Est-ce le hasard qui fait la rencontre ? Mais sait-on ce qu'est le hasard ? Ce qui paraît n'avoir été aucunement déterminé échappe moins à la causalité qu'on pourrait le croire, mais ce qui le commande n'est pas de l'ordre de la raison, quelque chose le détermine qui nous échappe, une nécessité qui n'apparaît qu'après coup, quand est évident le sens de ce qui est advenu. Rien n'arrive qui ne devrait arriver.
André Breton et le sculpteur Alberto Giacometti, aux Puces, en 1934, sont vivement intrigués par un objet étrange, une sorte de masque qui tient du heaume ancien et du loup de bal masqué et que le poète Joë Bousquet, consulté, identifie comme une protection donnée pendant la guerre aux guetteurs des tranchées. Giacometti acquiert ce masque, qui vient à point pour l'aider à avancer dans sa réflexion et sa pratique de sculpteur, en un moment de vif questionnement. Ainsi les surréalistes vont-ils en quête d'objets stimulants pour leur imagination parce que semblant appartenir au monde du rêve.
Jacqueline et André (Breton) devaient se rencontrer et pour cela ils n'avaient besoin d'aucun de ces intermédiaires qui font se tisser les relations ordinaires. Il suffit de savoir attendre, d'avoir les yeux, les oreilles, le coeur ouverts pour cueillir les signes, entendre les messages. Ainsi, le 10 avril 1934, Vénus occultant la lune, André Breton, qui déjeune dans un restaurant de la rue Rachel, entend le cuisinier jouer avec les mots en disant "Ici l'on dîne" ou "Ici l'Ondine" à la serveuse. Le 29 mai suivant, l'ondine Jacqueline entre dans la vie d'André Breton.