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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Trois parties composent ce passionnant et riche roman de Leonardo Padura, Hérétiques.
Elles concernent trois personnages. La première intitulée Livre de Daniel raconte l'histoire de ce jeune juif polonais de Cracovie Daniel Kaminsky envoyé chez son oncle Joseph à Cuba pour échapper à la fureur nazie et l'espoir qu'il a eu de retrouver sa famille fin mai 1939 lors de l'arrivée à La Havane du paquebot Saint-Louis parti de Hambourg quinze jours auparavant. En effet, les parents et la soeur du petit Daniel faisaient partie des neuf cent trente-sept juifs passagers. Mais, six jours après son arrivée au port, le président Bru cédant à la pression nord-américaine ordonne au Saint-Louis de sortir des eaux territoriales cubaines, les passagers se voient ainsi refuser l'entrée à Cuba. À peine un peu plus d'une vingtaine de juifs ont pu descendre du bateau. Daniel Kaminsky se débat alors dans les brumes de sa douleur et prend la ferme décision de renier sa condition de juif. Il ne reverra jamais les siens…
Le deuxième livre est consacré à Elías Ambrosius Montalbo de Ávila, Juif séfarade, qui en 1643, prend la décision irréversible d'apprendre l'art de la peinture et devient apprenti de Rembrandt, contre la Loi de sa religion.
La troisième partie, Livre de Judith concerne une jeune emo, Judy, les emos constituant une des « tribus urbaines » apparues vers 2008 dans la rue G à La Havane. Elle fait partie de ces ados tourmentés qui avec piercings et scarifications rejettent la société et sont en quête d'individualité.
Les trois protagonistes en cherchant, chacun à leur manière un moyen de s'affranchir des diktats de leur temps ou de leur communauté pour vivre libres, exprimant une façon de penser dissidente, marginale, deviennent ainsi « Hérétiques ».
Mario Conde, cet ancien policier cubain pure souche reconverti en acheteur de livres anciens va nous guider parmi ces amoureux de la liberté, en se lançant sur la piste d'un mystérieux tableau de Rembrandt, disparu dans le port de la Havane en 1939 et retrouvé comme par magie des décennies plus tard dans une vente aux enchères à Londres. Ce portrait d'un jeune juif ressemblant au Christ est le véritable fil rouge de l'histoire.
Hérétiques de Leonardo Padura est une véritable épopée dédiée à La Havane. Il est aussi un formidable roman d'aventures dans lequel l'enquête policière avec le destin énigmatique de ce tableau peint par le Maître a une place de choix et il est surtout un bel essai sur le libre arbitre, abordant maintes pistes de réflexion sur le combat à mener pour vivre libre.
Ce roman très dense, véritable fresque foisonnant d'informations m'a emportée de Cuba, à Amsterdam et même en Pologne pour mon plus grand plaisir, même si j'ai pu être lassée parfois par quelques longueurs. Mais le personnage fétiche de Padura, cet ex-policier, avec sa compagne Tamara, ses copains chaleureux et accueillants, toujours prêts à trinquer avec une bonne bouteille de rhum et surtout ses talents de fin limier m'ont fait passer d'excellents moments de lecture tout en tutoyant la grande histoire.
La condition des Juifs, la vie cubaine avec l'ère Batista, puis la révolution et le régime castriste, la jeunesse d'aujourd'hui qui tend à se marginaliser, la peinture hollandaise au XVIIe siècle, tels sont les thèmes évoqués dans ce richissime bouquin, le tout sous-tendu par cette quête de liberté si justement exprimée par Elías à son grand-père, au haham Ben Israël et à Rembrandt : « Vous m'avez appris qu'être un homme libre c'est plus que vivre dans un lieu où on proclame la liberté. Vous m'avez appris qu'être libre, c'est une bataille qu'il faut livrer tous les jours, contre tous les pouvoirs, contre toutes les peurs. »
Polar, roman historique, essai philosophique sur le libre arbitre, Hérétiques de Leonardo Padura (Retour à Ithaque, La transparence du temps, Poussière dans le vent, L'homme qui aimait les chiens) est un roman passionnant et enrichissant où fiction et réalité se mêlent avec brio !

