Tout à l'heure, dans les toilettes des garçons, j'ai remarqué que quelqu'un avait écrit " le bahut c'est l'enfer" sur une des portes. J'ai sorti mon stylo, barré "le bahut" et écrit "la vie" à la place.
Quand on a eu un suicide dans la famille ça ne semble pas trop absurde de penser que cela pourrait se reproduire. On commence à y penser comme au virus de la grippe. On a peur que ça se propage.
Sur la petite annonce, l'appartement était décrit comme ayant "1 chambre + 1 pièce détente". Je dors dans la pièce de détente. Je pense que c'est une faute de frappe et que le proprio voulait dire, en fait, "1 placard".
Pourquoi tu t’appelles Alberta ? Pourquoi pas Saskatchewan, ou Manitoba ?
Nous essayons en permanence de fuir. Mais nous n'arrivons pas à nous cacher.
LE SAVIEZ-VOUS ? Les orques se déplacent en meutes. Chaque meute a sa propre série de cliquetis, sifflements et cris. Cela renforce la cohésion du groupe.
C’est exactement pareil à la rentrée des classes : une flopée d’enfants terrifiés arrivent d’un peu partout, et en l’espace de quelques semaines, ils forment leur bande.
Il pleurait. En fait, il sanglotait plutôt. Mon père est un grand sensible. On se moquait de lui parce qu’il avait toujours la larme à l’œil presque chaque fois qu’il regardait la télé, même pendant les publicités de Tim Hortons. Ma mère disait qu’il était comme un After Eight : croquant à l’extérieur, mais fondant à l’intérieur. […] Je ne suis pas fou. Je sais bien ce qui lui a traversé l’esprit quand il est arrivé et qu’il s’est aperçu que je n’étais pas rentré. Une famille qui a connu un suicide redoute toujours que ça ne se reproduise. C’est comme le virus de la grippe : il peut se propager. (p. 103)
Quand je suis arrivé chez nous, il était presque six heures. J'ai entendu papa avant de le voir. Il était au téléphone.
-Cheveux roux frisés, environ un mètre soixante...
J'ai failli crier soixante et un !
-...je le sais bien, que ça ne fait que deux heures. Mais vous ne comprenez p...
Je suis entré dans le salon. Il faisait les cent pas en se passant une main dans les cheveux, comme il le fait quand il est anxieux ou stressé. Il avait encore ses grosses chaussures de chantier aux pieds, elles mettaient de la boue partout sur la moquette.
Son regard a croisé le mien.
-Laissez tomber. Désolé. Il vient de rentrer.
Est-ce que ce ne serait pas génial si on pouvait écrire le scénario de sa propre vie ? Je suppose qu’il y aurait beaucoup moins de suspens qu’au cinéma. Mais au moins, on pourrait s’écrire un happy-end.
Il a eu une longue conversation avec mon père avant ma première séance, et je suis prêt à parier mon poster du Danois qu'il s'est empressé ensuite de googler toute l'histoire. Et une fois qu'il a eu fini de lire tout ce qu'il pouvait trouver, je parie qu'il s'est demandé pourquoi mes parents ne m'avaient pas envoyé en thérapie immédiatement après ÇA, il y a sept mois et demi.
Je le vois d'ici : «Sapristi ! Ils ont mis le temps !»