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Critique de Ingannmic



Ce n'est pas un nouveau départ qu'évoque David Peace en se référant à "l'année zéro". le zéro est ici davantage synonyme d'anéantissement, de néant, d'absence totale d'espoir.
Ce qui n'est pas vraiment étonnant, me direz-vous : l'auteur de la tétralogie du Yorkshire n'a pas habitué ses lecteurs à faire dans l'optimisme.

Et "Tokyo année zéro" porte bien son empreinte : on y plonge dans un gouffre de noirceur, maintenu en apnée par un rythme saccadé, obsédant, en compagnie d'un narrateur tourmenté par ses démons, dont les zones d'ombre font que l'on a le sentiment de ne jamais vraiment le connaître, et suscitent une sorte d'aversion qui nous retient de vouloir le comprendre.

L'inspecteur Minami, flic véreux et drogué, enquête sur des meurtres de jeunes femmes qui comportent de troublantes similitudes.
A sa suite, nous errons dans un décor post apocalyptique, ravagé par les bombardements, accablé par la chaleur moite et torride du mois d'août 1946, où la mort semble omniprésente. Les odeurs d'excréments humains prédominent, les corps sont rongés par la saleté et la vermine, tenaillés par la faim. le style elliptique, lancinant de l'auteur, les leitmotiv exprimant les pensées torturées du héros, nous imprègnent de cet environnement cauchemardesque.

Le peuple japonais n'est plus qu'un peuple vaincu, plombé par l'humiliation d'une défaite qui hante les esprits, et que rappelle sans cesse la présence d'un occupant américain triomphant et malotru.
Les gangs ont la mainmise sur la ville, rivalités et coups bas règnent au sein d'une police gangrénée par la corruption.

Comme souvent dans les romans de David Peace, l'intrigue policière semble être un prétexte pour alimenter le caractère glauque de son récit, et démontrer l'étendue de la barbarie humaine, qui s'exprime aussi bien au travers de démonstrations de violence collective que d'actes individuels.

Un texte âpre, éprouvant (mais que voulez-vous, j'aime ça !), auquel je ferai tout de même un reproche... j'ai trouvé en effet que l'auteur versait parfois dans la caricature, notamment dans sa manière de rendre compte de la culture japonaise. Il utilise pour ce faire des coutumes anecdotiques, des sortes d'images d'Épinal, qu'il place ici et là dans son récit, avec pour résultat un manque de profondeur et de subtilité.

Mais cela ne m'empêchera pas de poursuivre ma découverte de sa trilogie tokyoïte (d'autant plus que le second volet en est, paraît-il, excellent) !
Lien : http://bookin-ingannmic.blog..
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