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Dans Si je meurs au combat, passé pour être devenu un classique sur le conflit Nord-Vietnamien, Tim O'Brien nous raconte sa guerre, l'horreur au quotidien pour lui et quelques uns de ses camarades et l'allégresse voire la délectation pour certains autres. Certains autres à qui, soulignons-le, on n'aurait même pas confié un crayon de bois à surveiller chez eux aux États-Unis et qui se retrouvent à diriger des divisions entières au Vietnam. Avec le recul et sachant cela, il apparait évident que ça ne pouvait qu'immanquablement conduire à des tragédies comme le massacre de My Lai (que quelques galonnés arrivent encore – un tel niveau d'indignité, ça me dépasse – à justifier, comme quoi que voulez-vous, c'était la guerre ma bonne dame... Par contre l'offensive du Têt par le Viet-Cong et l'APVN, alors là, non, pas d'excuse ! pas de quartier ! kill 'em all !!)

Tim O'Brien, envoyé là-bas alors qu'il n'était qu'un tout jeune étudiant et presque prêt comme des milliers d'autres à déserter au Canada et puis finalement non, apporte un témoignage précieux sur cette foutue trouille qui ne le lâche jamais, sur les amitiés qui se tissent, souvent improbables mais tellement bienvenues, sur l'incompétence de nombreux gradés, sur les drogues qui aident un peu à supporter et sur la littérature dans laquelle il trouve une échappatoire salutaire. Et enfin le retour au pays, sauf et presque sain.

Seul regret pour ma part, j'aurais parfois aimé quelques développements plus approfondis, My Lai par exemple doit se contenter de quelques pages et se concentre surtout sur l'ardeur que met un commandant gueulard à refuser de comprendre où se situait exactement le problème avec ce massacre (je précise tout de même que Tim O'Brien n'était pas au Vietnam lors de ce carnage, malgré tout puisqu'il a commencé à en parler...)
D'autres situations sont ainsi survolées qui auraient (peut-être) méritées qu'on s'y arrête un peu plus longuement. Malgré cela, Si je meurs au combat reste le témoignage sincère d'un jeune soldat qui n'a pas perdu les pédales une fois son bioutifoul AK-47 entre les mains, s'est posé les bonnes questions, y a parfois trouvé des réponses, parfois non, et nous livre finalement une analyse solide, pertinente et idéalement antimilitariste.

