J'en profitais pour examiner mieux le petit vieux, mon guide. C'était un petit vieux qui était petit, et vieux -c'est encore la meilleure description que l'on puisse en faire.
L'un [des enfants] accrocha ma sympathie au premier coup d'œil. Il semblait très déluré, avec un visage rond, des cheveux blonds ébouriffés, des yeux pétillants comme une rosée de soleil. Stampede me dit qu'il s'appelait David Lottom, que sa maman était la plus jolie veuve de la ville. Il était vraiment sympathique, ce David Lottom, et je lui promis de lui rendre visite pour lui raconter personnellement mes exploits.
Mon papa puait. Ce que je dis là n'est pas méchant : c'est l'insigne de son courage; tous les les chasseurs de bisons puaient. Ils y avaient avec eux, perpétuellement, l'odeur de la mort et du sang, de la graisse froide, tout ça... C'étaient des drôles de types.
Ma maman aussi, c'était un drôle de type, si l'on peut dire. On rencontrait rarement des chasseurs de bison qui soient mariés. Il y avait cette fameuse odeur; l'amour, à la rigueur, peut être aveugle, mais je n'ai jamais entendu dire qu'il puisse être dépourvu d'odorat.
- À la vôtre !
Avec un ensemble parfait, ils levèrent le coude et balancèrent la tête en arrière. Je fis de même.
Jamais encore je n'avais bu de plomb fondu.
Ce n'est en fait pas si terrible qu'on pourrait le croire. Bien sûr, cela surprend. Mais juste pour un quart de seconde. Après, vous avez besoin de toute votre énergie pour résister. D'abord, c'est comme si on vous trempait la tête dans un brasier. Toute la tête. Vous avez ensuite l'impression que vos dents se déchaussent, que votre langue se dessèche au point de devenir un petit morceau de paillasson rêche. Et puis, ça descend. Déjà, les bruits de l'extérieur vous paraissent éloignés. Ils sont remplacés par les derniers battements amplifiés de votre pauvre cœur. La descente continue. Le brasier, vous l'avez avalé, et il coule dans votre estomac. Vous vous cramponnez instinctivement pour supporter le choc.