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Critique de PatriceG


Colomba (1840)
Prosper Mérimée (1803-1870)

Le style est assez hautain, intellectuel, parfois jusqu'à l'excès, ce qui nuit au texte, -bon, c'est d'époque- mais Prosper sait où il va, l'affaire est rondement menée, haletante, dynamique, le drame est là, la vengeance corse ici suinte à toutes les pages, la femme est magnifiquement brossée, centrale même. Colomba est campée magistralement l'auteur lui fait une entrée triomphale. Si l'écriture de Mérimée est presque affectée, de l'extérieur, pourrait-on dire, elle ne cède pas au romantisme, on est même parfois dans le cynisme qui cache une réelle sensibilité d'artiste. Il faut dire que Prosper n'aime pas la sensiblerie. La froideur apparente de sa narration lui fut même reprochée par Hugo, même s'il convient de tempérer le jugement d'un confrère, les deux hommes en effet se vouaient une cordiale détestation. Et qui plus est, on voit que Mérimée est aussi formé, influencé par les autres cultures, les autres moeurs que française dont il porte la marque de ses nombreux voyages, sa moisson de haut fonctionnaire dont il est fier. Son imagination réelle n'est jamais fantaisiste, il se fie à ce qu'il voit, et il me semble impossible de le reprendre là-dessus tant il vérifie l'exactitude de ce qu'il avance.

Il a une solide formation d'historien, ses travaux sont remarqués et la porte de l'Académie lui est ouverte. La nouvelle est son fort, il le montre avec Colomba. C'est vraiment un grand nouvelliste, - pas vraiment renouvelé depuis- nouvelle qu'on pourrait assimiler à ce qu'on appelle abusivement roman aujourd'hui : sa nouvelle est nouvelle car elle s'articule autour d'un fait divers. . Aujourd'hui on ramène ça à je ne sais quoi, tout sens de la nouvelle en France est perdu ! A la fois la désinvolture, le sérieux et la passion violente sont au rendez-vous. Au plan littéraire, Prosper Mérimée est un incontournable..

"Miss Nevil regagnait l'auberge lorsqu'elle remarqua une jeune femme vêtue de noir, montée sur un cheval de petite taille, mais vigoureux qui entrait en ville.. La beauté remarquable d ela femme attira d'abord l'attention de Miss Nevil. Elle paraissait avoir une vingtaine d'années. Elle était grande, blanche, les yeux bleu foncé, la bouche rose, les dents comme de l'émail. . Dans son expression on lisait à la fois l'orgueil, l'inquiétude et la tristesse. Sur la tête, elle portait ce voile de soie noire nommé mezzaro, que les Génois ont introduit en Corse, et qui sied si bien aux femmes.."

"Elle (Colomba) était suivie d'une espèce de paysan, à cheval aussi, en veste de drap brun trouée aux coudes, une gourde en bandoulière, un pistolet pendant à la ceinture, à la main, un fusil, dont la crosse reposait dans une poche de cuir attachée à l'arçon de la selle ; bref en costume complet de brigand de mélodrame ou de bourgeois corse en voyage.."

Il y aurait tant à dire sur le brillant homme qui a mené de front deux carrières qu'il a embrassées avec une totale réussite. S'il fallait conclure ici, je dirais encore son amitié profonde pour Stendhal, et celle pour l'Impératrice, et son lien de fait avec l'histoire impériale.. Ai- eu le plaisir de re-relire Colomba (il me fut offert comme prix scolaire, éditions Sfil Poitiers, rouge cartonné ; illustrations R. de la Nézière..)
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