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sur 240 notes
Amoureux des Zombies vous allez être déçus… le livre de Martin Page ne va pas dans le sens voulu par tous les amoureux du genre : pas de masses zombiesques sanguinolentes, pas de survivants qui défendent durement leur peau, pas de tueries… Mais plutôt un roman contemplatif et introspectif sur un survivant, un simple monsieur tout le monde qui se retrouve à son corps défendant être le dernier représentant de l'espèce humaine dans un Paris livré un beau matin aux zombies.

« Vous êtes sur un balcon et vous vous rendez compte que vous assistez à un film d'horreur. Mais réel cette fois. Tous les films que vous avez vus vous reviennent en mémoire et vous comprenez que ce n'est pas un rêve et que la terreur est enfin au grand jour : des zombies sont en bas de chez vous. Des zombies. Il n'y avait pas à tergiverser. Dès ces premières secondes, j'ai su que ce n'étaient pas des psychopathes ou des terroristes, mais des créatures d'une tout autre nature. Comment appelle-t-on des êtres qui ne s'arrêtent pas après avoir pris une dizaine de balles dans le corps et qui confondent les gens avec des sandwiches ? La réponse est évidente. Je ne suis pas du genre à me voiler la face. J'ai une devise depuis l'enfance : quand on pense au pire, on a souvent raison. »

Antoine Verney, le héros du roman, n'est pas le Will Smith du film « Je suis une légende » mais un écrivain parisien de romans à l'eau de rose pour mémés permanentées. Sa femme l'a quitté et il collectionne les échecs sentimentaux depuis 3 ans. C'est un vrai looser qui va profiter de l'immeuble qu'il occupe pour se constituer un petit paradis au coeur même de Paris qui est désormais aux mains des mort-vivants. Même plus notre anti-héros va profiter de cette situation de dernier homme pour devenir enfin ce quelqu'un d'important qu'il a voulu toujours désirer être.

« Bientôt je n'ai plus vu ni hélicoptères, ni avions dans le ciel. Ce n'était pas être pessimiste que de le dire : nous avions perdu la guerre. Je retrouve pied après des journées de prostration et de dépression. Je ne pèse plus que les deux tiers de mon poids habituel. L'appartement sent le renfermé et la sueur. Il y a des boîtes de conserve vides et des paquets de gâteaux dispersés sur le sol. Je vis dans une porcherie. Il est temps que je me reprenne. Un nouveau monde commence. Une nouvelle Amérique est née, et nous en sommes les Indiens. »

C'est à partir de là que le roman de Romain Page prend toute son importance. A partir de sa solitude et de son absence d'espoir, Antoine Verney va reprendre sa vie en main. Après un moment de détresse, Il va vite s'apercevoir que ce nouveau monde n'a pas que des mauvais côtés. Plus besoin de travailler, plus de pollution, plus de relations sociales à supporter, de la nourriture à profusion grâce aux appartements qui composent son immeuble, et surtout des livres pour ne pas devenir fou.

« Je passe les heures suivantes à renforcer la porte et les fenêtres de l'immeuble, clouant des planches et entassant des meubles. Je ne ressortirai plus. Je suis Robinson, les zombies sont mon océan. »

De cette robinsonnade en milieu hostile, ce huis-clos va prendre tout son sens. Bien vite, on va s'apercevoir que le danger ne vient pas seulement des zombies mais qu'il est aussi dans l'âme humaine. Nous avons en nous toutes les armes nécessaires pour nous détruire. Nos pensées sont suffisamment pernicieuses pour nous tuer. C'est toute l'originalité dégagée par ce livre court de 200 pages. Il est porté aussi par un style et une écriture fine qui nous tient en haleine du début à la fin. Un livre que l'on lit en une seule traite, en une seule inspiration. Des zombies en bas sur le boulevard ou de l'être humain sur son balcon, qui est le plus dangereux. Fascinant et inquiétant à la fois, Martin Page nous invite à nous interroger sur notre société. de la peur du mort à la crainte du vivant, un petit tiret nous sépare de la réponse définitive que le roman veut nous donner.