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Hérétiques est plus qu'un roman, Hérétiques se divise en trois livres et se termine par une Genèse. Les trois livres portent les prénoms de DANIEL, ELÍAS et JUDITH, personnages bibliques hébraïques.
J'imaginais que Hérétiques avec le personnage de Mario Conde, ex-policier reconverti dans le commerce de livres anciens et détective à ses heures était un roman dans la lignée de Brumes du passé que j'avais apprécié. Erreur, si Mario Conde fidèle à lui-même, un homme sensible, humain, analyste, qui va au fond des choses, occupe une place de choix dans une grande partie du roman, il est absent du second livre, livre de ELÍAS, partie historique consacrée au peintre Rembrandt et son époque. Pour ce qui est du troisième livre, le livre de JUDITH, Mario Conde découvre une jeunesse cubaine qui se marginalise, divisée en tribus, emo, freaks, rockeurs ... tous voulant afficher leur non-conformisme et leur liberté. Conde recherche une jeune fille émo disparue ...
Leonardo Padura, fidèle à lui-même, raconte Cuba et La Havane personnage principal de ses livres et raconte, dans le livre de ELÍAS qui se déroule dans les années 1643-1645 à Amsterdam, la Nouvelle Jérusalem, une partie de l'histoire des Juifs, de leurs persécutions, l'atelier de Rembrandt et l'évolution d'un de ses élèves, juif qui brave sa religion lui interdisant la peinture, pour revenir à La Havane en 2008 dans le livre de JUDITH.
Hérétiques est un roman magistral !
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Autant le dire tout de suite, on a affaire ici à un roman très dense et on comprend qu'il ait fallu plus de trois ans à Leonardo Padura pour nous produire cet opus de 603 pages (qui sont bien remplies...).
Je l'avais découvert avec «Les brumes du passé» et enchainé avec «Mort d'un chinois à la Havane». Je ne suis pas déçue d'avoir pris un peu de temps pour lire «Hérétiques».
Pour ceux qui ne connaissent pas Padura, le héros, Conde, est récurrent: c'est un ancien flic, aujourd'hui la cinquantaine, devenu revendeur de livres anciens que certains cubains désargentés sont contraints de vendre.
Dans les aventures qui nous intéressent ici, il va rencontrer un homme américain, Elias Kaminsky, peintre de son état, dont le père, Daniel Kaminsky était arrivé enfant en 39 à la Havane pour la fuir vingt ans plus tard. Il avait débarqué seul et avait été accueilli par un oncle.
Le reste de sa famille juive devait le rejoindre avec pour monnaie d'échange si nécessaire pour soudoyer les autorités cubaines, un tableau de Rembrandt (dans la famille depuis trois siècles).
Seulement voilà, le petit Daniel Kaminsky verra depuis le port le bateau Saint Louis à bord duquel se trouvent ses parents et sa petite soeur, quitter les eaux cubaines le 1er juin 1939 après six jours interminables d'attente et de palabres avec les autorités. Ce bateau qui n'avait pratiquement à son bord que des juifs fuyant l'Europe sera aussi refusé par les Etats-Unis et retournera en Europe où l'on sait le sort qui fut réservé à ses passagers...(le fait est véridique).
Bref, Elias Kaminsky voudrait bien savoir, avec l'aide de notre héros Conde, ce qui s'est passé et pourquoi aujourd'hui le tableau de Rembrandt se retrouve en vente à Londres.
Le roman est constitué de trois «livres» et d'une genèse en toute fin (références bibliques obligent).
Le premier, «livre de Daniel» prend place à la Havane de 1939 à 1959 (comme toujours ville-personnage à part entière chez Padura), le Miami de la communauté cubaine exilée dans les années 60 et enfin en 2007, année où se situe «l'enquête».
Le second, «livre d'Elias» se situe entre 1643 et 1647 à Amsterdam (appelée la Nouvelle Jerusalem par les juifs ayant fui l'inquisition qui y trouvèrent refuge et liberté). On suit un jeune juif, Elias Ambrosius, fervent admirateur du Maître Rembrandt, qui souhaite devenir peintre malgré le fait que la pratique soit interdite par «le deuxième commandement de la Loi sacrée» car source d'idolâtrie et qui risque le bannissement par sa communauté s'il enfreint la règle.
Enfin, dans le dernier livre, «livre de Judith», on retrouve Conde chargé d'enquêter sur la disparition d'une adolescente à la Havane en 2008.
Bien entendu, tout est lié...Et la genèse de la fin (bel oxymore...) du livre nous donne aussi quelques clés sur l'histoire du fameux tableau disparu et surtout sur le massacre des juifs perpétré en Pologne dans les années 1650.

