Ma gorge en était étranglée. Ta voix me berçait. J'avais envie de toi, très envie. Tu me manquais tant en moi. Chaque flûte de champagne nous rapprochait un peu plus des étoiles. Je t'aimais comme jamais je n'avais aimé. Et je ressentais ton amour au bout de tes lèvres, de tes doigts que j'ai fini par poser sur ma cuisse nue, sous ma robe. Tu me murmurais des mots tendres et doux comme tes mains. Tu étais l'amour de ma vie. Nous étions des anges face à un monde vierge et pur pour nous.
Nous l'avons toujours dit, nous n'avons pas d'avenir, uniquement du présent. Chaque jour, chaque nuit, que nous passons ensemble nous en rapproche inéluctablement. Je le sais et toi tu l'as oublié comme tu as fini par oublier mon âge. Mais moi j'y pense depuis trois semaines alors que je suis boulimique de toi, de ce nous qui m'habite de plus en plus et me rend schizophrène.
Le Corbusier, ce sont les années trente, les années sobres et fonctionnelles, les années aux lignes pures et la découverte du béton sous toutes ses formes. L'entrée était judicieusement marquée par une palissade en bois verni de deux mètres de hauteur, séparant le lavabo et la cabine de douche de l'espace de vie. Un porte-manteaux, quelques étagères, un placard camouflé. C'était nu, sans fioritures, cela me correspondait bien. Déjà à l'époque, j'aimais vivre nue, je me sentais libre, je me sentais belle. L'exposition était idéale, la vue sur le parc arboré très belle et apaisante en ce mois de mai.
Cette nuit là, le monde nous appartenait et tout était possible ,tout, surtout le plus inimaginable. Cette nuit là, tu étais mon unique, mon seul amour et j'étais heureuse avec toi, dans tes bras, me laissant glisser dans tes caresses et tes mots. J'étais à toi à jamais mon amour.
« La différence d'âge était le dernier tabou, l'ultime limite, d'autant plus forte qu'elle restait la dernière, et qu'elle avait remplacé toutes les autres. Dans le monde moderne on pouvait être échangiste, bi, trans, zoophile, SM, mais il était interdit d'être vieux. »