« Si seulement ce livre pouvait prendre la forme d'un plaidoyer pour une paix éternelle, un plaidoyer écrit par une personne qui sait de quoi elle parle, par une personne qui était sur le terrain et qui est revenue, un vieux soldat qui repense à une guerre en train de mourir !
Ça serait bien. Ça serait bien de pouvoir tout intégrer afin de persuader mes plus jeunes frères, et peut-être aussi d'autres personnes, de dire non à la guerre et à toute forme de combat. »
Tim O'Brien
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J'avais hâte de pouvoir lire une autre oeuvre sur la guerre du Vietnam, période historique qui me fascine à tous points de vue.
C'est donc l'histoire d'un homme comme des milliers d'autres : il veut s'engager au nom de son pays mais ne comprend pas vraiment les enjeux de cette guerre dans la jungle, si loin. Il doute, a peur surtout et envisage la désertion, mais renonce et part au combat. Il se fait des amis, tout en sachant que ceux-ci peuvent sauter sur une mine avant que la nuit ne tombe. Il est horrifié des exactions commises sur les civils, mais pris dans la tourmente de cette guerre horrible il accepte, impuissant. Il marche les yeux rivés sur la terre vietnamienne, incapable de savoir si une mine est enterrée à deux pas. Il se demande ce qu'on ressent, quand ça nous arrive, de marcher sur une mine.
J'ai donc surtout aimé le caractère profondément humain et "normal" de cet homme. Ce n'est pas un sur-homme, qui ne ressent pas la peur. Il fait juste en sorte de survivre à cette journée et à celle d'après, histoire de rentrer aux Etats-Unis. Et c'est déjà beaucoup.
J'ai trouvé ce roman incroyablement juste dans le ton, pas trop dans le pathos, mais pas trop léger. Juste bien. En effet, les événements sont suffisants pour inspirer l'horreur et la compassion, nul besoin d'en rajouter. Et un peu d'humour là où il en faut.
L'auteur décrit également les supérieurs, ces lieutenants si différents les uns des autres. Il raconte ce qu'on ressent, la nuit, enterré dans la forêt et qu'on guette le Vietcong. Exprime ses doutes avant de partir, son incompréhension, ses sentiments contradictoires. Relate ce monde du Vietnam où chacun se raccroche au nombre de jours restant à tirer. Où chacun se démène pour obtenir un boulot tranquille à l'arrière.
La fin m'a vraiment beaucoup émue, je l'ai trouvée absolument parfaite. Ce moment où le soldat survole pour la première fois depuis un an le sol américain...
Encore une très belle découverte de la littérature de guerre !
Lien : http://lantredemesreves.blog..
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« Mettez-moi dans une boîte et renvoyez-moi à la maison ». C'est là le sous-titre de ce poignant recueil de nouvelles autobiographiques de Tim O'Brien. Originaire d'une petite ville du Midwest autoproclamée « capitale mondiale de la dinde » et qui compte de fait plus de dindes que d'habitants, O'Brien, alors étudiant, est appelé sous les drapeaux durant l'été 1968. Il fera son temps au Vietnam, après ses classes, en 1969 et 1970 et en reviendra avec une partie des nouvelles de ce recueil.
Les amateurs de combats héroïques en seront pour leurs frais, tout comme d'ailleurs les zélateurs d'un discours totalement opposé.
Tim O'Brien est un pur produit de l'Amérique des années du baby-boom. Philosophiquement opposé à la guerre du Vietnam, il est aussi un enfant qui a grandi dans le culte des vétérans de la Seconde Guerre mondiale et même de celle de Corée. Cela signifie quelque chose dans cette Amérique et certainement plus encore dans la petite ville d'Austin, Minnesota, où tout le monde se connaît et où le patriotisme est une valeur cardinale. Certes, Tim O'Brien, étudiant féru de philosophie peut trouver la guerre menée par son pays au Vietnam mauvaise, mais Tim O'Brien, fils de la famille O'Brien, d'Austin, capitale mondiale de la dinde, ne peut que difficilement refuser d'y aller et, ce faisant, faire honte à sa famille et à sa communauté : « Comme des aimants, tous ces trucs tiraient d'un côté ou de l'autre, presque comme des forces physiques qui ajoutaient de la lourdeur au problème initial, de sorte que, au bout du compte, c'était moins la raison que la gravité qui prenait vraiment le dessus. »
C'est d'abord tout cela que raconte Tim O'Brien : les doutes, la peur, la pression sociale, et un projet de désertion avorté. Puis les classes, et enfin le Vietnam, les mines antipersonnel à travers un inventaire à l'ironie morbide, les embuscades – les vraies et les fausses que l'on monte ou pas pour satisfaire un officier dans son bureau –, les combats parfois, courts et meurtriers et pas seulement à cause de l'ennemi, la ségrégation de fait dans l'armée américaine, la peur, le courage, la peur de manquer de courage, la méfiance qui peut virer à la haine entre américains et population vietnamienne…
Tim O'Brien n'a aucune envie d'être là mais il y est pourtant et, porté par ses convictions, en particulier celle qu'il n'a rien à faire dans ce pays, pas plus que ces camarades, mais aussi celle qu'il n'a vraiment pas envie d'y mourir, il décrit avec précision ses états d'âmes comme les événements auxquels il assiste. Il y a là l'ennui de la guerre, la façon dont tous les honneurs ne peuvent effacer l'image d'un corps déchiqueté ou l'humiliation d'un vieil homme. Avec une écriture sans fard mais évocatrice, il dit ce qu'il voit et ce qu'il pense. C'est la guerre vue à hauteur d'homme et c'est moche.
« J'observais le sergent-chef. Il a fait marche arrière, s'est accroupi, et de la poussière et un nuage de fumée rouge sont montés dans les airs, tout autour de ses cuisses. Il s'est redressé et il est resté bouche bée en voyant la brève explosion. Il n'a rien dit. Comme s'il essayait de se protéger des éclats d'obus et de tout ce raffut, il a fait trois pas en arrière. Là, ses jambes se sont désagrégées sous son poids et il est tombé sur le dos comme une masse.
Ça a explosé juste sous ses pattes. Personne ne s'est senti vraiment triste quand l'hélico a atterri et qu'on l'a foutu à bord. »
Profitons-en au passage pour saluer le superbe travail de feues les éditions 13ème Note qui ont su, quelques années durant, dénicher de magnifiques textes et leur offrir un bien bel écrin. Au fond, c'est un peu tout le livre de Tim O'Brien qui est résumé dans la photo de couverture de Don McCullin représentant ce soldat hagard et qui pose plus de questions qu'elle n'offre de réponses.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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[Lu en février 2012]