Le propos du livre est centré sur l'exercice du libre-arbitre de chacun des principaux personnages qui ont à faire des choix qui peuvent aller à l'encontre de leurs communautés.
J'ai préféré les deux premières parties à la troisième bien que cette dernière dépeigne certainement avec beaucoup de justesse le désenchantement d'une partie de la jeunesse cubaine actuelle mais je l'ai trouvé un peu long.
Le personnage de Conde est définitivement attachant (vieux garçon et compagnon d'un chien plutôt repoussant), aimant partager des moments (toujours bien arrosés) avec ses vieux amis et amoureux de sa Tamara avec laquelle il hésite désormais à se marier.
Le talent de Padura tient dans le fait que certes, l'écriture est assez exigeante, avec parfois de longues phrases (mais avec quel talent!... et bravo au passage à la traductrice) et de la réflexion mais qu'il sait aussi faire part de beaucoup d'ironie et de tendresse en particulier lorsqu'il évoque Conde et ses relations amicales et amoureuses. Les différentes atmosphères sont très bien restituées.
La partie sur Amsterdam est vraiment passionnante et si vous avez eu l'occasion de visiter la maison de Rembrandt, vous pourrez «visualiser» un certain nombre de scènes ce qui est toujours intéressant.
Le livre est émaillé de références à des enquêtes passés (les titres des romans sont indiqués) mais ça ne gêne en rien la lecture si on ne les a pas lus.
Je conseillerasi peut-être cependant de commencer plutôt par «les Brumes du passé» qui est plus court et et si cela vous plait, d'enchainer sur ce brillant ouvrage.


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Exceptionnel, comme cela fait grand bien de lire un tel roman qui tient, à mon sens, de la grande littérature. Une intrigue rudement bien menée, dans un contexte historique travaillé avec précision et érudition, des personnages hautement étudiés....

C'est une grande découverte pour moi que cet auteur Cubain et j'en suis pleinement heureuse quand je lis combien de livre il a écrit, grandiose, alors encore de belles heures de lecture avec lui très certainement.

Hérétiques, ce sont plusieurs histoires qui se croisent, s'entremêlent à des années voir des siècles différents. Un voyage au coeur de la grande Histoire, de la peinture, de la guerre .. nous conduisant d'Amsterdam, en Pologne pour Cuba.

Histoire d'un couple juif déporté dans ce fameux bateaux le Saint Louis, en 1939, parti de Hambourg pour la Havane mais qui ne pourront jamais débarquer alors que leur fils Daniel arrivé quelque temps avant chez son Oncle les attend avec impatience. Ils sont en possession d'un trésor inestimable, une peinture de Rembrandt qu'ils possèdent de génération en génération dans cette famille juive les Kaminsky.

