- Tu m'épouseras donc, dit-elle, quand tu auras trois ans de plus?
Et, comme je la regardais pour m'assurer de l'effet que mon petit discours avait produit sur elle, je m'aperçus qu'elle sautillait, sautillait, et qu'elle souriait d'un air de satisfaction qui n'était pas sans malice. Tout à fait rassuré sur sa santé et sur son bonheur qui tenait à si peu de chose, je me laissai retourner au penchant de ma gaieté de jeune homme avec un entraînement dont, à dire vrai, je n'étais pas tout à fait le maître.
- Oui, divine Belkiss, m'écriai-je en lui tendant la main en signe de fiançailles, je vous promets, par ces constellations éclatantes du Sud et de l'Orient qui baignent maintenant de leurs lumières argentées les vastes Etats que vous possédez dans les royaumes favoris du soleil, que je vous épouserai dans trois ans, si mon père et mon oncle y consentent, ou si leur absence prolongée contre tous mes voeux me permet alors de disposer de moi-même. Je vous le promets, princesse du Midi, à moins que votre auguste famille, dont vous venez de me révéler les titres imposants, ne porte obstacle à la mésalliance, peut-être unique dans l'histoire, qui introduirait un simple garçon charpentier dans la couche d'une personne royale.
En achevant ces derniers mots, je mis un genou en terre et je baisai respectueusement la main blanche de la Fée aux Miettes, qui dansait si haut que j'étais obligé de la retenir, de peur qu'à force de s'élever elle ne m'échappât tout à fait.