« Les zombies arrivent au moment juste. C'était leur tour d'entrer sur scène. Ils viennent terminer la destruction de l'humanité que nous avions commencée avec les guerres, la déforestation, la pollution, les génocides. Ils réalisent notre plus profond désir. Notre propre destruction est le cadeau que nous demandons au Père Noël depuis la naissance de la civilisation. Nous avons enfin été exaucés. »
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Yeah, un livre sur l'Apocalypse zombie dévastant le genre humain ! Depuis que j'ai découvert la série BD Walking Dead de Robert Kirkman ( et accessoirement la version télé qui est en tirée ), je me suis attachée à ses créatures moches et crétines. Mais là, ça ne part pas du tout dans la direction attendue et c'est ça qui est bon  : pas de grosses bastons pour défoncer des meutes de zombies dégingandés dans le seul but de ne pas se faire réduite en charpie, pas d'humains survivants plus dangereux que les susdites créatures. Ok y a bien quelques scènes truculentes d'explosion de crânes zombiesques en mode ball-trap du haut d'un immeuble, mais c'est bien tout.
On a là un roman étonnamment contemplatif et introspectif sur les pas d'un rare survivant ( le seul ? ) . Et oui, le survivant en question n'est pas un gros bourrin qui n'a que ses muscles pour faire face. Dans la vie d'avant, c'était un loser, un écrivain limite miséreux qui vivotait à coup de romans à l'eau de rose lus par des mémés aux cheveux bleus, trop sensible pour ne pas rester amoureux de celle qui l'a quitté il y a des années, trop sentimental pour refaire sa vie. Alors il l'a saisi, sa putain de chance de sa vie : être un winner dans un nouveau monde, tant pis s'il est tout seul !
Par le prisme de cet anti-héros qui se révèle, l'auteur nous livre une réflexion très juste sur notre époque, il en fait même une satire très pertinente. En quoi ce monde sans homme serait-il moins bien que la société si détestable  ? Plus besoin de travailler, de se fader des gens qui vous dégoutent et vous oppriment, plus de pollution, plus de plein de choses pénibles.
Ce n'est pas un hasard si c'est la culture, les livres, la réflexion intellectuelle qui sauvent le héros, lui permettent de conserver son humanité et l'empêche de sombrer dans la folie, bref tout ce qui aujourd'hui semble ployer sous les coups des facebook et autres réseaux sociaux débilitants.
«  Je peux flinguer les ombres de la jeunesse dépensière et égoïste, la bourgeoisie branchée, faussement préoccupée des pauvres, prédatrice et qui parle fort », nous dit le héros lorsqu'il cible très précisément des zombies à éclater en fonction de ce qu'il devine qu'ils étaient. Tout est dit.
Un roman original, souvent drôle et intelligent, et quel beau titre !
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La Nuit a dévoré le monde, j'ai dévoré ce texte avec gourmandise.
Je ne pensais pas qu'une histoire avec des zombies m'enchanterait autant. Mais revenons à la genèse de ce récit. Un jeune écrivain en mal de succès, Antoine Verney, se retrouve à une soirée dans l'appartement parisien d'une amie, Stella, dont il est amoureux. Tout le monde boit beaucoup, lui aussi.
Le lendemain matin, c'est plus qu'une gueule de bois qui le sidère. Sortant de la chambre où il avait dormi, il découvre un carnage, le cadavre d'un homme décapité… Les autres personnes de la soirée semblent s'être volatisées. Il y a du sang partout, sur le sol, sur les murs…
C'est en jetant un coup d'oeil depuis le balcon de l'appartement, au quatrième étage, qu'il découvre l'horreur de la situation. Des silhouettes déambulent telles des zombies, mais non ! Pas telles des zombies, ce sont des zombies ! Il assiste alors, médusé, impuissant, à des scènes d'horreur dignes d'un film d'épouvante.
Le jeune homme décide de rester pour l'instant dans l'appartement qui lui sert de forteresse, de protection, de camp de retranchement.
Le reste de l'histoire est un récit délectable, que j'ai dévoré d'une traite…
Amateurs de récits gores, vous en serez ici pour vos frais, le propos est ailleurs, même si de temps en temps nous vivons de près quelques scènes de frayeur où il ne fait pas bon fréquenter la nouvelle population du voisinage qui se multiplie comme des cellules malignes…
