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Critique de critiquemoi


L'action se déroule en 1799, à Dejima, qui est un comptoir hollandais. Jacob de Zoet est un jeune clerc qui débarque sur ce territoire étranger, où la corruption et la cupidité de ses compatriotes est en train de faire le désastre de la compagnie. Il lui faudra déjouer les pièges déjouer par ses supérieurs, amadouer les japonais, et surtout parvenir à y voir clair dans ses sentiments : saura-t-il rester fidèle à Anna, qui l'attend aux Pays-Bas, ou succombera-t-il à la mystérieuse Orito, femme éclairée et vertueuse ?
Ce roman n'a pas mille pages, mais 750. On suppose donc qu'il a de nombreuses choses à raconter, et on fait confiance à David Mitchell, qui, dans le Fond des Forêts, roman magnifique et captivant, ou dans la Cartographie des nuages si visionnaire et poétique, a su démontrer toute l'étendue de son talent. Et c'est une grave erreur. Car les Mille automnes de Jacob de Zoet est une déception d'un bout à l'autre. D'histoire, tout d'abord, il n'y a pas. Certes, il y a bien une vague histoire d'amour, une confuse intrigue politique, et une description rébarbative des événements s'y rapportant, de près mais aussi de très très loin. D'intérêt, il n'y en a pas non plus. On a déjà vu des romans ne prenant tout leur sens qu'une fois le livre refermé. Ce n'est pas le cas des Mille Automnes, qui n'a aucun sens, sinon celui, purement littéraire, de prouver qu'il est possible en 2012 d'écrire sur des sujets n'intéressant personne des romans aussi longs et ennuyeux. Une terrible déception, donc, mais ce n'est pas tout.

Les mille personnages de Jacob de Zoet
Ainsi, il y a une vague intrigue amoureuse. Elle est vague, car, elle n'avance jamais, se perd mille fois en chemin, et se transforme en intrigue où interviennent religieuses, samouraïs et moines malsains. Elle est donc, cette histoire d'amour, un prétexte à un peu d'action, et après tout pourquoi pas ? En effet, le chapitre consacré au couvent mystérieux où sont recluses des nonnes livrées à des moines est le moins ennuyeux. Il aurait pu constituer d'ailleurs à lui seul un roman, même si de Zoet n'intervient pas une seule fois, et même s'il n'a pas réellement de fin (vous avez donc compris le problème). Il y a également une intrigue géo-politique, et c'est le plus difficile à suivre, bien que 500 pages lui soient entièrement consacrées : les affrontements entre anglais et hollandais, les complots entre hollandais et japonais, et la « bataille navale » finale sont interminables, soporifiques, et noyées sous les incessantes apparitions de nouveaux personnages (jusqu'à la fin il en apparaît de nouveaux). Même si le lecteur a bon fond et désire en venir à bout, il lui faudra relire plusieurs fois une même page pour comprendre qui est qui et qui fait quoi. le livre, qui fait donc 750 pages à la base, se transforme du coup en somme monumentale. Certes, on peut être habitué, surtout si on fréquente les auteurs russes, eux aussi très généreux en protagonistes et encore plus vicieux que Mitchell puisqu'ils utilisent sans prévenir le deuxième prénom ou le diminutif, à devoir se casser un tant soit peu la tête pour suivre un récit. Mais chez Mitchell, le lecteur n'est jamais récompensé de ses efforts, autrement que par un mal de crâne.
Beaucoup de questions sont abordées dans ce gigantesque roman. Des questions qui sont chères au coeur de David Mitchell, comme la question de l'esclavage, sont traitées de façon poétique et intéressante, mais trop brièvement pour que cela sauve le livre. D'autres questions, comme la loyauté, la langue (les interprètes jouent un rôle central dans le roman), le déracinement, sont soulevées, mais Mitchell n'apporte pas de réponse, il les laisse défiler à mesure qu'elles se posent, avant de les recouvrir par des détails et des descriptions sans aucun intérêt. Ce roman, trop ambitieux, ne repose sur rien d'autre que sur cette vaine ambition, celle d'écrire un pavé exotique, comme si Mitchell voulait faire revivre Conrad, Dumas et Jules Verne en même temps. La sauce ne prend pas, et l'action est tellement noyée sous une foule d'informations et de détails qu'elle en devient incompréhensible.
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