Que va-t-il advenir d'eux, de leur fils, de ce tableau ? Je n'irai pas plus loin à vous raconter davantage, ce livre se découvre, se dévore, se savoure ......
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D'abord surprise par le fait qu'il s'agissait d'une enquête de Mario Condé, je me suis laissé porter par ma lecture en essayant d'engranger toutes les informations de détail et de contexte car, à son habitude, Padura inscrit son imaginaire dans les faits historiques. C'est ainsi que j'ai appris qu'un paquebot allemand (le Saint Louis) avait quitté le port de Hambourg en 1939 pour rejoindre La Havane avec, à son bord, près d'un millier de passagers juifs qui n'ont pu débarquer et qui ont été finalement renvoyés en Allemagne dans les camps de la mort.
Puis, surprise par le fait qu'on quitte Mario Condé pour se retrouver dans l'atelier de Rembrandt au milieu du XVIIè siècle. C'est à se demander si Padura n'a pas créé toute son histoire policière pout nous faire partager ses opinions sur la création artistique le rôle de la religion, de ses injonctions et de ses intolérances que l'on trouve dans ce deuxième livre consacré à Elías à la fois modèle et apprenti du grand maître….
Le troisième livre, celui de Judith (ou Judy) nous ramène dans la Cuba du début de notre siècle pour finaliser l'enquête de Condé: c'est selon moi la moins intéressante car on peut en deviner quelques aboutissants.
Et, finalement, comme si ce n'était pas assez de trois livres avec toutes ces longueurs parfois un peu lourdes à avaler, le roman finit par une Genèse qui rappelle les massacres des populations juives lors de l'invasion de la Pologne-Lituanie entre 1654 et 1656 par les armées du tsar de Russie.
Bref, quasiment quatre romans différents dans un seul avec un certain mélange des genres, c'est pour le lecteur un défi à sa persévérance et à sa concentration; mais c'est aussi un défi pour l'écrivain qui doit maintenir le cap et l'unité de l'architecture d'ensemble. Bien que, selon moi, moins magistral que L'homme qui aimait les chiens, ce roman confirme, s'il le fallait ,le formidable talent de son auteur. À lire sans modération tant par les adeptes de romans policiers que ceux de romans historiques.
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Lecture proposée dans le cadre de Pioche dans ma PAL (Février 2019), par dedanso.

Première lecture de Léonardo Padura, Je découvre une plume et un style qui m'ont convenue d'emblée. Très dense,
Hérétiques traite de l'histoire du peuple juif, d'une manière romanesque, entre Cuba et Amsterdam, mais sur un fond historique très documenté. Ce livre, très structuré, nous fait voyager également dans l'espace et dans le temps, et nous fait vivre des époques très différentes, où finalement, la question du libre-arbitre de chacun, par rapport aux dogmes religieux ou non, reste une question encore de grande actualité.
C'est un livre que je vais garder dans ma bibliothèque, car on y apprend beaucoup sur la religion juive.

Challenge Pavés 2019
Challenge Multi-Défis 2019
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De Padura, j'avais adoré « L'homme qui aimait les chiens » magnifique roman historique sur la fuite de Trostky et j'avais également beaucoup apprécié « Les brumes du passé » qui mettait en scène Mario Condé son héros récurrent.

Son dernier opus, Hérétiques, est composé de trois livres qui pourraient presque se lire séparément.

Le premier qui met de nouveau en scène Mario Condé se lit très facilement et raconte l'histoire de Daniel Kaminski, jeune juif polonais réfugié à Cuba au moment de la montée du nazisme. On y apprend l'histoire terrible du navire qui devait y amener ses parents et sa soeur et dont les passagers qui avaient pourtant payé leur visa, ne pourront jamais débarquer, condamnés à retourner vers l'enfer européen. Ce premier livre est émouvant, intelligent, passionnant. Il est également instructif sur ce que pouvait être la vie à Cuba sous Batista et de manière générale, tous les romans de Padura sont une mine d'informations sur Cuba.

Le deuxième livre nous fait voyager à Amsterdam au 17ème siècle au temps de Rembrandt. Là je dois avouer que même si le récit est érudit , j'ai eu un peu plus de mal. Comme d'autres babeliotes l'ont souligné, je n'avais pas souvenir que l'écriture de Padura soit aussi ardue.

Le troisième nous ramène à Cuba avec Mario Condé à notre époque. Il fait le portrait d'une jeunesse désabusée et déçue des rêves castristes. Plus simple à lire que les précédents, il m'a semblé aussi un peu moins intéressant.

