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Critique de jovidalens


Ce livre c'est une mine à fragmentation.
Dès la première page, sensation d'être plongée, immergée, dans les notes d'un journaliste au moment de la composition de son article, en cours de composition : une pléthore de notes d'une cinquantaine de témoins de la vie et de la mort d'un homme qui a réalisé le rêve américain : celui qui partit de rien est devenu un mythe. Et quel mythe ! Un petit gars d'une petite ville perdue, sans grands attraits (ni lui, ni la ville) devenu l'ennemi public capable de disséminer toute la population, véritable arme chimique, qui fait exploser la société. Et c'est le titre en anglais de l'ouvrage : « Rant: An Oral Biography of Buster Casey ». Biographie orale, donc incontrôlable et soumise à toutes les imprécisions, phantasmes de celle ou celui qui parle…et de celui qui transcrit.
Si la première partie du livre, consacrée à la jeunesse et à l'éducation, la formation de Buster Casey, est écrite à l'acide pour dépeindre la société du coeur de l'Amérique (mais pas que…), il est difficile de la situer dans l'espace temps. On est dans le trash, les rites de vie sont complètement déjantés. Rant, s'auto-forme, entraîne son corps à résister aux poisons les plus forts et sa sagacité à comprendre, à connaître l'autre, grâce à ses capacités olfactives et…gustatives.
La seconde partie (quand Rant arrive en ville pour vivre sa vie d'adulte) nous fait basculer dans un futur organisé autour d'un espace temps partagé entre diurnes et nocturnes. Selon que vous apparteniez aux diurnes ou aux nocturnes, vous vivrez votre journée sous la lumière du soleil ou dans l'ombre de la nuit, et la journée sera scandée par deux couvre-feux. Sacré limitation de la liberté de chacun. Mais tout est sous contrôle : grâce à d'étranges connections intégrées dans le cou de chacun qui permet de recevoir, de visualiser des « transferts » d'autres réalités, sorte de publicité qui gère au mieux le temps de cerveau disponible, sauf que là, tout le cerveau est disponible ! Bien sûr cette dichotomie de la société va conduire à une spécialisation des deux sous-populations : c'est aux nocturnes que seront alloués les tâches de l'ombre mais aussi les plaisirs de la fête. Les Nuits du Crashing, énorme fête si barbare et si civilisée, réservée à des initiés. Véritable contre-culture qui va attirer les ados des diurnes. Véritable culture inventée par ce qu'il faut bien appeler le rebut de cette société, fascinée par la mort, dernière « aventure » excitante. Bien sûr, Rant choisira le société des Nocturnes, ceux qui ont déjà la « rage » pour mieux s'y épanouir.
Quant à la troisième partie, sorte d'évangile donnant une explication sur le phénomène Rant, elle clôt l'ouvrage sur une conception du temps … autophage, et, encore, une théorie du complot. Comme si, c'était la seule et évidente prolongation du mythe. Théorie du complot ou religion ?
Découverte de Chuck Palahniuk par cet ouvrage, j'en ai apprécié et la richesse et la créativité de sa pensée, le rire sainement iconoclaste que sa lecture provoque.
N'ayant pas lu le livre dans sa version originale, je me demande s'il ya les deux mêmes connotations de maladie et de colère dans le mot « rage »…
Et comme ceux qui dégustent les tourtes de la mère de Rant doivent être attentifs à ce qu'ils mastiquent, comme son père en tondant la pelouse fait exploser des oeufs pestilentiels, « Dévissez-vous le cou » pour regarder et voir la réalité même si elle a aussi des aspects glauques et cruels, « Dévissez-vous le cou » pour échapper à l'emprise des connections qui endorment les méninges., « Dévissez-vous le cou » pour concevoir votre propre conception du monde.
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