Tout commence le 12 juillet 1998. En pleine finale de la coupe du monde de foot, Victoire et Nicolas se rencontrent dans un bar à Paris. Nicolas, 19 ans, est étudiant en sociologie, c'est un solitaire peu à l'aise avec les filles qui a très d'expérience dans ce domaine. Il profite d'assister à cette finale du Mondial dans un bar pour tenter de se rapprocher physiquement des filles supportrices. Victoire, étudiante en psycho, est née le 10 mai 81, le jour de la victoire de
François Mitterrand. Nicolas et Victoire s'installent très vite ensemble.
Ce roman nous raconte leur histoire, c'est l'histoire ordinaire d'un couple ordinaire qui s'installe vite dans la routine du quotidien avec la tendresse qui remplace vite le sexe et l'apparition des pantoufles...
A l'issue de leurs études, ils rentrent mollement dans la vie active, sans vocation et sans ambition, elle dans une agence de communication et lui comme rédacteur dans une revue de sociologie sur internet. Pas du tout investis dans leur vie professionnelle, ils mènent une vie étriquée sur tous les plans et ne parviennent pas à donner un sens à leur vie.
Nicolas et Victoire sont un peu des anti-héros assez médiocres, sans ambition, apathiques qui enchainent frustration et résignation. "Leur couple finit par prendre tout entier la place des idéaux qui leur manquaient tant. Il était devenu un refuge où ils se sentaient à l'abri de la vie."
Mais au delà de l'histoire de Nicolas et Victoire c'est le portrait d'une génération que nous brosse
Marjorie Philibert. Une génération qui s'identifie un temps aux jeunes du loft puis qui vit son premier engagement en descendant dans la rue le 21 avril 2002 lorsque le Pen atteint le deuxième tour de l'élection présidentielle, première manif et premier vote pour ces jeunes.
Marjorie Philibert se livre à une sorte d'analyse sociologique de ces jeunes timorés, sans envie, centrés sur eux-mêmes qui lors de la canicule de 2003 imaginent faire des enfants pour ne pas mourir seul comme tant de personnes âgées cet été là "pour avoir quelqu'un qui puisse faire le numéro des pompiers avant qu'il ne soit trop tard." L'analyse psychologique du couple est également assez fine car l'auteure dissèque leurs pensées. "On s'épuisait à se parler sans s'écouter, à s'expliquer sans se comprendre, à souffrir comme si on avait tout le temps devant soi, pour finir par passer sa vie côte à côte comme deux vaches dans un pré."
Je trouve que le bandeau de couverture dessert énormément ce roman qui est moins léger qu'il ne le parait. L'écriture est vive et très agréable à lire. Bourré d'anecdotes, le récit est souvent drôle mais distille un sentiment de tristesse, de pessimisme face à la vie sans consistance de ce couple désenchanté. J'ai été étonnée de prendre autant de plaisir à lire ce livre à la douce mélancolie.
Une surprenante découverte grâce à l'aventure des 68 premières fois.
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