Antoine Verney organise le siège, avec ce qu'il a à proximité pour tenir, survivre, de l'eau, du vin, des conserves, des munitions…
Alors, bien sûr, dans le ton empli d'humour et d'ironie, il est impossible de ne pas y voir une satire de notre monde actuelle. Martin Page s'en donne ici à coeur joie.
« Ils n'ont pas besoin d'être intelligents pour représenter un danger : leur nombre est leur intelligence. »
Antoine Verney devient une sorte de Robinson Crusoé, reclu dans cet appartement désert. Alors il cogite forcément et c'est jubilatoire lorsqu'on compare le monde d'avant à celui du monde d'après. On se met à relativiser beaucoup de choses. N'avons-nous pas été tenté de le faire naguère, il y a deux ans et peut-être encore maintenant…?
Antoine Verney se sentait comme un looser, un perdant dans le monde d'avant, côté travail, côté sentimental. le voici brusquement confronté à un monde singulier auquel enfin il a presque prise, il peut agir, même si le danger alentour est terrible, terrifiant.
Oui il peut agir enfin avec sa carabine depuis le balcon en dézinguant de temps en temps l'ennemi, des zombies, visant leurs têtes. Viser l'ennemi, avoir la main sur leur destin, tandis que dans sa vie il n'a jamais pu agir sur les prédateurs qui dictaient son existence.
Et puis il arrive qu'il communique avec eux d'une façon insolite, s'attache même de loin, depuis son balcon, à certains d'entre eux, leur attribuant des prénoms, les saluant d'un geste touchant…
Mais dans le monde d'avant, confronté à un univers de requins, il n'avait pas la moindre prise sur son existence.
« Ce ne sont des prédateurs, mais des êtres ridicules et vains, des appétits sur pattes. Pas très différents des gens que j'ai connus avant et leurs appétits d'argent, de sexe, de pouvoir. »
Alors…
Survivre, continuer, mais d'une toute autre manière qu'auparavant…
Mais l'essentiel de ce texte est ailleurs…
C'est un merveilleux pas de côté engagé sur nos quotidiens parfois dérisoires, où la perte de sens résonne comme un caillou dans la chaussure.
Ce sont les variations douces-amères du regard désabusé d'un citoyen du monde sur ses contemporains...
" Les zombies arrivent au moment juste. C'était leur tour d'entrer sur scène. Ils viennent terminer la destruction de l'humanité que nous avions commencée avec les guerres, la déforestation, la pollution, les génocides. Ils réalisent notre plus profond désir. Notre propre destruction est le cadeau que nous demandons au Père Noël depuis la naissance de la civilisation. Nous avons enfin été exaucés. "
J'ai adoré le cynisme qui tient le texte et qui en dit long sur l'humanité et ses dérives.
« L'absence d'intelligence ne vous empêchera pas de conquérir le monde, en revanche vous n'arriverez pas à attraper le pot de confiture posé en haut de l'armoire. Putain d'ironie. »
Les zombies qui traversent les rues de Paris et le reste du monde sont-ils des êtres si imaginaires que cela ? Ne les avons-nous pas mérités ? Ne leur ressemblons-nous pas au fond ?
J'ai aimé arpenter les toits de Paris avec le narrateur, m'enivrer d'azur, de battements d'ailes, appréhendant cette solitude presque mystique tandis que des oiseaux s'approprient l'espace d'une autre manière et qu'enfin nous les regardons, prenons conscience qu'ils existent.
Alors, le bonheur d'une rencontre, l'amour qui peut naître, même éphémère, peuvent transformer l'aventure solitaire en ce monde en un véritable guide de survie…
Parfois, au fil des pages, je me demandé avec effroi et ironie : " Et si Antoine Verney me ressemblait ? "
J'ai été, contre toute attente, emporté dans ce roman à l'écriture inspirante, soutenue, addictive...
La fin de ce récit est juste belle.
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Je ne pensais pas un jour lire un roman d'horreur avec des zombies, mais c'est sans compter mes ami.es de Babelio qui m'ont convaincue de lire le petit roman de Martin Page.
Avec « La nuit a dévoré le monde », je suis sortie de ma zone de confort, et même si ce n'est pas un roman coup de coeur, j'ai passé un très agréable moment. Merci à eux.

