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Critique de Laureneb


Difficile de commenter une oeuvre qui, si sa beauté formelle m'a saisie, si son importance contextuelle et historique m'intéresse, peut me rebuter par certains aspects, par certaines idées évoquées - il est vrai que je ne suis pas la lectrice visée, que je ne suis pas croyante, et qu'avec mon regard contemporain féministe, j'ai été hérissée et même plus par la quasi totalité des remarques sur Eve ; ce n'est cependant pas Milton, mais la religion catholique et la Bible elles-mêmes qui expliquent que les femmes sont des créatures inférieures, que tout le mal vient de la première femme, et que, par conséquent, les femmes sont destinées à souffrir, à obéir et à se taire, et qu'un homme cesse d'être un homme s'il écoute sa femme.
Ceci dit, j'ai d'abord été intéressée par la longue préface dans laquelle Chateaubriand explique comment il a traduit, qu'il a été sensible aux images plus qu'à la rigueur grammaticale, souhaitant être au plus prêt du texte poétique originel. Et j'ai été effectivement séduite par de nombreuses images très évocatrices : l'armée innombrable de démons avec leurs bannières qui claquent au vent, L Oeil qui guette et qui voit tout en haut d'une tour - serait-ce Sauron ? peut-être une inspiration pour Tolkien en tout cas, les démons changés brusquement en serpents sifflant et rampant, la Nuit et le Chaos, le Pêché fille de Satan, dévorée par des chiens qui sortent de ses entrailles... Dans ces images, on sent une culture humaniste, avec de nombreuses références mythologiques grecques et latines - notamment à l'Iliade et l'Odyssée, à la Muse d'Homère elle-même, mais aussi des rapprochements plus inattendus dans un poème biblique comme l'évocation des planètes ou de la lunette d'astronomie de Galilée. Oui, c'est très foisonnant, très riche, très évocateur, mais aussi parfois assez long - la narration prend souvent la forme de longues listes.
J'ai d'ailleurs préféré le début, celui sur la Chute de Satan et son long chemin pour s'échapper et revenir tenter et corrompre le monde et les premiers hommes. Néanmoins, peut-être parce que je suis plus sensible à son écriture, j'ai préféré sur cette thématique la Fin de Satan de Victor Hugo, autre long poème. Satan est une figure complexe, monstrueuse et fascinante au sens propre, c'est-à-dire qu'on ne peut en détourner le regard : séducteur, charismatique, orateur, intelligent... Ensuite, la partie sur le Paradis et le pêché originel m'a beaucoup moins plu, trop cu-cul ai-je envie de dire, surtout quand Adam et Eve passent leur temps à rien... ou plutôt, à prier, à cueillir des fleurs et à faire l'amour. Cela m'a surpris en revanche, il y a beaucoup de sensualité, l'amour et le désir physique sont évoqués.
Je n'ai pas toutes les références bibliques, mais ce récit est tellement fondateur dans notre culture que je connaissais les événements et que ce n'est pas très important de connaître tous les noms des démons ou des anges. Il faut le lire pour un mythe et un poème du XVI ème siècle, sans trop y projeter un regard actuel, pour en voir toutes les riches images évocatrices.
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