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Critique de brumaire


Quoi de plus instructif à trois semaines du grand raout présidentiel que de lire ce réjouissant polar de Jean-Hugues Oppel. Avec précautions d'usage cependant . Les indécis, les mous du genoux, les complotistes hypocondriaques éviteront cette lecture sous peine le 23 avril d'aller à la pêche....Bon de toute façon ils seraient allés à la pêche...
Remontons le temps. Nous sommes en 2002. C'est la première élection du nouveau quinquennat (adoubé tant par Chirac que par Jospin et les parlementaires issus de la dissolution de 1995 ) qui devait éviter toute nouvelle cohabitation mortifère en juxtaposant un Président et une chambre de même couleur politique puisque élus dans un laps de temps très court. A cette époque lointaine (quand je pense que certains babeliens sortaient à peine de l'enfance :-) le Président Chirac traînait une conséquente batterie de cuisine . Son immunité le protégeait certes des investigations des Juges mais Anastasie affûtait son couperet car elle savait qu' à moins d'être réélu pour cinq ans le Jacquot il allait devoir rendre des comptes.
C'est le postulat de départ de Jean-Hugues Oppel : le "Champion" (Jacques Chirac) doit être réélu, impérativement. Car en face il y a le" Challenger" (Jospin) qui peut se targuer d'un bon résultat, au moins économique. Et le jeu est plus qu'indécis..... Face à Jospin au second tour (faut pas rêver...la pomme de 1995 a fait long feu, elle est dans un état de pourrissement avancé....) Chirac risque d'être battu. Il faut donc tout faire pour que le Challenger ne soit pas au second tour. Fastoche. Il y a dans le monde politique de notre beau Pays un fanfaron trublion , pas de la première fraicheur ( député sur la liste Poujade en 1956) mais dont les idées ont réussi pénétrer le corps social : stop à l'immigration, stop à l'insécurité, de la poigne, retour aux valeurs etc etc... C'est le "Tribun" alias Jean Marie le Pen of course .
Il DOIT être au second tour ! pourquoi me diront les babeliens qui n'ont pas connu ce temps là ? hé hé.... au second tour tous nos démocrates républicains de gauche ayant voté le "Challenger" (Jospin) et les trois candidats de centre gauche, de gauche-écolo,de gauche trotkiste,d'extrême gauche se reporteront comme un seul homme sur notre Champion, même lesté d'une batterie de cuisine digne de Top Chef...., pour éviter le FASCISME ! si.
Et pour que le "Tribun" soit au second tour il faut mettre le paquet sur un thème chéri des français : l'INSECURITE. Vu que c'est sa marque de fabrique.
Ainsi va le bouquin d'Oppel. Une agence de consulting menée par trois jeunes loups aux dents longues (cliché), est chargée d'influencer les médias audiovisuels et écrits . Car quoi de mieux qu' une émeute dans les "quartiers difficiles" en ouverture du JT ? quoi de mieux qu'un braquage qui tourne mal en premières pages d'Aujourd'hui en France ? Et c'est vrai que dans ces années là (je me souviens...) la concurrence était vive . Jean Pierre Pernault en oubliait presque les reportages sur les derniers façonniers de pipes de Saint-Claude (Jura).
Jusque là Jean-Hugues Oppel reste dans le "possible" (on sait tous que les candidats ont à leur service des tas de "consultants" et autres agences de "com") , mais pour le "fun" (mais peut-être en est-il persuadé) Oppel intègre à son roman une dimension complotiste qui m'a certes séduit mais qui n'est qu'une hypothèse : En haut lieu (que nous ne connaîtrons jamais) est décidé que le basculement de l'opinion en faveur du "Tribun" ( plus il y a de voix pour lui moins il y en a pour le "Challenger") doit être "boostée" par un évènement hors normes qui fasse prendre conscience au bon peuple que l'insécurité est partout et que la ménagère de moins de cinquante ans risque au retour du marché autant à Paris, ou à Châteauroux, qu'à Badgdag ou Kaboul.
Alors quoi de mieux qu'une bonne tuerie ? comme aux States. Des fondus d'armes qui déboulent dans un stade ou une école pour carnager quelques dizaines d'innocents.
C'est là qu'interviennent un agent spécialiste international de la manipulation, un agent des RG, et accessoirement un lieutenant lambda d'un commissariat. Et aussi , victime ô combien consentante, Victor Courcaillet. Tout le roman de Jean-Hugues Oppel est bâti autour de cet homme à la dérive, aigri, méchant (il tue des chats pour le plaisir !) , c'est un raté. C'est lui que l'agent spécialiste international de la manipulation a choisi pour faire basculer les indécis au soir de l'élection . Rappelez vous le massacre de la mairie de Nanterre à quelques jours de l'élection présidentielle de 2002. Richard Burn c'est Victor Courcaillet. Et , comme c'est bizarre, Victor Courcaillet s'est aussi défenestré comme Richard Burn....
Ajoutez à cela l'agression sauvage de Papy Voise à Orléans deux jours avant le scrutin, montée en chantilly à tous les JT, et n'en jetez plus, Jacquot est sauvé : on se souvient tous de cette scène historique du soir du premier tour !
On pourra contester la vision de Oppel. le complot, toujours le complot.... Mais dans trois semaines réfléchissez bien . Et ne vous laissez pas avoir .


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