*
Antoine Verney, un jeune écrivain de romans à l'eau de rose, se rend à une soirée privée organisée par une amie. Mais ne connaissant personne, il finit par s'éloigner de la fête et s'isole dans la bibliothèque. Là, au milieu des livres, abruti par l'alcool, il s'endort pendant que la fête continue.

A son réveil, il découvre l'appartement vide (hormis un cadavre décapité), saccagé, maculé de traces sanguinolentes. En jetant un coup d'oeil dans la rue par la fenêtre, il découvre que tous les humains se sont transformés en morts-vivants et se livrent à des actes d'anthropophagie, traquant les derniers survivants affolés qui tentent de s'échapper.

Le jeune homme décide alors de s'organiser en se retranchant dans l'appartement de son amie.

« J'ai toujours su que les gens étaient des monstres. Alors qu'ils soient aujourd'hui des zombies, ça n'est qu'une confirmation. La métaphore s'est incarnée. Et je suis bien décidé à vendre cher ma peau. »

Comment ne pas devenir fou ? La peur, la mort qui rode, violente, sournoise, la solitude, la claustration, sont autant de raisons de perdre la raison.
Mais vivre reclus se prête à son caractère solitaire et asocial. Il pense être à l'abri, mais chaque jour qui passe l'amène à s'interroger sur son propre salut, celui de sa famille, de son ancienne compagne, des survivants.

« le plus dur, c'est de ne pas savoir ce que sont devenus ceux que j'aime. Ils ne sont pas nombreux : mon coeur est un désert. »

*
Antoine n'est pas un héros au sens où on l'entend. Au contraire, c'est un homme plutôt atypique pour un tel roman, pragmatique, timide, peu sociable, indifférent aux autres et même narcissique.
L'auteur analyse très finement l'impact qu'a cette situation émotionnelle extrême sur son état de stress et ses réactions. Elles évoluent au fil des jours, commençant par un sentiment de terreur, puis l'affolement laisse la place à d'autres émotions, d'autres sentiments : la confusion, la détresse, le désespoir,

« Il m'a fallu un mois pour comprendre que les zombies ne sont pas le vrai danger. Je suis mon pire ennemi. Les zombies ne peuvent franchir les trois étages, ils ne peuvent défoncer la porte. Par contre, ils courent dans ma conscience comme s'ils en avaient toutes les clés. Ils sont à l'intérieur de moi et il n'y a rien de plus effrayant.
À quoi bon vivre dans un tel monde ? À quoi bon vivre si on est seul ? Ceux que j'aimais sont morts. À certains moments, je pense me laisser contaminer : devenir l'un d'eux, céder au conformisme. Il suffirait d'une morsure.
Ils m'attirent comme le vide attire celui qui souffre du vertige. Je me sens aimanté, j'ai envie de me jeter dans leurs griffes et qu'ils me mettent en charpie, qu'ils me réduisent à l'état de masse informe et sanglante. Et me fassent disparaître. Ce ne sont pas seulement des démons. Ce sont mes démons, et ils m'obsèdent. Je suis terrifié par la place qu'ils prennent dans ma tête. »

La fin réserve de belles surprises.

« Je ne me fais pas de soucis, l'espèce humaine survivra. Nous sommes les véritables cafards du monde : increvables. Mais la Terre ne nous appartient plus, nous en avons rendu les clés. »

*
Ce qui m'a surprise dans ce récit, c'est cette atmosphère relativement calme par rapport au contexte extrêmement violent.
Les scènes présentes dans le roman ne sont pas tournées vers le gore, même s'il y a des attaques répétées des zombies. Je pensais qu'il faudrait avoir le coeur bien accroché à la lecture de certains passages, mais ce n'est pas du tout le cas. L'auteur a créé véritablement deux espaces dans ce roman : l'appartement et l'extérieur de l'immeuble, peuplé de zombies en quête de nourriture.
C'est donc un roman plutôt introspectif. Antoine analyse sa vie passée, les causes de ses déboires, les raisons et les conditions de sa survie.

« Savoir que l'on est comestible, ça rend vivant. »

Le récit, rédigé à la première personne du singulier de l'indicatif présent, permet de partager la vision, la perception des faits et les émotions du narrateur dans un monde devenu hostile. En s'identifiant à lui, il nous donne l'impression de vivre avec lui ces événements.

*
Que s'est-il passé pendant cette nuit de beuverie ?
L'auteur laisse planer le doute sur les raisons de la transformation des hommes en zombies, ce qui lui permet de se concentrer davantage sur des réflexions philosophiques intéressantes en lien avec notre humanité, la différence, la solitude, les souvenirs, la mort, le deuil.

