Aujourd'hui sort en librairie un roman que j'ai eu l'immense chance de pouvoir découvrir en avant première. Il s'agit de "
Les rêveurs définitifs" de Camille de Peretti.
Emma est une mère célibataire, traductrice de métier. Elle ne travaille que sur des romans feel-good ou des romances alors qu'elle aimerait tant traduire les textes de Woolf ou de Joyce. Et puis, elle a une lassitude à travailler sur les mots des autres alors qu'elle se rêve en auteure. Son fils unique, Quentin est quant à lui un adolescent solitaire qui s'épanouie sous un pseudo dans un monde fait de jeux vidéos et dans lequel il peut prendre tous les risques, être vraiment lui-même sans peur.
Leur vie se passe entre vie réelle décevante et frustrante et vie fantasmée dans le monde qu'ils se sont créé et qui leur permet un échappatoire. Malheureusement, Emma a négligé certains aspects administratifs et le fisc se rappelle à son bon souvenir suite à sa dernière déclaration d'impôts. Peinant déjà à joindre les deux bouts, cette mère célibataire ne sait comment faire pour trouver les 5000 euros réclamés par l'administration. Une solution lui est donnée alors qu'elle accepte une mission pour la société Kiwi qui souhaite mettre au point un logiciel capable de traduire à la perfection les oeuvres sans perdre le style ou laisser s'échapper l'émotion. Quentin de son côté, depuis sa petite chambre d'adolescent, met au point en secret un virus capable de détruire les systèmes de protection des données personnelles de milliers de gens, devenant ainsi un hackeur et le faisant basculer dans le darknet.
Un roman qui interroge beaucoup de thèmes forts avec l'émergence des intelligences artificielles qui petit à petit menacent certaines professions, tendent à remplacer l'homme. Une machine est elle capable d'égaler un travail effectué par un être humain, peut elle vraiment, dans le cas de la machine en cours de création dans le roman, saisir les subtilités de langage, reformuler dans une autre langue sans perdre la quintessence de l'oeuvre originelle ?
Une belle observation sur le pouvoir du rêve, de l'imaginaire, l'écriture, la littérature, ces aspects très humains qui viennent se heurter à ces nouvelles technologies, ces intelligences artificielles qui semblent nous menacer.
Un roman qui parle aussi de solitude, celle d'Emma, qui vit seule, sans homme, avec peu d'amis, et son fils qui vit lui même enfermé dans une autre forme de solitude. Ils vivent à côté l'un de l'autre sans vraiment jamais être ensemble.
Des personnages auxquels on s'attache et à qui on s'identifie, dont on suit les aventures dont la réalité flirte régulièrement avec la fiction, dont on voudrait qu'ils arrêtent de courir après leurs rêves pour vivre enfin !
Une plume incisive, engagée, féministe et très agréable qui nous entraîne dans une réflexion sur la société qui est la notre. Une auteure que je découvre avec ce roman et qui me donne envie de poursuivre la découverte avec d'autres livres.
En bref, une très belle lecture, une chronique douce amère, parfois un brin caustique de notre société toujours tiraillée entre réel et fantasme, entre humanité et réalité virtuelle de plus en plus envahissante de notre quotidien. Un roman de la rentrée que je vous recommande particulièrement.
Un grand merci à Net Galley et Calmann-Levy pour l'envoi de ce titre.