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Critique de Patlancien


Amoureux des Zombies vous allez être déçus… le livre de Martin Page ne va pas dans le sens voulu par tous les amoureux du genre : pas de masses zombiesques sanguinolentes, pas de survivants qui défendent durement leur peau, pas de tueries… Mais plutôt un roman contemplatif et introspectif sur un survivant, un simple monsieur tout le monde qui se retrouve à son corps défendant être le dernier représentant de l'espèce humaine dans un Paris livré un beau matin aux zombies.

« Vous êtes sur un balcon et vous vous rendez compte que vous assistez à un film d'horreur. Mais réel cette fois. Tous les films que vous avez vus vous reviennent en mémoire et vous comprenez que ce n'est pas un rêve et que la terreur est enfin au grand jour : des zombies sont en bas de chez vous. Des zombies. Il n'y avait pas à tergiverser. Dès ces premières secondes, j'ai su que ce n'étaient pas des psychopathes ou des terroristes, mais des créatures d'une tout autre nature. Comment appelle-t-on des êtres qui ne s'arrêtent pas après avoir pris une dizaine de balles dans le corps et qui confondent les gens avec des sandwiches ? La réponse est évidente. Je ne suis pas du genre à me voiler la face. J'ai une devise depuis l'enfance : quand on pense au pire, on a souvent raison. »

Antoine Verney, le héros du roman, n'est pas le Will Smith du film « Je suis une légende » mais un écrivain parisien de romans à l'eau de rose pour mémés permanentées. Sa femme l'a quitté et il collectionne les échecs sentimentaux depuis 3 ans. C'est un vrai looser qui va profiter de l'immeuble qu'il occupe pour se constituer un petit paradis au coeur même de Paris qui est désormais aux mains des mort-vivants. Même plus notre anti-héros va profiter de cette situation de dernier homme pour devenir enfin ce quelqu'un d'important qu'il a voulu toujours désirer être.

« Bientôt je n'ai plus vu ni hélicoptères, ni avions dans le ciel. Ce n'était pas être pessimiste que de le dire : nous avions perdu la guerre. Je retrouve pied après des journées de prostration et de dépression. Je ne pèse plus que les deux tiers de mon poids habituel. L'appartement sent le renfermé et la sueur. Il y a des boîtes de conserve vides et des paquets de gâteaux dispersés sur le sol. Je vis dans une porcherie. Il est temps que je me reprenne. Un nouveau monde commence. Une nouvelle Amérique est née, et nous en sommes les Indiens. »

C'est à partir de là que le roman de Romain Page prend toute son importance. A partir de sa solitude et de son absence d'espoir, Antoine Verney va reprendre sa vie en main. Après un moment de détresse, Il va vite s'apercevoir que ce nouveau monde n'a pas que des mauvais côtés. Plus besoin de travailler, plus de pollution, plus de relations sociales à supporter, de la nourriture à profusion grâce aux appartements qui composent son immeuble, et surtout des livres pour ne pas devenir fou.

« Je passe les heures suivantes à renforcer la porte et les fenêtres de l'immeuble, clouant des planches et entassant des meubles. Je ne ressortirai plus. Je suis Robinson, les zombies sont mon océan. »

De cette robinsonnade en milieu hostile, ce huis-clos va prendre tout son sens. Bien vite, on va s'apercevoir que le danger ne vient pas seulement des zombies mais qu'il est aussi dans l'âme humaine. Nous avons en nous toutes les armes nécessaires pour nous détruire. Nos pensées sont suffisamment pernicieuses pour nous tuer. C'est toute l'originalité dégagée par ce livre court de 200 pages. Il est porté aussi par un style et une écriture fine qui nous tient en haleine du début à la fin. Un livre que l'on lit en une seule traite, en une seule inspiration. Des zombies en bas sur le boulevard ou de l'être humain sur son balcon, qui est le plus dangereux. Fascinant et inquiétant à la fois, Martin Page nous invite à nous interroger sur notre société. de la peur du mort à la crainte du vivant, un petit tiret nous sépare de la réponse définitive que le roman veut nous donner.

« Les zombies arrivent au moment juste. C'était leur tour d'entrer sur scène. Ils viennent terminer la destruction de l'humanité que nous avions commencée avec les guerres, la déforestation, la pollution, les génocides. Ils réalisent notre plus profond désir. Notre propre destruction est le cadeau que nous demandons au Père Noël depuis la naissance de la civilisation. Nous avons enfin été exaucés. »
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