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Critique de chocobogirl


Kitaro est le dernier descendant de son espèce : celle des morts-vivants. Né borgne du cadavre de sa mère, sa destinée semble être bien noire, condamné à vivre seul dans un monde humain où personne ne veut de lui. Pourtant, cet étrange bonhomme possède quelques pouvoirs lui permettant d'affronter yokai et autres créatures et, ainsi, de protéger les hommes de leur fourberie.

L'histoire commence avec Mr Mizuki qui est chargé de faire la lumière sur une étrange affaire : un cas de zombie se serait déclaré des suites d'une transfusion sanguine. le donneur s'avère être son voisin et notre enquêteur découvre alors un couple de morts-vivants, derniers survivants de leur espèce. Suppliant Mizuki, ils obtiennent que ce dernier garde le secret jusqu'à la naissance de leur enfant. Quelques mois plus tard, il ne reste plus que 2 cadavres que Mizuki s'empresse d'enterrer. Quelle ne sera pas sa surprise quand un petit garçon sortira de la tombe ! Désormais sous la garde de ce dernier, le petit Kitaro étonne et effraie son entourage avant, bientôt, de prendre la route en compagnie de son vrai père, qui a survécu sous une nouvelle apparence, celle d'un globe oculaire sur pattes !

Depuis NonNonbâ qui a fait sa réputation, le grand public sait que Shigeru Mizuki est l'auteur qui a popularisé les yokai, en leur donnant une place centrale dans son oeuvre. Dans Kitaro le repoussant, il met en scène un petit mort-vivant qui, contrairement aux apparences, s'avère bénéfique aux hommes. En effet, Kitaro a l'art et la manière de communiquer avec les yokai et ses pouvoirs l'aident à combattre ceux de ces derniers qui souhaitent tourmenter les humains. Désamorçant les conflits, il règle les problèmes tantôt à la manière douce, tantôt à la manière forte. Jamais en colère ou énervé, Kitaro présente une figure toujours sereine et souriante et apporte finalement beaucoup de gaieté dans ses aventures que le lecteur est invité à suivre.
Au Japon, le personnage est d'ailleurs connu par tous les enfants qui s'amusent de la ruse avec laquelle Kitaro vient à bout de ces êtres parfois malfaisants.
Paru au Japon, entre 1959 et 1969, Kitaro du cimetière (Hakaba no Kitaro) s'inscrit dans la lignée des mangas d'horreur et de la littérature fantastique populaire dans les années 60 . On peut citer par exemple Tezuka avec son Dororo (1968) ou Edogawa Ranpo et sa Bête aveugle (adaptation cinématographique en 1969). Kitaro est un personnage difforme qui peut renvoyer à celle de l'auteur (manchot) mais qui, à sa façon, dédramatise la mort et la peur. le mort-vivant sert finalement de lien entre les vivants et les morts et tente de réconcilier ces deux mondes pas si différents. Il est à la lisière d'une société contemporaine qui s'oublie dans la modernité et d'une réalité plus traditionnelle qui reste attachée à un riche folklore fantastique.
Il faut rappeler que cette série prend place dans un Japon en pleine libéralisation qui se modernise trop rapidement en oubliant ses valeurs ancestrales. On peut d'ailleurs noter à cet égard la présence de monstres occidentaux, comme Dracula ou Frankenstein, qui tiennent le mauvais rôle en envahissant une île japonaise dont ils souhaitent faire leur repère. L'auteur ne peut être plus explicite. Mizuki nous rappelle donc ici que les esprits restent importants et qu'il est nécessaire de continuer à leur accorder une place dans un souci d'équilibre universel. Les yokai restent des êtres nécessaires qui rappellent aux humains leurs erreurs humaines en s'engouffrant tête la première dans leur moindre faiblesse.

Le trait de Mizuki s'accorde bien avec l'univers qu'il nous dépeint. A la fois naïf et parfois caricatural, il allège l'impact horrifique de l'histoire sans pour autant minimiser l'aspect étrange des différents monstres. La grande connaissance de Mizuki sur les yokai (rappelons qu'il a produit un Dictionnaire des yokai) permet à l'auteur d'en offrir une vaste palette : Ratichon, Simoune, Vieux-poupon, L'emmureur, etc. le choix est vaste et donne envie de poursuivre avec une série qui compte 11 tomes en version française.

Mélange de tradition folklorique et d'influence occidentale, ce premier tome de Kitaro le repoussant oscille entre histoire horrifique et série humoristique. Utilisant une certaine loufoquerie dans la succession de petites histoires qui mettent en scène Kitaro aux prises avec des yokai divers et variés, l'auteur compose une oeuvre qui se met au service de ces êtres qu'il affectionne tant et réussit à remettre au goût du jour un folklore en déclin. Une oeuvre qui ne vieillit pas d'un pouce et qui rappelle qu'il est bon de ne pas oublier les croyances ancestrales de sa culture.

A noter :
Dès 1968, la série a connu de nombreuses adaptations animées dont la première fut menée par Isao Takahata, cofondateur de Ghibli avec Hayao Miyazaki.
Lien : http://grenieralivres.fr/201..
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