« D'ou viennent-ils ? Sont-ils le fruit d'expériences de l'armée américaine ? Une mutation naturelle de l'espèce ? Un virus ? Je ne suis pas biologiste, je ne compte pas faire de prélèvements. Ne pas savoir est une chance : la vérité est soit trop laide, soit trop banale. Il vaut mieux imaginer les mille explications possibles. C'est comme le big bang : on ne sait pas, et c'est tant mieux. »

Ce huis-clos, sous la forme d'un journal intime, prend aussi une forme engagée par ses idées sur notre société en déclin, la violence des rapports humains, la relation de l'homme avec son milieu naturel et notre impact sur l'environnement et la nature.

« C'est la fin du monde, ou plutôt du monde tel que nous le connaissions, tel que nous l'avions domestiqué et vaincu.

*
Pour conclure, avec des chapitres courts et rythmés, cette lecture plaisante et rapide échappe au cliché un peu trop redondant des romans de zombies.
Ce roman est à découvrir, il peut plaire non seulement à tous les amateurs de romans de zombies, mais à tous ceux et celles qui aiment les huis-clos et les romans psychologiques.
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« Savoir que l'on est comestible, ça rend vivant. Je vous le garantis. »

Belle petite surprise de dernière minute ! Merci beaucoup à Patlancien pour cette sympathique découverte, sans qui je n'aurais sans doute jamais entendu parler de ce roman.

Voilà une histoire de zombies surprenante, qui ne ressemble pas à ce que j'ai déjà lu auparavant. Je l'ai trouvée fort rafraîchissante, toutefois ! Rien de trop « gore » mais un brin angoissant, quand même. Une atmosphère haute-tension. En peu de pages, Antoine (notre personnage principal) décrit bien les conséquences de la catastrophe qui ravage non seulement Paris mais, selon ce qui est diffusé à la radio, à bien plus large échelle. Les villes tombent les unes après les autres. C'est par un coup de chance si lui est épargné au début des événements.

« Je pense aux raisons qui font que je m'en suis sorti. Pourquoi moi ? Sans doute mon asocialité a été déterminante, je n'avais personne à sauver, je ne tenais même pas assez à ma vie pour tenter de m'enfuir. (...) Je n'avais rien à perdre, contrairement à tous ceux qui avaient un métier, un appartement, des choses, une femme, une famille, qui réussissaient mieux que moi en dépit de l'atrophie de leur coeur et de leur morale, et souvent de leur talent. (...) Plus profondément, je crois que j'ai survécu parce que j'étais à part. »

Il n'est pas chez lui mais dans l'appartement d'une amie, à Montmartre, celle-ci ayant fait une fête chez elle la veille au soir. À son réveil le 1er mars, le monde a basculé. Bien vite, sa gueule de bois passera; il sera dans l'obligation de se barricader sur place, son balcon étant son seul contact avec l'extérieur. du troisième étage, Antoine est témoin de ce qui se déroule plus bas dans les rues, il a compris que sortir était bien plus dangereux.

« Certains résistent encore. Mais tous font la même erreur : ils finissent par vouloir s'échapper, ils sortent de leur planque, de leur immeuble. Ils ne vont pas loin. »

Antoine ignore tout de ce qui s'est passé. Comment et pourquoi ?

« D'où viennent-ils ? Sont-ils le fruit d'expériences de l'armée américaine ? Une mutation naturelle de l'espèce ? Un virus ? Je ne suis pas biologiste, je ne compte pas faire de prélèvements. Ne pas savoir est une chance : la vérité est soit trop laide, soit trop banale. »

Il doit maintenant se débrouiller avec les conséquences affreuses d'une invasion qui grossit de jour en jour. Heureusement, Antoine a de la chance d'être tombé sur un immeuble chic et bien garni. L'appartememnt de son amie Stella est vaste, luxueux, confortable, décoré avec goût et surtout, bien approvisionné en produits alimentaires non seulement en quantité mais de choix ! Bouteilles de vin et de champagne au menu à volonté ! Parfait pour durer un bon moment...Tout en organisant sa survie dans l'immeuble de sept étages (chacun comptant quatre appartements) et bien qu'étant assez bien équipé au début en ressources en tout genre, il doit vivre avec la peur constante de se faire dévorer.

« Je les observe, j'espère ainsi m'habituer à leur apparence, comme ces arachnophobes à qui on apprend à côtoyer des araignées. Je n'ai pas le choix. Je dois dompter ma peur. Ils sont ma réalité maintenant. Ils sont la Nature. »

Et plus le temps passe, plus son confinement devient difficile psychologiquement. Antoine tente du mieux qu'il le peut d'instaurer une routine dans ses journées, pour ne pas perdre le fil...ni l'esprit. Chaque jour est un combat. le temps ne compte plus mais chaque jour reste pourtant une course contre la montre. Les morts n'ont rien d'autre à faire que de pourchasser sans fin les vivants. Peu à peu, le nombre de proies diminue tandis que celui des chasseurs augmente exponentiellement. C'est comme si on vivait pour attendre la fin...

