Quand les gens disent une grosse bêtise, il faut leur répondre par une ÉNORME bêtise. Peut-être que comme ça, ils comprendront qu’ils sont bêtes ?
" Je ne sais pas si c'est dans votre goût , les mélanges de races mais je trouve que le petit Lazare est trop vilain de figure, quand ils ne sont pas trop noirs ça va ..."
Masquant son malaise à la vue des diverses entailles qui allaient du poignet à la saignée du coude, Sauveur tendit à Margaux sa boîte de Kleenex.
On ne sauve pas les gens d'eux-mêmes. On peut les aimer, les accompagner, les encourager, les soutenir. Mais chacun se sauve soi-même, s'il le veut, s'il le peut.
La plupart des gens préfèrent se faire mal en répétant les mêmes choses plutôt qu'expérimenter quelque chose de nouveau.
C'est mieux d'être Sauvé qu'être Sauveur.
« C'est mieux d'être sauvé, que Sauveur, fit Gabin, mi agressif, mi désespéré. »
Sébastien DB
-Papa, c'est grave si je n'ai que UN ami?
[...]
-UN ami? Mais c'est beaucoup ça!
Sauveur ouvrit la porte de la salle d’attente en douceur. Si les gens n’étaient pas prévenus, ils avaient un mouvement de surprise en l’apercevant.
— Madame Dutilleux ?
Madame Dutilleux arrondit les yeux et Margaux baissa les siens.
— Nous avons rendez-vous. Je suis Sauveur Saint-Yves. C’est par ici.
Il désigna son cabinet de consultation de l’autre côté du couloir puis s’effaça. En passant devant lui, madame Dutilleux, la quarantaine, menue dans son jean slim, resserra la ceinture de sa veste en cuir. Margaux, 14 ans, s’enrobant ou se dérobant dans sa doudoune, laissa flotter son écharpe de laine et ses longs cheveux.
Sauveur captait tous les signaux qu’envoient les corps, surtout à ce moment très intense de la première fois. Les quelques pas de Margaux et de sa mère pénétrant sur son territoire lui firent sentir l’hostilité de l’une et la méfiance de l’autre.
— Où on se met ? dit Margaux, la voix rogue.
— Vous choisissez… Mais vous me laissez mon fauteuil.
Sauveur avait la voix caressante de Nat King Cole vous chantant : « Unforgettable, that’s what you are… » Madame Dutilleux piqua des fesses sur un bord de canapé et se tint assise, le dos raide et les mains à plat sur ses cuisses serrées. Margaux lâcha son sac à dos et s’affala à l’autre extrémité du canapé, un bras dans le vide et son écharpe balayant le parquet. Ni l’une ni l’autre ne s’étaient attendues à un interlocuteur noir de 1,90 mètre, plutôt décontracté dans son costume sans cravate.
— Vous êtes docteur ? s’étonna naïvement madame Dutilleux.
— En psychologie.
Pfff, fit Margaux comme un ballon qui se dégonfle. Elle mourait de chaud. Les pointes du col de sa doudoune lui rentraient dans les joues. Mais pour rien au monde elle n’aurait fendu son armure.
— Mon cabinet est un peu trop chauffé, compatit Sauveur. Est-ce que tu voudrais me dire pourquoi tu es là ? Ta maman m’a parlé d’un « problème avec l’école ».
— Mais je voulais pas venir ! se récria Margaux. C’est l’autre, là… « L’autre, là » désignait manifestement sa mère.
— Ne le prenez pas mal, intervint madame Dutilleux, moi aussi, j’aurais autant aimé ne pas venir.
— Donc, vous êtes toutes les deux ici contre votre volonté, résuma Sauveur. Vous m’en voyez désolé.
Est-ce que les secrets qui vous entourent de leurs nuées vous empêchent de vivre, de grandir, d'aimer ? C'était la question qu'il se posait à propos de chacun de ses patients, Ella, Margaux, Blandine, Cyrille, Lucile, Marion, Élodie, Gabin. Ont-ils, avons-nous, besoin de tout savoir ?