Le tout est relié par l'histoire d'un tableau de Rembrandt et par le libre arbitre qui habite chacun des personnages principaux. Ils n'hésiteront pas à faite des choix pouvant les mettre en danger mais leur permettant de vivre en accord profond avec leur personnalité. Les hérétiques.

Voilà c'est dense (plus de 700 pages pour l'édition poche) parfois un peu longuet mais ca reste un roman passionnant.
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J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman dans lequel je me suis plongée et même immergée à partir d'un certain moment. de ces livres qui vous happent.
J'ai tout aimé : l'information donnée sur Cuba à tous ceux qui, malgré quelquefois une intelligence plutôt brillante, s'enfermaient dans la belle image rebelle du Che et s'accrochaient à un Cuba idéalisé .
J'ai adoré les commentaires distillés comme le rhum du personnage qui raconte le désespoir, comme savent le faire les sud-américains, avec toujours quelque part au coin des lèvres un sourire prêt à renaître, une fête prête à éclore, même ds une cour sordide avec une boîte de sardines et un verre prêt à réchauffer les corps et les coeurs.
Tout m'a appris qq chose d'interessant: le sort du bateau chargé de juifs abusés et rackettés , façon Exodus dont on n'a pas entendu parler  et l'ignominieux cynisme de sa gestion, tant par l'Europe que les US… les mêmes qui prendront des mines de patenôtre
après 1945 en prétendant qu' « ils ne savaient pas ». Ils auront d'abord pris la peine de saisir bijoux et oeuvres d'art que c'est malheureux avait emporté comme sauf conduit dans leur exil et leur exode… La spoliation des biens n'a largement pas été seulement le fait des nazis…
Et puis, l'histoire continue avec la geste des familles , juives émigrées, avant l'ignoble extermination , souvent pour des raisons idéologiques; et puis la rocambolesque émigration des Cubains qui risquaient leur vie plutôt que de se laisser mourir au petit feu des privations-récession. Et soudain, la plongée dans le XVIIe et ses tortueux diktats religieux, Rembrandt et le monde de l'Art nous emportent ailleurs!
Et que dire de l'esprit de résistance qui anime les personnages à diverses époques, leur courage et leur unicité, leur refus délibéré de rejoindre le troupeau. J'oublie certainement encore bien d'autres éléments car ce livre est un foisonnement , une sorte de matriochka  littéraire, chaque histoire en enferme une autre et chaque fois l'intérêt renaît car chaque fois, l'époque ou le point de vue diffère. L'enthousiasme et l'émotion ne m'ont pas quittée depuis que j'ai refermé ce chef-d'oeuvre .
Lien : https://collectifpolar.fr/20..
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Comme à chaque fois que je me sens envahie par toute une palette d'émotions différentes, lorsqu'une lecture me chamboule du tout au tout et me laisse longtemps accrochée à ses mots et son univers, je me sens complètement dépassée lorsqu'il s'agit d'en faire une critique. Je vais sans aucun doute être dense mais je ne peux faire autrement étant donné la profondeur de ce roman. Vous me pardonnerez sans nul doute.

Je vais commencer par le plus simple : la forme. Ce petit pavé de 715 pages en format poche se décline en quatre parties.

Le livre de Daniel nous raconte l'histoire de Daniel Kaminsky, jeune juif ayant fui l'Europe pour Cuba d'où il assiste, impuissant, au destin du Saint Louis et de ses passagers parmi lesquels se trouvent ses parents et sa petite soeur. Le Saint Louis est un bateau de réfugiés juifs qui, au début de la seconde guerre mondiale, a tenté de trouver refuge à Cuba, puis à Miami et au Canada. Il a été refoulé à chaque fois et ses passagers se sont vu obligés de rejoindre l'Europe où la plupart périt lors de l'Holocauste. Dans cette partie nous faisons connaissance avec Elias Kaminsky, fils de Daniel, ainsi qu'avec Mario Conde, un inspecteur à la retraite. Tous deux tentent de comprendre comment le tableau de Rembrandt, qui appartenait aux parents de Daniel Kaminsky, a pu se retrouver dans une vente aux enchères, loin de Cuba.

