AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Krout


Krout
21 septembre 2016
J'ai approché Yôko Ogawa par La formule préférée du professeur : dont je mentionnait dans ma critique : "Parfait comme ce petit livre qui dans mon firmament vient rejoindre pas moins que la planète du Petit Prince." C'est dire si je ne m'attendais pas nécessairement qu'une rencontre aussi magique se répète avec Hôtel Iris. Mon expérience avec St Exupéry a été qu'aucun de ses romans ne m'a jamais emporté aussi haut que le Petit Prince. Ce n'est donc pas une déception, loin s'en faut ! J'ai vraiment beaucoup aimé cette plongée dans un univers complètement différent dont seule la beauté de l'écriture est commune.

C'est l'histoire d'une Lolita de 17 ans, quand même, qui est troublée par l'éclat de voix d'un homme, de 50 ans plus âgé, sur une prostituée qu'il jette dans le plus simple appareil hors de sa chambre d'hôtel où elle Mari, fille de la propriétaire, opère comme réceptionniste. Troublée au point de pister l'homme un dimanche après-midi quand elle l'aperçoit lors d'une promenade en ville dans cette station balnéaire au Japon. Le suivre évidemment jusqu'à ce qu'il s'en rende compte, au point que la rencontre ait lieu et d'apprendre qu'il est traducteur de Russe vivant seul sur l'île d'en face... C'est le début d'un étrange amour...

- Etrange jusqu'où ?
- En amour, cela ne peut être que jusqu'au bout.
- Attachée à ce point ? A un vieux de 67 ans ?
- Oui mais Mari, son papa est mort lors d'une rixe lorsqu'elle avait huit ans et son papy peu après.
- D'accord, mais attachée ?
- Il faut savoir que Mari, sa maman n'a jamais voulu autre chose qu'une fille docile. A 17 ans si souple, encore si malléable.
- Et lui, sa femme morte de façon tragique et mystérieuse ?
Ah, comme Yôko Ogawa, m'interpelle. Et qu'il est difficile de ne pas juger !

Etrange plongée dans une aquarelle. Fascinant Japon où l'écriture est un art, l'emballage aussi et les bouquets naturellement : Iris. Et puis, plus troublant, le kinbaku*. Trouble des sentiments, trouble des sens, découverte du corps, voilà où nous entraîne cette belle écriture sensuelle empreinte d'un profond érotisme et d'une grande connaissance de l'âme humaine et ainsi l'on se retrouve, sans même vraiment s'en rendre compte, enchaîné à cette histoire et exposé à nous-même. Obsédant, déstabilisant, jamais glauque.

Mais pour Mari la plongée est douloureuse et dangereuse, car le traducteur a parfois des montées de colère froide qu'il ne contrôle pas. Et comme il n'y a rien de plus beau qu'un amour tragique, on ne peut s'empêcher de trembler, jusqu'à la fin. Tenter de reprendre son souffle... à la limite de l'asphyxie, et s'interroger pendant et encore après. Du grand art, je dis !

* J'en ai appris des nouveaux mots sur ce site comme BDSM, et moi, pauvre clown qui croyait que c'était une BD sado-maso. Pas du tout ! Heureusement, il y a wiki.
Par hasard j'ai aussi trouvé le mot kinbaku dans une autre critique alors j'ai été regarder sur le net avant de l'utiliser et voilà ce que j'ai trouvé :
"Le kinbaku, tout comme le shibari, est une pratique éroticisée dérivant de l'hojojutsu. Les méthodes autrefois utilisées pour restreindre des prisonniers ont été légèrement modifiées pour jouer sur la frontière entre douleur et plaisir... l'intention initiale de torture devient un élément consensuel dans le cadre du BDSM."

Etrange Japon qui continue à me fasciner...
Commenter  J’apprécie          501



Ont apprécié cette critique (44)voir plus




{* *}