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Citations sur Oeuvres Poétiques (166)

Vent, eau, pierre

L'eau perce la pierre,
le vent disperse l'eau,
la pierre arrête le vent.
Eau, vent, pierre.

le vent sculpte la pierre,
la pierre est coupe de l'eau,
l'eau s'échappe et elle est vent.
Pierre, vent, eau.

Le vent dans ses tours chante,
l'eau en marchant murmure,
la pierre immobile se tait.
Vent, eau , pierre.

On est autre et personne :
entre leurs noms vides
passent et s'évanouissent
eau, pierre, vent.

A Roger Caillois (p. 520)
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Un poète

... L'homme est l'aliment de l'homme. Le savoir ne se distingue pas du songe, ni le rêve du faire. Le poète a mis le feu à tous les poèmes. C'en est fini des mots et des images. Abolie, la distance entre le nom et la chose ; nommer c'est créer, imaginer c'est naître. (p. 95)
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Le visage et le vent

Sous le soleil inflexible
plaines ocre et collines fauves.
Je grimpai par des broussailles une pente de chèvres
vers un lieu de décombres :
pilastres brisés, dieux décapités.
Parfois des scintillements subreptices :
une couleuvre, un lézard.
Tapis dans les pierres,
couleur d'encre vénéneuse,
des peuples d'insectes friables.
Une cour circulaire, un mur fendu.
Accroché à le terre - nœud aveugle,
arbre tout de racines - le figuier religieux.
Pluie de lumière. Une forme grise : le bouddha.
Une masse confuse, ses traits,
par les escarpements de son visage
montaient et descendaient les fourmis.
Intact encore,
encore sourire, le sourire :
golfe de clarté pacifique.
Et je fus un instant diaphane
vent qui s'arrête,
tourne sur lui-même et se dissipe.
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Central Park

Fourrés verts et noirs, lieux décharnés,
fleuve végétal à lui-même attelé :
entre bâtisses plombées, il glisse sans bouger
et là où la lumière se met à douter,
où la pierre convoite son ombre, il se dissipe.
Don't cross Central Park at night.

Tombe le jour, la nuit s’allume,
Alechinsky trace un rectangle aimanté,
un piège à lignes, une cour pleine d'encre
enfermant une bête effrayée,
deux yeux, rage qui se love.
Don't cross Central Park at night.

Il n'y a pas de porte, ni entrée, ni sortie,
encerclée dans un anneau de lumière
la bête d'herbe dort les yeux ouverts,
la lune déterre des couteaux,
l'eau de l'ombre est devenue flamme verte
Don't cross Central Park at night.

Il n’y a pas de porte d'entrée, mais tous,
au milieu de la phrase pendue au téléphone,
du haut de la cascade du silence ou du rire,
de la cage en verre de l’œil qui nous regarde,
tous, nous tombons peu à peu dans le miroir.
Don't cross Central Park at night.

Le miroir est en pierre et la pierre est une ombre,
il y a deux yeux couleur de colère,
un anneau glacé, un ceinturon de sang,
on entend le vent disperser les reflets
d'Alice démembrée sur l'étang.
Don't cross Central Park at night.

Ouvre les yeux : tu es entré en toi-même,
tu vogues sur un bateau de monosyllabes,
tu traverses l'étang-miroir et débarques
sur le quai de Cobra : c'est un taxi jaune
qui t'emmène au pays des flammes
à travers Central Park au milieu de la nuit.

A Pierre Alechinsky
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A cette heure guerrière, à cette heure de sauve-qui-peut, les amants se penchent au balcon du vertige. Ils s'élèvent doucement, épi de bonheur sur un champ calciné. Leur amour est un aimant auquel est suspendu le monde. Il règle les marées.Il ouvre les écluses de la musique.
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Le Feu de chaque jour/Configurations

TROWBRIDGE STREET


6

Le froid immobilise le monde
L'espace est de verre
                    Le verre est de l'air
Les bruits les plus subtils érigent
des sculptures soudaines
L'écho les multiplie et les dissipe
Il va neiger peut-être
L'arbre enflammé frissonne
tout assiégé de nuit
Quand je parle avec lui je te parle

p.447
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Hommage et profanations
EXPIRATION


3
Soleil d'ombre Solombre aveuglante
mes yeux vont enfin voir le jamais vu
ce qu'ils perçurent sans le percevoir
L'envers des visions et de la vue

Les luths du laudanum des louanges
dalles dilapidées et litanies
la pitié de la pierre impitoyable
le lustre des liesses et des larmes

Les obsèques restent baroques
au Mexique
          La mort toujours
n'est soudain que mort n'importe où

Fermer les yeux dans le jour blanc
le jour jamais vu n'importe lequel
que verront tes yeux et non les miens

p.222
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Poèmes (1989-1996)

EXERCICE DE TIR


La marée se couvre, se découvre, se recouvre et marche
toujours nue.

La marée se tisse et se détisse, s'enlace et se divise, n'est
jamais la même ni une autre.

La marée sculpte des formes qui durent ce que durent sa houle.

La marée polit des coquilles, brise des rocs.

p.614
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Mise au net


Je m'éloigne de moi-même,
à la suite de cette phrase titubante,
sentier de pierres et de chèvres.
Les mots luisent dans l'ombre.
Et la noire marée des syllabes
couvre le papier, elle enterre
leurs racines d'encre
dans le sous-sol du langage.
Hors de mon front, je sors dans un midi
à la dimension du temps.
Les siècles de l'assaut du banyan
contre la patience verticale du mur
sont moins longs que cette bifurcation
instantanée de la pensée
entre le pressenti et le perçu….

p.485-486
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Arbre au-dedans/LA NUIT, LE JOUR, LA NUIT

LETTRE DE CRÉANCE
Cantate


1
Entre le jour et la nuit
une zone indécise est suspendue.
Ni ombre ni lumière :
                  rien que du temps.
L'heure est une pause précaire,
page qui s'enténèbre,
page où je trace,
lentement, ces lignes.
                   L'après-midi :
une braise qui se consume.
Le jour gravite et s'effeuille.
Un fleuve obscur
lime les confins des choses.
                        Doux et opiniâtre,
il les conduit je ne sais où.
Le réel s'éloigne.
               J'écris :
je parle avec moi
               — je te parle.

p.583-584
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