Si je meurs au combat raconte la guerre du Vietnam telle que l'a vécue Tim O'Brien, de ses classes jusqu'à son arrivée sur les lieux du conflit, entre 1968 et 1970. Paru seulement 3 ans après ce retour, en 1973, le roman a été plutôt inattendu, alors que le conflit était encore bien frais dans la mémoire des américains (les dernière troupes se sont retirées en 1972).

Ce que j'ai le plus apprécié dans ce récit, c'est la façon dont Tim O'Brien raconte ou décrit chaque instant de cette guerre, avec précision et sans prendre de gants, pour être au plus près de son expérience traumatisante et mieux la faire comprendre. Il décrit par exemple, et d'une manière qui peut paraître assez froide, les différents types de mines qui existent, et ce qu'elles coûtent quand on marche dessus. Il décrit également les différents lieux dans lesquels sa compagnie (la compagnie Alpha) devait se rendre pour diverses opérations, en insistant sur l'aspect hostile, car souvent inconnu et bourré de pièges, de ces lieux (lieux qui plus est en pleine nuit quand toute utilisation de lumière est synonyme de mort certaine). de ce fait, même s'il raconte avant tout son histoire, il raconte aussi, par ce regard très précis et parfois détaché, l'histoire de tous ces soldats qui ont été envoyés de force au Vietnam, pour une guerre dont ils ne comprenaient pas le sens (il a d'ailleurs lui-même longuement songé à déserter avant de faire ses classes, allant même jusqu'à préparer ses affaires pour partir au Canada).
Un extrait sur les types de mines, comme développé plus haut :
"Ce qu'on redoutait le plus, c'était le Bouncing Betty, l'une des mines les plus courantes. La Bouncing Betty surgit de son petit nid enfoncé dans la terre, et quand elle arrive au plus haut, elle explose - efficace et mortel. Quand le type a du bol et que la mine est là depuis pas mal de temps, qu'elle a été exposée à la pluie, il pourra peut-être voir ses trois dents sortir de l'argile. Les dents servent de détonateur. S'il marche dessus, le soldat malchanceux entendra une explosion sourde - il s'agit de la charge initiale qui envoie la mine à un mètre dans les airs. le type fait encore un pas, commence celui d'après, et puis il a tout l'arrière en sang et ça y'est, il est mort. On appelle ça "le bon vieux pas et demi".

Malgré tous ces instants de désespoir dus au fait de voir des camarades mourir au combat et d'avoir des difficultés à survivre, Tim O'Brien revient également sur des instants de bonheur, de répit, qui l'ont sauvés de la folie, risque pour chaque soldat face à des conditions inhumaines : les rencontres marquantes qu'il a pu faire pendant ses classes, ayant notamment pour conséquence la tenue d'une correspondance avec un de ses camarades. C'est justement cette correspondance et cette expérience de la guerre qui vont le mener ensuite à l'écriture quand il rentrera aux Etats-Unis.
Un autre extrait qui montre justement un des moments d'accalmie de la compagnie Alpha :
" le premier mois au sein de la compagnie Alpha a été une période assez particulière. C'était surtout des vacances. On se baladait sur les plages, à l'extérieur de Chu Lai, on faisait des patrouilles de garde et très peu d'embuscades nocturnes. Ce dont rêvaient tous les soldats. Il n'y avait pas de Viet-congs, pas de mines, il y avait du soleil, l'eau où l'on se baignait était bien chaude, on se faisait approvisionner deux fois par jour en lait et en bières. On formait une sorte de cirque ambulant. Toute une file de gosses et de nanas du coin nous suivait d'un banc de sable à l'autre, et tout ce beau monde essayait de nous refourguer du Coca, des photos de cul, nettoyait nos armes, et tout ça en échange d'une boîte de ration C. Pendant la journée, on jouait au foot. Il y avait deux ou trois amoureux qui traînaient sous leur poncho avec des Vietnamiennes. "