« La mort est face à moi. Je sens sa présence physique. Je suis sur son territoire. Je ne m'en sortirai pas. À certains moments, je suis tellement tétanisé que j'oublie de respirer. »

On avance à tâtons, sans jamais se douter de ce qui se passera demain, dans deux minutes. C'est angoissant, on ressent bien toute la pression qu'Antoine subit. En même temps, c'est un personnage courageux et bien organisé. Il a peur mais ne se laisse pas abattre. Il parvient à trouver une lueur d'espoir dans sa vie malgré le foutoir dans lequel il est. Il réussit à tirer du bon de chaque journée et à se payer des petits plaisirs quand même. Dans le monde tel qu'il est devenu, Antoine profite de la vie du mieux qu'il peut. On vit au jour le jour sans rien pouvoir prévoir, sans savoir à quoi s'attendre. Pas beaucoup de retours dans le passé, pas le temps pour cela, il y a trop important à s'occuper. Revivre les souvenirs apporte un peu de réconfort mais provoque du désespoir, aussi. Vaut mieux ne pas trop s'y attarder. On vit le moment présent à cent pour cent.

« L'espérance dans un monde dévasté est une saloperie. le passé est un piège, le futur aussi. Il ne reste que l'instant présent. Une seconde est une forteresse indestructible. »

L'histoire est écrite de façon à ce que deux à cinq pages environ résument une journée, parfois sur plusieurs jours de suite, parfois on saute quelques jours entre les dates. Ça se lit vite et bien.

Une courte histoire qui va droit au but, efficace, sans flafla, bien écrite, inquiétante et qui sait capter notre curiosité. On embarque tout de suite, le cauchemar débute dès la quatrième page. Et le pire, c'est que bien que cela reste de la fiction, on le ressent comme si cela se pouvait. Je l'ai dévorée en deux soirs.

Une lecture à recommander !
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Grosse panne d'inspiration pour écrire un petit retour sur La nuit a dévoré le monde, que j'ai pourtant terminé depuis deux jours. Tout doit aller par deux, puisque c'est le temps que j'ai mis à lire ces 120 pages.
Ce livre représente à la fois tout ce que j'adore et tout ce que je déteste dans un roman. Voilà pourquoi il est si difficile d'exprimer mon ressenti.
Le personnage principal, Antoine Verney, auteur de romances à l'eau de rose remportant un succès très relatif, se rend à une soirée chez une amie. Il s'y ennuie tellement qu'au bout de peu de temps, il se réfugie dans une chambre avec une bouteille pour seule compagnie et finit par s'endomir sur le tas de manteaux déposés là par les invités. La gueule de bois qui l'étreint le lendemain matin ne l'empêche pas de remarquer que les vêtements sont toujours là, mais que l'appartement est bizarrement très silencieux. Il sort alors de la chambre pour découvrir un carnage.
Du sang partout, aucune trace des autres convives, hormis un cadavre décapité. À partir de là, il va apprendre à la radio que les zombies ont envahi le monde et pas seulement Paris où il se trouve. Il va donc se barricader dans l'appartement de son amie, puis investir l'immeuble de sept étages, et regarder ce qui se passe à l'extérieur du haut de son balcon. Voilà pour les grandes lignes que tout le monde connaît déjà.
J'en viens maintenant à ce que j'ai détesté dans la première moitié du roman. Ce n'est que de l'introspection d'un Antoine nombriliste, en mode Calimero, qui n'a éveillé aucune bribe d'empathie chez moi. Il a survécu parce qu'il est asocial et n'a pas songé une seule seconde à tenter d'aller au secours de sa famille, de ses amis, de son ex-femme qui vient de le quitter, contrairement au reste de la population qui s'est fait dévorer par les zombies... pour devenir des zombies aussi, et ainsi de suite, parce qu'ils se sont précipités pour retrouver leurs proches, du moins on l'imagine, ne disposant d'aucun détail sur d'autres protagonistes de l'histoire. Sauf que tout asocial et solitaire qu'il se décrit, il m'a semblé plutôt entouré, en fait. Mais le sort de ses "proches" lui est plutôt indifférent. Il nous en touche bien deux mots vite fait, espérant qu'ils s'en soient sortis, se posant une ou deux questions... mais c'est très superficiel et quand il vient à dire que certains lui manquent, c'est uniquement parce que la solitude, c'est sympa quand c'est choisi.
Enfin bref, donc dans toute cette première partie, on tourne dans la tête d'Antoine qui se débrouille d'ailleurs plutôt bien, entre deux pensées profondes, pour organiser sa survie dans ce grand appartement parisien, puis se ménager un avenir presque idyllique. Tout ce qu'il lui faut pour se sustenter, des armes, ses potes les oiseaux, et ses autres potes, les fleurs.
Maintenant j'en viens à ce que j'ai aimé. le style de l'auteur a fait passer tout le reste au second plan, surtout dans la seconde partie du livre, où Antoine s'humanise un peu et où j'ai commencé à m'intéresser à ce qu'il ressentait. Parce qu'en fait non, il n'est pas fait de pierre, et je n'ai donc pas regretté d'avoir persévéré dans ma lecture. Et en plus du plaisir de découvrir la plume envoûtante de Martin Page, j'ai été emportée par la profondeur de ce récit. L'auteur nous démontre, s'il en était encore besoin, que l'homme est son seul véritable ennemi et qu'il scie la branche sur laquelle il est assis. Et non, il n'y a pas de planète B.
Merci à mon ami @Patlancien qui a attiré mon attention sur ce livre qui sort des sentiers battus. Merci également à Vicky (@Bartzella) qui a enfoncé le clou et me l'a fait placer tout en haut de ma PAL.
Malgré mes réserves qui ne reflètent que mes goûts personnels, La nuit a dévoré le monde est un très bon bouquin, haletant et rythmé, qui ne donne aucune impression de longueurs, même lors des passages introspectifs, ce qui est assez rare pour être souligné, et je vais me pencher sur les autres écrits de cet auteur.

