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Critique de Zora-la-Rousse


Il est ainsi des livres complexes, plaçant le lecteur en plein paradoxe : apprécier une très belle écriture mais pour un sujet des plus insoutenables.

Écrit à la première personne, le roman raconte la majeure partie de la vie de Rudolph Lang, l'homme qui deviendra le commandant du camp de concentration d'Auschwitz. Débutant en 1913, nous découvrons un jeune adolescent de 13 ans, grandissant dans une famille ultra-catholique et sous domination patriarcale. le père est l'incarnation pure de l'autorité suprême, intransigeant et omnipotent, violent et manipulateur. Il inculquera ainsi la discipline et l'obéissance à son fils, marqué comme au fer rouge.
Suite à un incident dans son école, au cours duquel un de ses camarades se casse la jambe, il choisit de confesser au prêtre de son établissement ce qu'il pense être de sa responsabilité, motivé par la crainte d'être réprimandé par son père. Malheureusement pour lui, ce qu'il voulait éviter se produit, et le traumatisme est tel qu'il tombe dans une forme de catatonie dépressive grave, à la suite de laquelle il reniera la foi chrétienne.

1914 marque le début de la 1ère guerre mondiale mais aussi pour Rudolph la mort de son père. A partir de ce moment, il n'aura qu'une obsession : rejoindre les combattants allemands et ce, en dépit de son jeune âge. Il finira par parvenir à ses fins et rejoindra l'unité des dragons de cavalerie. Là déjà, sa personnalité s'affirme : rigoureux, ferme et obéissant, dénué d'émotions. A sa démobilisation, il connaît la misère, le désoeuvrement et la frustration mais il découvre alors le parti national-socialiste d'Adolph Hitler. Intronisé au sein des SS par Himmler, il monte petit à petit les échelons, jusqu'à prendre la direction du camp d'Auschwitz pour y mettre en place une forme d'industrialisation de la mise à mort des détenus.

La mort est mon métier est un livre à la fois choquant et passionnant. Robert Merle fait là un grand travail d'analyse et de génèse en quelque sorte du parcours de Rudolph Lang (Hoess) en lien avec son développement personnel et psychique. Il n'y a là de la part de l'auteur aucune volonté d'expliquer voire d'excuser un comportement et des actions mais bien d'essayer de trouver des pistes pour comprendre comment un homme a pu en arriver là, à ce degré extrême de barbarie sans une once de regret ou de remords ?
J'ai eu le plus grand mal à considérer Rudolph Lang comme un homme ordinaire, porté à un très haut poste de responsabilité, avec pour seule explication sa capacité de soumission à l'autorité. Son absence totale d'humanité, à l'égard même de ses propres enfants, trouve pour moi d'autres origines pour compléter ce portrait glaçant, plus anciennes, plus primitives. Les derniers chapitres sont d'ailleurs effrayants de froids calculs sur l'organisation qu'il met en place pour répondre à la demande d'extermination d'êtres humains comme on traiterait de cafards ou de punaises, avec efficience…
La colère qu'il exprime (enfin une émotion!) à l'annonce de la mort d'Himmler résume par ailleurs son mode de pensée : il y a les donneurs d'ordres et les simples exécutants, et la responsabilité des actes incombent aux premiers. le Reichsfürher s'étant suicidé par ingestion d'une ampoule de cyanure, Rudolph se sent alors douloureusement trahi, abandonné par celui qu'il « respectait comme un père », comme une victime expiatoire. A lui revient de payer ce qui a été acté, douloureuse redite de son histoire avec son propre père...
A lire. Absolument.
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