Aleks et son jumeau Brisco vivent paisiblement sur Petite Terre. A la mort du roi, Holund, ils décident d'assister à ses funérailles. C'est à cette occasion qu'un événement étrange survient : le prenant pour Brisco, le vieux roi s'adresse à Aleks et l'implore, désespéré, de faire « attention au feu qui brûle »… Mais Aleks n'aura pas le temps d'en parler avec son frère : lors d'une escapade dans la superbe et labyrinthique bibliothèque royale, quelques jours plus tard, ce dernier se fera enlever!
Car ce qu'Aleks et Brisco ignorent, c'est qu'en réalité, ils ne sont pas frères : Brisco est le fils caché d'Iwan, le fils du roi Holund assassiné par son cousin Guérolf !
On a déjà beaucoup loué la qualité de ce roman, tant au niveau de la narration que de l'histoire. J'y ai apprécié, comme dans La rivière à l'envers, la succession de mini-contes : celui de la sorcière Brit, du bucheron Rodione Lipine, du visionnaire Baldur… Mais j'ai particulièrement apprécié l'existence de plusieurs niveaux de lecture. En effet,
le chagrin du roi mort se prête volontiers à l'analyse : il serait intéressant d'étudier, par exemple, les dualités Aleks/ Brisco (d'abord jumeaux, donc doubles, puis antithétiques) ou Brit/ Louve, les références aux autres textes – la légende de Gudrun et l'histoire de Njall le brûlé… J'aimerais, ici, m'attarder un peu sur le titre – et, dans le même temps, dire « au-revoir » à tous mes amis lecteurs qui n'auraient pas encore lu ce roman et qui ne voudraient pas se le voir spoiler. Bises, à bientôt !
le choix du titre du roman indique que la clef se situe dans ce passage initial : la prophétie d'Holund. A quoi correspond ce « feu qui brûle » ? le personnage d'Aleks répond à cette question au moment de l'incendie de la bibliothèque : « Tu vois, maman, le roi me l'avait dit… Il fallait faire attention ». L'incendie de la bibliothèque est très symbolique : il s'agit d'un lieu de rencontres et de jeux, ainsi que la mémoire de Petite Terre . Sa destruction annonce, également , son assujettissement par l'armée de Guérolf.
Pourtant, quand, à la toute fin du roman, Aleks emmène Lia sur la tombe du roi Holund, il parle du « mystère du feu ». Par ailleurs, en quoi l'incendie de la bibliothèque concerne-t-il Brisco, alors enfermé sur Grande Terre ? le roman livre-t-il une autre piste ?
Il n'existe qu'un seul passage qui mentionne également un feu négatif. Peu avant la destruction de la bibliothèque, le lecteur suit un autre personnage: la bibliothécaire, Mme Holm. Elle détient un souvenir qui, comme elle, va périr dans les flammes : le goût d'Aleks et de Brisco pour l'histoire de Njall le brûlé, qui relate la mort des membres de la famille de Njall, brûlés vifs. le feu, ici, symbolise donc la destruction d'une famille. Et c'est justement ce qui advient dans la vie de Brisco, sommé de choisir entre ses deux familles adoptives : celle d'Aleks ou celle de Guérolf. Il choisira la seconde et cela l'entrainera à sa perte : à la culpabilité qu'il ressentira à avoir trahi son frère s'ajouteront, plus matériellement, l'impossibilité de retourner à Petite Terre – alors qu'il en est le roi légitime – et la condamnation à une vie solitaire en compagnie d'une mère-sorcière, dans « un château [qu'Aleks] imaginait délabré et glacial, [habité par] une femme blonde d'âge mur et un jeune homme, qui l'auraient hanté, comme deux fantômes tristes et oubliés de tous ».
Et je permets une dernière hypothèse : le « roi mort » dont il est question dans le titre renvoie, bien sûr, à Holund. Mais peut-être, aussi, à Brisco : condamné au remords et à la tristesse, roi sans royaume dont il est dit, quelques pages avant la fin : « ce qu'il était devenu était pire qu'être mort »…
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