La Ronde des Innocents

- Lorsque Saint Thomas d'Aquin étudiait à Cologne, il était si taciturne que ses camarades l'avaient surnommé "le grand boeuf muet de Sicile".
Un jour, lors d'une argumentation publique, il se montra si brillant que son maître Albert le Grand, se tourna tout ému vers ses élèves et leur prédit que "les mugissements de ce boeuf retentiraient dans tout l'univers".

La bénédiction me glissa dessus sans m'atteindre. J'avais toujours eu cette étrange impression que dans toutes les cérémonies - mariage, enterrement, baptême -, le prêtre sortait les mêmes banalités et lisait les mêmes textes bibliques tant de fois rebattus.

- ... L'homme est un animal citoyen et que la société doit toujours l'emporter sur l'individu.
- En clair ?
- Pour préserver le bien commun, il faut parfois sacrifier des individus qui pourraient le mettre en péril

Ce n'est qu'un an et demi après son arrivée à l'Institut que Julia avait commencé à découvrir l'étendue des pouvoirs de son fils. Alexandre lui avait parlé des tests qu'on lui faisait passer et lui avait révélé sa capacité à prédire des catastrophes imminentes.

Dire la vérité est utile à celui à qui on la dit, mais désavantageux à ceux qui la disent car ils se font haïr

Ce n’est pas parce qu’une cause produit ici un effet, qu’elle produira le même ailleurs

Cet individu si mystérieux que nous appelions Polyphème.
- L'homme à l'oeil de verre ?
- Oui.
- Pourquoi "Polyphème" ? Je ne suis pas sûr de comprendre.
- Par allusion à l'Odyssée d'Homère. Polyphème est le cyclope dont Ulysse crève l'oeil avec un pieu en bois.

C'est vrai qu'il est un lecteur assidu de Nietzche.
- Tu remets ça, avec tes philosophes ! De quoi il causait déjà celui-là ?
- D'absence de bien et de mal, du fait que tout est permis lorsque l'homme a mis au rancard les vieilles traditions et la morale. Enfin, c'est ce que j'ai retenu ...
- Voilà ce qu'on apprend à la fine fleur du pays ! Faut pas s'étonner après que toutes nos élites soient pourries ...

Le médecin dont ma sylphide m'avait promis la visite ne se fit pas attendre. C'était un homme au physique un peu inquiétant. Une dissymétrie très marquée du visage ainsi qu'un crâne démesuré donnaient à penser qu'il sortait d'un bas-relief maya. (p182)

Stéphane Laurens alluma la lampe de son bureau. Il ouvrit fébrilement un tiroir et en sortit une boîte de médicaments déjà bien entamée. Il fit tomber une pilule dans le creux de sa main, hésita un moment puis l'avala directement, sans verre d'eau, en s'enfonçant lourdement dans son fauteuil.
Voilà plusieurs semaines qu'il avait interrompu son traitement et il commençait à en payer les conséquences. Chaque fois, il espérai prendre le dessus. Il se disait que par la simple volonté, il parviendrait à se contrôler et qu'il pourrait faire taire cette voix en lui qui le rendait fou.