Le livre d'Elias nous narre quant à lui la genèse du tableau de Rembrandt. Nous suivons le jeune apprenti séfarade du Maître, Elias Ambrosius, à travers Amsterdam. Il y est question de religion, de peinture (et tout particulièrement de la série des têtes de Christ de Rembrandt) et de libre arbitre.

Le livre de Judith, de façon assez surprenante, nous amène sur les traces de Judith Torres, jeune emo. Si comme moi vous n'y comprenez goutte, sachez que "emo" signifie plus ou moins "émotif" et sert à désigner un groupe qui se démarque par sa tenue vestimentaire (de type gothique), son état dépressif, sa relation torturée au corps... On se demande ce que ça fait là, entre juifs, Dieu, Cuba et Rembrandt. Mais tout a sa place dans ce récit !

Et enfin la genèse permet de boucler la boucle, de comprendre le fin mot de l'histoire. Elle est très courte, pas forcément indispensable mais agréable pour satisfaire la curiosité de lecteurs comme moi.

Comme vous l'aurez compris, Hérétiques fait explicitement référence à la Bible dans sa forme. Dans le fond, la religion y tient une place prépondérante. Beaucoup de questionnements sur la qualité de juif, le rapport à toute croyance religieuse. Mais le thème central est sans conteste la question du libre arbitre, de la liberté de penser et d'agir selon des choix qui nous propres. Voilà le fil conducteur de ce roman fleuve qui se déroule sur plusieurs continents (Cuba, Miami, Amsterdam, la Pologne et même un peu le Moyen-Orient) et sur plusieurs siècles (du XVIIème siècle aux XXIème).

J'ai aimé la description de la vie quotidienne à La Havane, sa misère, la corruption mais aussi sa musique, le base-ball, les liens très fraternels qui unissent les cubains entre eux.
J'ai aimé les multiples références historiques : le Saint-Louis en 1939, le XVIIème siècle hollandais, la vie cubaine sous Batista, le massacre des Juifs en Pologne en 1648...
J'ai aimé suivre Rembrandt dans son atelier, en apprendre plus sur sa vie et ses techniques picturales.

L'écriture de Leonardo Padura n'est pas limpide : les phrases sont longues, parfois un peu tortueuses, mais la langue est belle et très évocatrice. Elle convient parfaitement à l'esprit de ce roman, un peu torturé mais très beau. Comme Rembrandt, Padura travaille plutôt l'émotion, l'humanité de ses personnages qui sont très approfondis et réalistes. Si l'auteur est très souvent critique envers son pays, c'est seulement comme on peut l'être envers les gens que l'on aime le plus : on sent l'amour à travers les blâmes.

C'est une véritable découverte, un coup de foudre, que cette oeuvre magistrale qui fraye avec le polar, le roman historique, la saga familiale. Une véritable ode à l'Humanité et à la Liberté qui s'inspire d'événements ayant vraiment eu lieu et qui les relie les uns aux autres de façon très naturelle.

Challenge Multi défis 2016
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Livre construit en trois parties dont chacune porte un titre à résonance biblique et dont le fil conducteur est la quête d'une toile de Rembrandt représentant la tête du Christ, dont le modèle est un jeune juif qui voulait devenir peintre et qui se heurtait aux Lois de sa religion.
L'histoire débute en 1939 sur le port de la Havane où ce jeune garçon attend l'arrivée de ses parents qui seront empêchés de débarquer. Puis, flash-back au 17e siècle à Amsterdam où vit Rembrandt et où s'était réfugiée une importante colonie de Juifs séfarades qui avait fui
l'Inquisition et les Excommunications en Espagne et au Portugal. Enfin retour à Cuba au début des années 2000.
Ce roman historique est un plaidoyer pour la liberté sous toutes ses formes , qu'elle soit religieuse, de penser, de création : en un mot la liberté de vivre.
Magnifique oeuvre.
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