J'avais laissé une fille, je retrouvai une femme. Ses cheveux roux étaient cependant, comme je m'en souvenais, tressés de la même façon, ses taches de rousseur plus nombreuses que le scintillement de la voûte céleste, et aucun des changements que j'observai ne lui ôtait rien de sa beauté. Au contraire : le trésor dont j'avais été contraint de me priver avait prospéré pendant cette année.
"Edwig. Les années ont été clémentes avec toi.
- Combien j'espérais pouvoir t'en dire autant, petit frère".
Il ricane devant la préoccupation lisible sur son front plissé.
"Oui, c'est étrange : j'ai vu l'eau-de-vie utilisée pour préserver de la morsure du temps dans des bocaux des animaux morts, mais verse-t-on le même liquide dans le gosier d'un homme, son effet est l'exact opposé. C'est pourtant le prix à payer pour un remède à mon mal bien meilleur que celui que tu m'as donné."
Dans ma tête un orage fait rage et ma poitrine ne contient que du vide.
Ici, tout est si sombre. La lumière ? Des feux follets, rien d’autre. Tycho Ceton m’a proposé une issue. Peut-être. Que peut m’importer de ne plus être le même après, étant qui je suis aujourd’hui ? Des larmes de gratitude coulaient déjà sur mes joues quand je lui ai donné ma réponse. « Oui. Mille fois oui. »
Seule une plaie nouvelle peut cacher les cicatrices d’hier.
Aucun de nous n’avait goûté à la pomme de la connaissance, pourtant notre jardin d’Éden n’était plus le même.
[...] j'ai vu l'eau-de-vie utilisée pour préserver de la morsure du temps dans des bocaux des animaux morts, mais verse-t-on le même liquide dans le gosier d'un homme, son effet est l'exact opposé.
La seule façon de faire face à la douleur, c’est de l’ignorer.
« Vous savez, la plupart des gens ne semblent avoir aucune difficulté à appeler une bonne action par son nom quand ils y assistent. Ils paraissent capables de distinguer le bien du mal. Mais si faire ce qui est bien leur coûte un tant soit peu, ils préfèrent, sinon faire le mal, du moins s’abstenir d’agir. En tout cas tant que leur choix demeure secret, qu’il n’y a aucun témoin pour louer leurs qualités ou les accabler par leurs défauts. »
(...) les orbites n'étaient plus que des flaques rouges, la mâchoire pendait de travers et il ne restait plus qu'une bosse pleine d'éclats d'os à la place du nez. Dawis s'accouda au-dessus de lui pour écouter le gargouillis de sa respiration, puis haussa les épaules et lança des regards entendus aux spectateurs, qui tous se retournèrent démonstrativement tandis que l'aubergiste plaquait sa large main sur la bouche et le nez. L'homme à terre, à peine conscient, tenta gauchement de résister, mais Dawis le berça jusqu'à ce que ses talons cessent de marteler le sol et que sa respiration se taise.