Une pizza surgelée, pas de risque de la rater, on l’a achetée sans connaître la marque. Un peu à cause de la boîte qu’on a trouvée belle. Pas belle comme dans un musée, rien à voir avec un tableau ou une photo, ils mettent des photos dans les musées maintenant c’est nouveau, mais belle quand même.
Une illustration qui montre un olivier près d’une jolie maison, tout ça au trait, élégant. Un gros drapeau aux couleurs de l’Italie surmonte le tout. Encore au-dessus, en juste plus petit que le drapeau, la marque Zap Pizza, l’Italie en moins de cinq minutes. Le carton est solide, épais, mais son séjour au congélateur l’a rendu souple. Un peu comme un cuir usé d’une vieille paire de chaussures.
Je dois être difficile à vivre aussi, tout en plumes de canard, la vie qui glisse et l’ironie qui sert d’émotion ; le contre-pied perpétuel, ça peut fatiguer à la longue.
Les petites filles s’entraînent à devenir mère avec des poupons joufflus, pourquoi ne pas apprendre à être des fils et des filles avec des baigneurs ridés, aux cheveux rares et blancs, des poupées qui feraient pipi, qu’on devrait changer ? On pourrait même les faire parler et radoter, la fin de vie mérite bien autant d’attentions que son commencement.
L’espace ou vit m’a mère n’est constitué de minutes arrêtées , d’époques qu’elle a traversées autant qu’elles l’ont traversée. Ma mère immobile au centre de son univers, dans son big-bang à L’envers, les murs toujours plus proches, toujours moins de place où circuler. Son univers est en contraction, il s’effondre sur lui même . Il arrivera au moment où il l’engloutira. Fatalement. Quand elle ne pourra plus accumuler, et plus encore, elle ne pourra plus bouger, enkystée dans son sarcophage.