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Passer une soirée dans un joli appartement à faire (théoriquement) la fête, jusque-là rien d'anormal. Mais se réveiller le lendemain avec une déco fraîchement sanglante composée de quelques morceaux de cadavres là, on peut dire qu'il y a un problème. Un gros problème même ! Face à cette situation Antoine, trentenaire et écrivain pour dames en mal d'érotisme, tente de comprendre ce qui s'est passé, jusqu'à ce que la rue impose la terrible vérité : les zombies existent bels et bien ! Reclus dans l'appartement tel un Robinson, Antoine tente de s'organiser, mais surtout de ne pas succomber à la folie... Vous n'aimez pas l'hémoglobine ? Ca tombe bien, car il n'en est pas ou peu question dans ce livre. Ici, tout se joue sur l'aspect psychologique, la perte des repères, la solitude ou bien notre rapport au monde. Pit Agarmen offre ainsi une satire pleine d'humanité où les zombies ne sont que le reflet d'une civilisation en perdition. Amen !

Alors qu'une mystérieuse épidémie ravage le globe, Antoine se réveille le lendemain en rescapé miraculeux. Enfermé dans l'appartement d'une amie chez qui il passait la soirée, celui-ci ne comprend pas tout de suite le danger qui le guette. C'est en se penchant du balcon parisien qu'Antoine prend conscience du mal qui s'est emparé des hommes. Les morts-vivants ont pris possession des rues, traquant les derniers humains. La survie revêt alors bien des aspects pour notre anti-héros.

Roman psychologique avant tout, La nuit a dévoré le monde est une surprise. Une belle surprise ! Tandis que j'attendais un roman noir, voir d'épouvante, j'ai été étonnée par le parti-pris. Utilisant la littérature de genre comme fond en l'associant à une forme plus classique, l'auteur réussit avec habileté à imposer cette niche littéraire spécifique. Malin !

Alors qu'on suit l'évolution quotidienne d'Antoine débutant avec la promiscuité des zombies, la disparition successive de l'électricité, de l'eau et des habitants des quartiers alentours, l'auteur s'attarde surtout sur les pérégrinations intérieures du rescapé. Suivant son évolution psychologique, on s'aperçoit rapidement que cette catastrophe est vécue comme une "seconde chance" pour notre anti-héros. Ainsi, du haut de sa prison, Antoine s'interroge sur ce monde et du rôle de l'espèce humaine, sur sa solitude qui l'a peut-être préparé à surmonter cela et du regard des autres qui vous font sentir vivants. Mais une question demeure, Antoine est-il réellement seul ? 

