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Critique de Philios


Des histoires d'héritage, de codicille et de testaments, d'héraldique, d'obscurs mystères familiaux, avec, pour centre des intrigues, un domaine ancestral déliquescent, dans l'Angleterre victorienne.
Dès les premières pages de la préface de l'édition française, nous sommes appâtés par Gaëlle Josse, qui nous invite à partager, tels des initiés, le plaisir d'une lecture qui nous plonge au coeur d'une fresque romanesque insensée (environ 1500 pages en cinq tomes), aussi captivante qu'instructive quant aux moeurs anglaises du XIXe siècle.
L'épopée du jeune John Huffam, à la recherche de ses origines et soucieux de réparer les injustices dont sa mère et lui ont été les victimes, est la trame de ce roman mené tambour battant.
L'auteur entraîne son lecteur avec art au coeur d'un dédale labyrinthique, il le tient en haleine face à des développements imprévisibles, et lui fait partager des situations souvent cauchemardesques. Et nous sommes embarqués, tels de grands enfants, à travers cette histoire riche en péripéties comme nous l'étions jadis adolescents à la lecture de grands romans d'aventure.
Page après page, nous découvrons également, tel un décor mouvant, les conditions de vie âpres des petites gens et le mode de vie codifié et étincelant d'une caste corrompue et sans scrupules, parcourant un milieu très rural puis un univers densément urbain (Londres précisément).
L'architecture complexe de l'histoire, le sens du suspense, la manière de dépeindre personnages, lieux et moeurs d'une époque, l'infortune des protagonistes et les situations quasi rocambolesques auxquelles il doivent faire face convoquent immanquablement les oeuvres de grands auteurs victoriens : on pense à Dickens (notamment pour la peinture de l'incroyable misère urbaine et sa violence), à Charlotte Brontë (pour l'enchaînement de situations désespérantes) et bien sûr à Wilkie Collins (dont se réclame l'auteur) pour la noirceur (internements) et le suspense ; pour ma part, j'ai davantage pensé à Mary Elizabeth Braddon (pour la plus grande fluidité de style et sans les délayages parfois un peu burlesques de Collins).
Quant à l'écriture elle est littéraire, simple et élégante, et le vocabulaire, choisi.
Et la traduction française parfaite : c'est un challenge de maintenir ce niveau d'excellence tout au long de cinq volumes. de plus, les passages en patois ou en parlé citadin populaire sont traduits de manière à sonner vrai, sans qu'à aucun moment ils apparaissent lourd ou artificiels en français, ce qui est une prouesse de la part du traducteur tant un tel exercice est difficile.
Seuls bémols : des passages rendus un peu ardus (fin du quatrième tome notamment) par les finasseries de droit testamentaire et le grand nombre de personnages. Et un dénouement qui, pour éviter un "happy ending" attendu (et espéré), laisse le lecteur un peu frustré par une étrange fin, "en suspens".
Un plus : les magnifiques blasons en ouverture des différents tomes, les tableaux généalogiques et l'index des lieux et des personnages en fin d'ouvrage.
Une oeuvre captivante et originale, qui est bien davantage qu'un "pastiche victorien", à travers laquelle percent l'intelligence et la culture historique universitaire oxfordienne de son auteur. Une découverte atypique.
Gageons (et espérons) que le bouche-à-oreille fera des émules pour récompenser la qualité de ce roman !
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