Ce qui est également intéressant dans ce récit, c'est qu'à aucun moment, Tim O'Brien ne prend véritablement parti pour ou contre cette guerre en particulier : il la décrit, tout simplement, en tant que soldat qui l'a vécue. La conclusion de son récit reste cependant sans appel, autant pour la guerre du Vietnam que pour toute autre guerre : c'est une action inhumaine, qui n'a aucun sens, et jamais réellement de véritable "camp" meilleur qu'un autre. C'est ce que montre le récit qu'il fait de son passage à Pinkville (My Lai), zone particulièrement dangereuse, dans lequel a eu lieu le massacre tristement célèbre de civils vietnamiens, en mars 1968, un mois avant l'arrivée de sa compagnie.

Un récit vraiment poignant, dont on a du mal à se détacher (je l'ai lu en un ou deux jours) et que je conseille fortement. L'écriture est à la fois passionnée, nous présentant un jeune homme en devenir, qui va se forger grâce (ou à cause) de cette guerre, et documentaire, en ce qu'elle décrit le plus minutieusement et froidement possible cette même guerre.

Pendant ma lecture, j'ai pensé immédiatement à Full Metal Jacket, film réalisé par Stanley Kubrick et sorti en 1987. En effet, là aussi nous assistons à la préparation éprouvante des futurs marines avant de partir au Vietnam, puis aux combats proprement dits, ainsi qu'aux répercussions psychologiques qu'a pu induire cette guerre sur toute une génération de jeunes américains qui n'y étaient que rarement partis de leur plein gré.
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Je n'ose même pas imaginer l'horreur que cela doit représenter que de décrire et traduire avec des mots les atrocités vues et vécues au cours d'une guerre. Quelle qu'elle soit.
Quand ici Tim O'Brien nous décrit avec précision les effets dévastateurs de tous les types de mines disponibles ou bien les pièges imaginés par chacun pour mieux affliger l'adversaire de blessures (physiques et morales) irrémédiables. Les images de corps meurtris et mutilés se gravent de manière permanente dans l'esprit des témoins, compagnons d'armes et d'infortune envoyés au champs de bataille.
La guerre s'insinue partout. Prend d'assaut toutes les failles et faiblesses de ceux qui la vive. Elle ne rend à la vie que les fantômes des hommes qu'elle a prit.
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Après avoir vu Platoon d'Oliver Stone, j'ai eu l'impression de lire le roman qui avait donné naissance au film. Mais une différence de taille, ce jeune étudiant américain qui part au Vietnam n'est pas si enthousiaste, il envisage même toutes les possibilités pour fuir avant le départ. Avec ce récit de Tim O'Brien, on est au plus près de la guerre vécue par le simple soldat. Les classes, la chambrée, la difficile cohabitation avec les autres, et puis la découverte du Vietnam, l'ennemi invisible, la peur omniprésente, l'ennui, l'attente et soudainement, l'irruption de la violence. C'est sans concession, c'est un excellent récit pour dénoncer l'absurdité de la guerre.
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Après un entraînement qui fera de lui un soldat, O'Brien est appelé pour servir sous le drapeau. Talonné par sa conscience, il passe à un cheveu de déserter mais se rend finalement au Vietnam. Son quotidien consiste à éviter de piler sur une mine, creuser des tranchées et surveiller le ciel illuminé par les explosions la nuit. La vie de soldat n'est pas de tout repos et, au fil des mois, il voit plusieurs de ses potes —ou ce qui en reste— être emportés par l'hélico-ambulance.

Si je meurs au combat nous amène sur le champ de bataille et nous fait vivre la guerre, avec tout ce qu'elle a d'illogique et d'effrayant. C'est le récit d'un type qui a peur, qui ne comprend pas ce qu'il fout là et qui espère être envoyé à l'arrière, là où l'on fait un boulot peinard sans craindre de recevoir un mortier sur la tronche. Après avoir été inondé d'histoires abracadabrantes sur le Vietnam, ce livre brille par son aspect anodin. Et c'est sans doute son point le plus fort : l'aspect anodin de se retrouver coincé dans une technocratie qui se nourrit d'hommes et qui en sacrifie un de temps en temps.
Lien : https://alaincliche.wordpres..
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