propre société et sombre petit-à-petit, comme l'a fait sa ville, dans une sorte de chaos intérieur, « ce gouffre qui se creuse » et qui le laissera vaincu tôt ou tard.

En écrivant la vie de ce poète Matthieu Mégevand évoque le malheur, la pauvreté, la débauche, les critiques, l'incompréhension, la marginalité, le mépris, les problèmes de santé d'un écorché vif bourré de talent. Il raconte sa vie mais ne porte aucun jugement. Comme pour Rimbaud, Roger Gilbert-Lecomte trouve que la seule chose insupportable, c'est que rien n'est supportable. Comme Baudelaire il choisit les paradis artificiels. Il souffre et fait souffrir. Il ne comprend pas les autres mais les autres ne le comprennent pas non plus. Il repousse sans cesse les limites jusqu'à tout faire voler en éclats. Il s'isole et à force de s'évader hors des sentiers battus, construit lui-même les barreaux de sa propre prison. Un engrenage ?

Ce texte est à l'image de la vie qu'il raconte : Des mots sont tendus à l'extrême. Les situations sont hyper-réalistes, sans concession, sans faux-semblants avec une vibration tout-à-fait sensible, nerveuse, crispée comme le sont les traits d'un poète maudit. Les mots sont là, choisis avec la plus grande compétence, la plus grande précision, la plus grande cohérence pour nous balader un coup avec grâce, un coup avec violence du centre de l'âme aux contours d'une main tremblante, fiévreuse et pourtant habile. de Reims à Paris, d'une chambre sordide au bar du château, du Dôme, célèbre restaurant de Montparnasse à la clinique du Plessis-Robinson, d'Aragon à André Breton, de l'extase à la déchéance, du monde physique au monde surnaturel. Ce texte propose une radiographie capable de mettre en lumière les nombreuses zones d'ombre d'un intellectuel brillant, inadapté et inadaptable.

L'illusion flirte sans cesse avec la réalité. le lecteur sent bien « l'étrangeté de cette vie », et, en même temps que « les membres du poète s'alourdissent, que sa nuque bascule que son corps s'affaisse », ce lecteur lui se redresse, parce qu'il comprend mieux cet artiste meurtri. Il sent bien qu'aussi loin qu'aient été repoussées ses propres limites, ses audaces, ses rejets la vie du poète est logique depuis le départ. Sa sensibilité souffre d'une trop grande dépendance.

J'ai mis cinq étoiles à ce récit sans l'ombre d'une hésitation. Les phrases courtes donnent un élan au texte. La cadence, la musique des mots est particulièrement harmonieuse. Même en choisissant les bas-fonds de l'être humain comme caisse de résonance elle ne perd rien de sa profondeur et de son intérêt.

Ce livre est une invitation à la réflexion et sans prendre position l'auteur nous demande implicitement de choisir la nôtre. Notre position. Donc je vais écrire la mienne :
Roger Gilbert-Lecomte avait tout pour être heureux et pourtant il ne l'était pas. Sa vie était tracée, il en a effacé les contours.Il était sincère. Donc ce qu'il possédait n'était pas grand-chose à ses yeux. Ce n'était rien même. Il n'est pas parvenu à détruire ce qui le faisait tant souffrir, ce qui l'a accablé quand il n'était qu'un enfant: « Ce dont l'homme est capable ». Il s'est lui-même détruit très jeune! Trop jeune ! avait-il d'autres choix ?



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Je remercie vivement les editions Flammarion ainsi que Babelio pour m'avoir permis cette double rencontre avec M.Megevand et Roger-Gilbert.C'est une très belle decouverte l'ecriture de M.Megevand est fluide,vivante,vibrante.il communique de facon extremement sensible l'ame dee de ce poète passionné qu'etait Roger-Gilbert-LecomteRoger-Gilbert.Personnage magnétique et fascinant.Son physique de dandy contraste avec sa force de caractère,sa détermination,sonrejet viscéral de la norme aliénante de la petite bourgeoisie.c'est un rebelle,voire un anarchiste dans sa quete de liberté.c'est un être en recherche de lumière et du besoin d'accéder à autre chose que le monde visible,celui"caché derrière le monde physique,un monde qui ne se substitue pas à l'autre mais bien deux realites qui cohabitent,l'une connue, superficielle et banale,et l'autre, inconnue,plus vaste et plus achevée que les mots ne peuvent contenir..."Pour atteindre ce monde,il aura très vite recours à des toxiques.ce qui n'alterera en rien son esprit brillant,fin et passionné qui n'a ni dieu ni maître mais des amis très chers.R.Vailland et R.Daumal qu'il rencontre au lycée,puis le peintre J.Dima et toute l'équipe Parisienne avec laquelle il creera la revue le grand jeu.Il est porté par le souffle de Rimbaud et sa volonté de "voyance".Matthieu Megevand nous introduit dans la vie de ce poète avec intelligence,nous fait partager ses combats,sa soif de vivre qui pourtant cohabitent avec une énergie de destruction: combat d'Eros et Thanatos ?!oncotoie.Breton,on le confronte par la verve du poete,on ne sait plus s'il existe finalement une frontière entre réel et irreli,raison et folie.Paradoxalement cette quête obsessionnelle de liberté devient presque une religion.Qu'un regard ou une parole viennent éclabousser sa soif d'idead et c'est l'eruption de la révolte qui effraie autant qu'elle fascine son auditoire.Je recommande vivement cette lecture à tous les amoureux de la poepoé,de la liberté,et de la résistance!
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Comme Éric Vuillard, qui s'empare des faits avec une précision déconcertante et un engagement total pour son sujet, Matthieu Mégevand propose une minutieuse reconstitution de la vie de cet Icare des lettres qu'a été Robert Gilbert-Lecomte, directeur de la revue, poète et noctambule effréné. Une vie entièrement consacrée à l'exigence et à la remise en question artistique. Et c'est cette vie, La bonne vie, multiple, à l'aura éblouissante, puis mortifère, que nous donne à découvrir avec un brio certain Matthieu Mégevand, rendant ainsi hommage et justice à un autre suicidé de la société.
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