Comment vous décrire tout ceci? J'ai le sentiment qu'à vingt-sept ans, moi, Shuntaro Natsume, je viens enfin de quitter le port, sur un bateau qui m'emmène... vers un avenir passionnant!
Travaille la terre et l'or te viendra.
Les élèves des lycées agricoles... Les vieilles dames qui cultivent leurs champs dans des coins perdus de montagne. Ce sont tous des gens qui souffrent parce qu'on leur a collé une étiquette de " personne inutile au bon fonctionnement interne de la société moderne ". Vous et moi, si nous le voulions, nous pourrions partir d'ici, dès demain. Mais tous ces élèves, à partir de l'instant où ils ont posé un pied dans l'enceinte de cette école, ils ont perdu tout espoir de pouvoir fuir. C'est pareil pour toutes ces vieilles dames... elles n'ont plus assez de temps pour pouvoir essayer de recommencer une nouvelle vie... Les gens qui vivent ici sont comme autant de petits îlots perdus au milieu d'un océan de tristesse.
Dans ce pays, quand on est paysan, on n'a que deux choix : Devenir esclaves du gouvernement et se couvrir de dettes pour agrandir ses propriétés, ou bien vivre et mourir pauvres.
La crise de l'agriculture... l'exode rural. Tout ça, ça a moins d'un demi-siècle ! Ce n'est rien quand on pense à toutes ces générations d'Hommes qui ont travaillé cette terre, et aux millénaires pendant lesquels elle les a nourris.
Toutes ces femmes, malgré leur âge, vont aux champs tous les jours, et en reviennent chargées de plusieurs kilos de légumes. Leur binette à la main, elles avancent vers leur mort. Seules ! Ce village est devenu un vrai cimetière.
Ce que vous êtes en train de manger, c'est une "vie" ! Et nous, les paysans, nous sommes les " ingénieurs de la vie " !
Les complexes sont le meilleur carburant pour l'esprit.
Vous savez, être paysan c'est un métier bien ingrat. Ce serait peut-être pas plus mal qu'il disparaisse avec les vieux comme moi...
Comme vous le savez sans doute, depuis plusieurs années, les relations que nous entretenons avec nos voisins se dégradent à grande vitesse. Et il y a de fortes probabilités pour qu'un jour - peut-être dans cinq ans, dix ans, qui sait ? - nos voies d'approvisionnement aériennes et navales soient d'une façon ou d'une autre, coupées ou fortement restreintes. Si cela devait se produire, je suppose que vous imaginez ce qui se produirait : Le Japon se transformerait en un gigantesque archipel de la faim !!