Citations sur Mise en forme (42)
Mais la vérité est que les femmes peuvent disparaître en un claquement de doigts, sans s’aventurer nulle part, juste en étant là, vivantes.
La beauté est un territoire où l'on flirte avec la disparition pour apparaître
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En 2018, la plateforme YouTube répertoriait quelque neuf millions de chaînes actives sous le thème "santé et fitness". Les influenceurs se sont emparés du marché, rebaptise "industrie du bien-être". Plus que jamais, "s'entraîner, ce n'est pas que rester en forme : la frontière entre le fitness et le mouvement du sélf-help (ou la croissance personnelle, ou auto-aide) est devenue floue". Car, par le biais de ces activités, il est aussi de notre responsabilité d'entretenir notre santé mentale. Les vidéos que je consomme sont ponctuées d'interventions valorisant l'empathie envers mon corps, mes capacités. Le simple fait de m'engager dans l'activité de fitness est un pas dans la bonne direction, un accomplissement en soi; "rien qu'en étant ici aujourd'hui, vous avez déjà réussi", dit Amy. Le fitness serait le remède désigné pour guérir, parmi un ensemble de choix menant au mieux-être. [...] Dans une chambre blanche, pourtant toujours impure, je m'entraîne comme si j'allais sortir le mal de moi.
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Jeté en pâture aux autres, mon corps m'est inconnu. Je lui cherche une objectivité, mais il ne peut y en avoir, puisque la beauté réside dans le regard de celui qui regarde. Et j'oublie qu'il y a d'autres vérités du corps que la beauté ou la laideur , d'autres juges que ces étrangers.
À I'instar de leur décor qui embellit avec les années, parfois même d'une vidéo à l'autre, les influenceuses se font toujours plus « belles». L'ensemble de leur mise en scène évolue, devient plus léchée et uniforme. Leurs chaines formant un système cohérent d'images, leur apparence ne peut échapper à la scénographie. Mes entraîneuses se ressemblent de plus en plus entre elles, comme les studios dans lesquels elles se meuvent. Et les discours d'acceptation de soi qu'elles profèrent tombent par conséquent en désuétude. Alors pourquoi je les écoute ?
Deux choses restent à moi : la chambre et le corps. C'est dans l'une que je sculpte l'autre. Je le prépare dans ce lieu intime pour le livrer au monde une fois prêt. Une forme de structure m'encadre ici en tant que femme seule, qui ne peut plus se définir, qui erre. Je sais intuitivement que la mal-aimée, l'abandonnée, doit reprendre le contrôle de son apparence, puisque C'est sûrement dans son laisser-aller que s'est joué le désamour.
Cette faute que la société rejette sur les femnes en ca d'echec a même engendré un concept, le revenge boy. Apparemment, se venger par son corps veut dire l'amincir et le rattermir jusqu'à faire payer nos détracteurs par le désir ou la jalousie et, plus souvent, jusqu'à ce que notre ex regrette d'être parti ; c'est transformer « votre corps en couteau supersexy [qui] poignarde un ex ou la méchante de l'école secondaire ». En s'engageant à atteindre les standards de beauté, la femme délaissée redéploie son capital de séduction ; elle s'affine pour dévoiler son noyau, son cœur, pour que l'homme comprenne enfin ce qu'il a perdu.
Le concept s'est cristallisé dans la téléréalité Revenge Body With Khloé Kardashian, lancée en 2017. Khloé, qui a maigri et changé d'apparence de manière radicale à la suite de son divorce médiatisé en 2013, devient le symbole du corps vengeur.
De même, pour nous, les femmes, la perspective d'être vues en train d'arborer un corps qui se laisse aller nous incite à le tenir en laisse, chacune dans l'usine de la maison ou de la gym : ''Il en résulte une production de corps dociles qui se surveillent, s'évaluent et se disciplinent eux-mêmes."
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Ce n'était pas une peine romantique que j'avais, mais une peine-gastro, quotidienne, de laquelle on ne parle pas avec les autres, de même que la chiasse qui nous a gardés éveillés toute une nuit.
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Au terme de leur transformation, souvent subie et non choisie, les jeunes premières se ressemblaient toutes, façonnées selon les mêmes codes que, malgré moi, j'intégrais par ricochet.
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L'expression même, se mettre en forme, implique un éternel labeur, un chemin entre soi et soi au bout duquel le but ultime est sans cesse reporté. Et, bien que, dans les efforts consacrés à la quête du corps sublime, ''il devienne démesurément gratifiant que vos progrès soient remarqués (un kilo perdu, un compliment au sujet de votre teint)", la ligne d'arrivée apparaît comme un perpétuel mirage. Il n'y a pas de fin ; on n'est jamais mise en forme. (...)
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