Ecrit sous forme de journal, j'ai totalement été captivée par l'histoire, mais aussi par l'écriture à la fois simple et littéraire. Merci à Pit Agarmen, alias Martin Page, de briser les castes littéraires et démontrer ainsi, qu'un genre peut profiter à un autre !
Lien : http://bookncook.over-blog.c..
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Antoine se réveille un matin et la nuit a dévoré le monde : il est un survivant ,des zombies dévorent les humains et lui ,à l'abri dans un appartement , assiste à la fin de l'humanité.
Ce n'est pas un roman sur les zombies comme il y en a tant mais plutôt l'histoire d'un homme qui va se battre pour conserver son humanité . Et cela en fait donc un roman vraiment original et bien écrit .
La dernière partie du livre est bien rythmée et j'ai aimé la fin .
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Voir un film puis lire le roman qui l'a inspiré ensuite, est bien la meilleure démarche. Cela se confirme une fois de plus avec La nuit a dévoré le monde, film dit « de genre », découvert lors du Festival International du Premier Film d'Annonay, en février 2018. le roman de Pit Agarmen, en fait Martin Page, m'étant tombé sous la main, j'ai replongé dans le monde des zombies, en littérature cette fois.

Si l'histoire colle à peu près dans le film, surtout dans la première partie, le livre confirme une fois de plus sa supériorité dans les descriptions et surtout dans la psychologie du personnage principal, presque unique, si on met les zombies de côté.
Ici, nous ne sommes pas dans Walking dead et son délire bien étatsunien. Antoine Verney, écrivain, auteur de vingt-quatre livres lui permettant de gagner à peu près sa vie, découvre, au petit matin, après une fête très arrosée, un monde complètement fou : « Un nouveau monde commence. Une nouvelle Amérique est née, et nous en sommes les Indiens. »
C'est passionnant de suivre l'évolution psychologique d'Antoine aux prises avec ces zombies et surtout ce qu'il essaie d'entreprendre : « Meubler mon intérieur, décorer, bricoler, me permet de stabiliser mon esprit. Certaines heures, il me semble que j'ai réussi à me réinscrire dans une normalité. »
Beaucoup de questions se posent dans une situation extrême comme celle-ci et c'est tout le mérite d'un livre comme celui-ci. Pourquoi le cantonner dans un genre ? C'est une réflexion sur notre humanité, sur ce que nous faisons subir à notre planète : « C'est la fin du monde, ou plutôt du monde tel que nous le connaissions, tel que nous l'avions domestiqué et vaincu. »

Martin Page (Pit Agarmen) s'insurge contre les frontières que l'on érige dans le monde littéraire et il prouve, avec La nuit a dévoré le monde, combien il a raison. Finalement, comme il le constate, les zombies nous forcent à être meilleurs. Puissions-nous nous en passer pour changer ?
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Des soucis avec ma liseuse n'ont pas arrangé mon humeur déjà peu en joie tellement je m'ennuyais dans cette lecture ! Même si les choses se sont un peu améliorées sur la fin, je reste malgré tout déçue de ce roman !

Je ne m'attendais à un roman trépidant, dans la mesure où il se retrouve seul, le survivant va surtout faire de l'introspection. Introspection que j'ai trouvée répétitive et lassante, qui sortait peu du sujet de sa petite personne, sans aborder l'idée ce que qu'il aurait pu faire ou aimer faire, le temps était largement disponible pour ça ! Un manque d'imagination flagrant pour un romancier.

Quant à ses actions de sauvegarde vis-à-vis des zombies, elles ont été très décevantes, il n'expliquait rien ! J'aurais aimé savoir où, dans un immeuble de relatif standing, il a pu trouver une cargaison de planches et clous pour pouvoir condamner une énorme porte d'entrée, les fenêtres de 8 appartements entre le rdc et le premier étage (si mon souvenir est bon il y a 4 appartements par étage !

J'ai tout autant de questions pour le nombre d'armes et de munitions qu'il a déniché dans les appartements, alors que rien ne laissait présager l'apparition des zombies donc de la nécessité de s'armer !

Toutes les questions matérielles sont à l'avenant et je ne vais pas les détailler ! Peut-être en attendais-je trop mais l'ennui ne m'a jamais quitté !

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